-Les personnages de la série ne m’appartiennent absolument pas. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Texte écrit dans le cadre d'un challenge octobre 2011.
Pairing :
Yann/Kevin
Rating : G
Sous les voiles
Le jardin verdoyant était impeccable et les senteurs des fleurs fraîchement arrosées lui parvinrent distinctement.
Yann se dirigea vers le perron, ignorant les nombreuses personnes qu’il croisait sur son chemin. Chacun était là pour une seule personne. Lui, il venait pour son Kevin. L’infirmière de l’étage le reconnut et lui sourit.
« Il a passé une bonne nuit, Monsieur Berthier. Il a dévoré le petit-déjeuner »
« Merci ».
Il rendit le sourire à la jeune femme. Ces paroles le réconfortèrent quelques secondes avant que la lourde réalité ne reprenne le dessus et qu’il ne s’assombrisse de nouveau.
Pourtant, il se composa rapidement un autre visage après avoir expiré une bonne fois devant le battant de la porte qui le séparait du jeune homme aux yeux si bleus et qui avait bouleversé sa vie.
Cela ne lui apportait rien de bon s’il venait avec sa tête des mauvais jours. De toute façon, il ne comprendrait pas. Sa main se leva et frappa le bois. Il poussa lentement la porte et se faufila avec un regard attendri vers le blond. Installé dans le seul fauteuil de la chambre, il lisait une de ces BD qu’il affectionnait et son visage rayonnait comme celui d’un enfant.
« Salut Kevin »
Le regard océan se fixa sur le visiteur et un sourire se dessina sur ses lèvres.
« Oh
Yann… tu es venu ? » demanda-t-il en refermant son livre et en se redressant.
« C’est dimanche aujourd’hui. Tu avais oublié ? »
Il s’en voulut aussitôt. Face à lui, le jeune homme baissa la tête. Bien sûr qu’il avait oublié quel jour on était. Rien n’avait changé depuis sa dernière visite.
« Il fait beau, tu as vu ? On va pouvoir déjeuner dehors, d’accord ? »
« Super. On va marcher un peu avant ? »
« On fait comme tu veux, mon ch… Kevin »
Ne pas le brusquer. Les paroles du médecin lui tournoyaient dans la tête. Il lui faudrait du temps, beaucoup de temps. Et pour
Yann, énormément de patience.
Il en crevait de ne pas pouvoir le prendre dans ses bras, le faire rouler sur le lit. Lui faire l’amour. Mais il devait prendre sur lui, visite après visite. Il avait mal. Le cœur déchiré quand il rentrait chez lui, seul, à se demander s’il appartenait encore à quelqu’un. Si tout espoir n’était pas vain.
Il se secoua mentalement. Non. Le médecin lui avait assuré, les infirmières lui avaient confirmé. Cela pouvait être très long, mais le miracle se produisait. Fréquemment. Ce n’était pas irrémédiable.
« Tu viens ? »
Kevin était déjà sur le pas de la porte et l’observait à la fois intrigué par son attitude et pressé d’aller prendre l’air.
Il ne savait peut-être pas quel jour on était, mais il était sûr d’une chose. Il aimait bien quand
Yann venait. Son cœur battait plus vite, ses mains et ses pieds fourmillaient. Son ventre faisait des vagues agréables. Il se sentait léger et de bonne humeur.
« J’arrive »
Ils longèrent les allées, côte à côte.
Yann lui racontait ses journées, ses soirées. Passait sous silence ses nuits de solitude. Il lui racontait quelques péripéties de leurs collègues, quelques blagues et se nourrissait des éclats de rire qu’il récoltait.
« Il y a une fille qui est venue me voir. Une brune, des grands cheveux… »
« Laura ? »
Un haussement d’épaule. « Je crois. C’est mon amie. Je l’ai senti. Elle m’a pris dans ses bras. Elle m’a serré très fort et je l’ai senti. Qu’elle était importante. ».
Et lui, il n’était pas important dans sa vie ? Les poings serrés, il refoula encore une fois sa rage qui ne leur apporterait aucun réconfort.
« Je lui ai fait de la peine. Elle a pleuré en partant. Je n’aime pas ça,
Yann. Je n’aime pas du tout. »
Ils étaient arrivés dans le fond du parc. Personne autour d’eux. Pour détendre l’atmosphère,
Yann sortit de sa poche une balle.
« Ça te dit ? » Il agita le projectile jaune sous le nez de son compagnon.
« Yes ! On fait un match et celui qui perd a un gage. »
« Ok, comme tu veux. Quel gage ? »
« On décidera tout à l’heure »
Après de nombreuses passes,
Yann gagna la partie. La condition physique du plus jeune n’était pas au top, bien qu’il soit dynamique. Il avait travaillé dur pour retrouver sa forme, qu’il continuait d’entretenir dans le centre, mais c’était trop peu pour ce sportif dans l’âme. Souvent, il rageait de ne pouvoir en faire plus.
« Alors, qu’est-ce que je dois faire ? » Kevin peinait à reprendre son souffle.
« Attends, je réfléchis ».
Ils avaient commencé à remonter vers le pavillon. Lentement.
« Alors ? »
« Est-ce que… tu peux me prendre dans tes bras ? Comme avec Laura ? »
Kevin était troublé. Il voulait un câlin ?
« Ben… si tu veux. »
Il l’étreignit d’abord timidement, l’attirant contre sa poitrine musclée. Les papillons s’agitèrent encore plus fort et un sentiment de bien-être l’envahit. C’était encore mieux qu’avec la fille. Plus intense. Ils n’étaient pas amis, eux deux… Il y avait autre chose, un autre lien qu’il n’arrivait pas à définir.
Yann se laissa aller. Enfin. Les larmes lui montèrent aux yeux, perlant à ces cils. Il se mordit la lèvre pour ne pas les laisser échapper. Cela faisait une éternité qu’ils n’avaient pas partagé une étreinte. Son corps lui manquait. Ses bras autour de lui. Son odeur. Kévin lui manquait. Il s’accrochait à son tee-shirt, refoulant ses sanglots.
«
Yann, ça va ? »
« Oui… allez viens, on va déjeuner »
…
Dans le jardinet, attablé l’un en face de l’autre, ils avaient terminé leur déjeuner et dégustaient une part de gâteau accompagné d’un café.
« Et en quel honneur, ce petit cadeau ? » Kevin contemplait la petite boîte carrée qu’il triturait entre ses doigts. Son visiteur apprécia le sourire enfantin et la fossette sur sa joue.
« C’est… un anniversaire… qui nous concerne tous les deux… Ouvre plutôt » finit par insister
Yann pour ne pas répondre à cette question embarrassante. Il s’était douté qu’elle allait être posée, mais n’avait pas réussi à résoudre son dilemme. Que lui répondre sans trop lui en dire ? Et en réalité, il espérait que cela déclenche quelque chose en lui.
Fébrilement, le blond ouvrit l’écrin et découvrit un anneau. Le métal scintilla et quelques flashs traversèrent l’esprit du jeune homme. Une main qui lui passait cet anneau au doigt. Son bonheur. Et le sourire. Le merveilleux sourire de
Yann. Éclatant. Il comprit enfin.
Relevant les yeux pour plonger dans celui attentif et plein d’espoir du brun, il saisit la main posée près de la tasse. Y glissa l’anneau, et retira ses doigts dans une lente caresse. Se leva de sa chaise et se pencha vers lui.
« J’avais raison… C’était cela, ce sentiment d’apaisement quant tu es près de moi. Cette sensation étrange aussi. Là. » Il désigna son ventre. « Et là aussi » en pointant son cœur. « Surtout là ».
Yann restait immobile. Ne retenant plus ses larmes qui roulaient sur ses joues.
« Je ne me rappelle toujours pas,
Yann. Il manque tellement de morceaux de ma vie. Mais ça, c’est nous deux. Tu vois, rien n’a pu l’effacer, même pas un accident à la con ! Suffit juste de continuer à soulever les bons voiles »
Il vint tout près de lui et essuya les perles salées du pouce.
« Ne pleure pas, je t’en supplie. Je suis là. Je reviens tout doucement. Je reviens vers toi.».
Yann n’y tint plus et se leva rapidement, étreignant son compagnon. Son homme. Qui lui revenait enfin, en miettes, peut-être momentanément seulement, mais il s’en foutait. Il le serrait si fort que Kevin dut se dégager légèrement pour ne pas mourir étouffer. D’un geste du menton, il l’incita à lui passer l’anneau au doigt pour la deuxième fois.
« Je suis heureux,
Yann. Amnésique, des cases vides, des blancs, tout ce qu’on veut. Mais ma place est dans tes bras, j’en suis sûr maintenant.»
Yann avait la gorge nouée. Oui, ce serait encore très long, mais ils étaient sur la bonne voie. Ensemble. Leur vie serait encore belle. L'espoir était là.
« Je t’aime »
FIN