Encore une songfic, pour l'anniversaire 2010 de Christie
préambule : Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de : Brad Wright & Robert Cooper. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Personnages : Rodney McKay / John Sheppard
Genre : Romance – Réconfort – Songfic
Résumé : Ce soir-là, le colonel Sheppard trouve refuge auprès de McKay. Celui-ci saura-t-il rassurer son ami ?
Prends-moi dans tes bras
MacKay se redressa en grognant. Quel était le fâcheux qui le réveillait au milieu de la nuit? Pour une fois qu’il dormait paisiblement. Parce que le sommeil lui avait été chichement compté depuis quelques temps.
Et ce soir, grâce aux petites pilules données par Carter, il s’était enfin assoupi, laissant pour un moment derrière lui ses inquiétudes et ses mauvais pressentiments.
Et voilà qu’une main sur son épaule l’arrachait à l’oubli bienfaisant où il avait glissé et il allait devoir à nouveau affronter ses problèmes, ou plutôt SON problème.
Il ne croyait pas si bien dire… Parce qu’il n’eut pas le temps d’ouvrir la bouche pour agonir l’importun de toutes sortes d’épithètes soigneusement choisis, qu’il reçut le choc d’un corps contre lui, un corps qui tremblait, un corps qui cherchait le réconfort et, abasourdi, il identifia le colonel Sheppard, ce problème auquel il avait échappé durant quelques heures d’un sommeil sans rêve.
Interdit, il se contenta de refermer les bras sur l’homme qui se pressait contre lui et, comme on le fait d’un petit enfant apeuré, il lui caressa légèrement le dos en le berçant doucement.
Prends moi dans tes bras
J'ai besoin ce soir
Au moins une fois
D'être dans le noir
De ne plus penser
De fermer les yeux
De laisser aller
Mon cœur malheureux.
Et tandis qu’il le tenait ainsi contre lui, la haine déferlait sur lui en vagues d’une violence inouïe alors que, confronté à cette réalité inimaginable quelques jours plus tôt, il tentait de rassurer celui qui, jusque là, avait représenté pour lui l’idéal du courage et de la stabilité chez un humain.
Qu’est-ce que Kolya avait bien pu lui faire subir pour qu’il soit ainsi traumatisé ? Quel secret cachaient ses silences, ses sursauts, ses absences ?
S’il avait tenu le Genii en face de lui, nul doute qu’à cet instant précis MacKay l’aurait abattu sans autre forme de procès.
Prends moi dans tes bras
Je veux me cacher
Prends moi dans tes bras
Je suis fatigué
Je n'ai plus envie
De vivre ma vie
Prends moi dans tes bras
Le temps d'une nuit
- Chut… Ca va aller… Tu es en sécurité ici… Personne ne te fera plus de mal.
Il ne pouvait que chuchoter des mots dérisoires dont il ne savait même pas s’ils atteignaient la conscience de son ami. Et, tandis que celui-ci se laissait aller contre lui, il repensa à cette journée maudite, dix jours avant, où Kolya avait réussi à enlever John.
Ils l’avaient recherché dans toute la galaxie et il leur avait fallu trois jours pour le retrouver, seul, errant sur une planète désolée, le corps portant les stigmates des tortures subies et l’esprit à la dérive.
Ils l’avaient ramené sur Atlantis et Carter s’était occupé de lui. John avait semblé se remettre, mais le scientifique n’était pas dupe de sa fausse bonne humeur. Kolya lui avait fait vivre un enfer et le fait qu’il refuse d’en parler n’arrangeait rien parce que cela laissait la porte ouverte à toute sorte d’hypothèses toutes aussi horribles les unes que les autres.
Pourtant, sentant le colonel trembler dans ses bras, McKay commençait à se dire que le plus atroce des scénarii était peut-être encore bien en deçà de la réalité.
Je te laisse mes désirs
Mes rêves et mes souvenirs
Ce soir fais moi oublier
Toutes les choses que j'ai ratées
Ce n'est pas facile
De dire tous ces mots là
Je me sens fragile
Pour la première fois
Il se recula un peu, écartant son ami de lui pour plonger dans son regard et la profondeur de la douleur qu’il y lut ouvrit une brèche saignante dans son cœur.
- Oh John… mais que t’a-t-il fait ?
Que pouvait-il faire ? Que pouvait-il dire pour soulager l’homme qu’il aimait ?
Soudain il osait penser à lui en ces termes : l’homme qu’il aimait… Il ne se l’était jamais permis auparavant. Jusqu’à la disparition de Sheppard, il avait tenté de se mentir, de se cacher la vérité, mais son angoisse lorsque celui-ci était tombé aux mains de son pire ennemi, son désarroi lorsqu’il n’avait pas pu le localiser immédiatement, ses envies de meurtre lorsqu’il avait vu les marques sur son corps, tout l’avait obligé à se rendre à l’évidence : il aimait cet homme plus que tout.
Je te laisse mes royaumes
Mes angoisse et mes fantômes
Tu vois, je suis comme un môme
Qui n'a plus envie de jouer
J'en ai marre de tout
Je ne comprends plus rien
Je suis à genoux
dans le creux de tes mains
Le rapprochement s’était fait, insensiblement. A se côtoyer, jour après jour, ils avaient appris à s’apprécier, étaient devenus amis et puis…
… Il y avait eu ce jour-là, ce baiser…
Ils étaient tous les deux restés abasourdis, n’arrivant pas à comprendre ce qui leur était arrivé. Sans doute avaient-ils lutté aussi férocement l’un que l’autre contre cette attirance qu’ils avaient du mal à admettre. Durant un moment leurs relations s’étaient espacées. MacKay avait demandé à partir en mission scientifique, Sheppard était retourné quelques semaines sur terre.
Et à leur retour sur Atlantis, ils s’étaient retrouvés. Ils n’avaient pas cherché à expliquer, pas tenter de mettre des mots sur ce qu’ils ressentaient. Ils avaient juste décidé de laisser faire le destin.
Il y avait eu d’autres baisers, puis des caresses qui avaient donné au scientifique l’envie de beaucoup plus.
Et puis il y avait eu ce jour maudit et tout s’était arrêté là.
Prends-moi dans tes bras
Viens me réchauffer
Je tremble et j'ai froid
J'ai le corps brisé
Prends-moi dans tes bras
Je voudrais crier
Que je n'ai que toi
Essaie de m'aider
Que pouvait-il faire ? Que pouvait-il dire ?
C’était la même litanie qui passait et repassait dans le cerveau enfiévré de Rodney tandis que John sanglotait dans ses bras. De longs sanglots déchirants qui faisaient mal.
Devait-il alerter Carson ? Celui-ci pourrait donner un sédatif au militaire…
Non… Ce n’était sans doute pas la solution. Parce qu’il savait que, tôt ou tard, son ami devrait se libérer du poids qui l’écrasait, parler enfin de ce qu’il avait subi. Et si ce moment était venu, il n’avait pas le droit, par lâcheté, de l’empêcher de se purger du poison qui l’étouffait.
- Je suis là, murmura-t-il. Tout va bien…
John se serrait plus fort encore contre lui et sa détresse le crucifiait.
Prends moi dans tes bras
Parle moi un peu
Dis n'importe quoi
Et ça ira mieux
Je me suis perdu
Depuis trop longtemps
Et je ne crois plus
A ce qui m'attend
- Parle-moi… Tu peux tout me dire…
Des mots comme des clés. Des mots magiques pour libérer la parole, libérer l’esprit.
Des mots pour plonger dans le cauchemar.
Il avait parlé, d’une voix rauque, atone, les yeux perdus dans un abîme insondable, si loin que Rodney se demandait s’il pourrait jamais revenir de ce rivage maudit où il dérivait.
Et durant tout ce temps, tous ces mots qui lui faisaient mal parce qu’ils peignaient le pire de ses cauchemars, il ne pouvait que le serrer contre lui, l’encourager à continuer à se libérer de ce poids qui l’étouffait, tout en s’efforçant de contrôler sa haine et son envie de tuer.
Je te laisse mes désirs
Mes rêves et mes souvenirs
Ce soir, fais-moi oublier
Toutes les choses que j'ai ratées
Ce n'est pas facile
De dire tous ces mots là
Je me sens fragile
Pour la première fois
Peut-on infliger tout cela à un être humain ? Humain ou non d’ailleurs… corrigea-t-il in petto. Non, personne ne devrait avoir à subir ça, aucun être au monde ne devrait être capable de tant de bestialité, de sadisme, de barbarie.
Il comprenait maintenant les yeux hantés, les mains qui tremblaient, le souffle oppressé et ces silences terribles. Il comprenait ce qui lui avait fait si peur : il l’avait pressenti le gouffre qui s’était ouvert sous les pieds de l’homme qu’il aimait, et il savait qu’il ne faudrait que peu de chose pour qu’il y bascule irrémédiablement.
Et en cet instant précis, tout ce qui le retenait, c’était la force de sa main, la chaleur de son corps, ses doigts qui jouaient dans ses cheveux tandis qu’il se libérait de son cauchemar.
Je te laisse mes royaumes
Mes angoisse et mes fantômes
Tu vois, je suis comme un môme
Qui n'a plus envie de jouer
J'en ai marre de tout
Je ne comprends plus rien
Je suis à genoux
dans le creux de tes mains
Il avait cessé de parlé et ils étaient là, dans l’obscurité, blottis l’un contre l’autre, sentant leurs cœurs battre ensemble.
- Tu m’en veux ?
Il sursauta à cette étrange question.
- De quoi pourrai-je t’en vouloir ?
- De t’avoir confié tout ça… De t’avoir empoisonné l’esprit avec ce qui ne regardait que moi.
Il alluma la lumière pour plonger ses yeux dans celui de son compagnon :
- Non… ça nous regardait, tous les deux ! Tout ce qui t’arrive, en bien ou en mal, me regarde John.
Dans les prunelles sombres, il lut une hésitation, une demande informulée. Puis soudain le militaire se dégagea de son étreinte :
- Non… Je n’ai pas le droit. Je ne suis plus digne de toi…
- Ne dis pas n’importe quoi ! s’emporta alors le scientifique. Je t’aime ! Et rien ni personne ne pourra changer cela.
Ils se regardèrent, interdits. Rodney se mordit les lèvres mais le mot avait fusé et il n’était plus temps de le reprendre. D’ailleurs, il n’y songeait même pas. A cet instant précis, en voyant l’éclat qui, durant une fraction de seconde brilla dans les yeux si tristes de son compagnon, il comprit qu’il venait de trouver le sésame.
Alors il le serra de nouveau contre lui, appuyant sa tête sur son épaule et il murmura une nouvelle fois :
- Je t’aime…
Prends moi dans tes bras
J'ai besoin ce soir
Au moins une fois
D'être dans le noir
De ne plus penser
De fermer les yeux
De laisser aller
Mon cœur malheureux
Il le sentit se détendre contre lui tandis que ses mains s’accrochaient désespérément à son tee-shirt mouillé par les larmes.
- Je t’aime…
Il avait l’impression que ces mots étaient comme un baume sur la blessure béante. John ne tremblait plus, il restait là, simplement, blotti contre lui, à l’écoute d’autres mots, d’autres sensations. Il lui semblait que l’horreur reculait et que la lumière remplaçait l’obscurité.
Soudain il n’était plus seul… Il allait peut-être réussir à se relever, à non pas oublier, mais vivre avec…
- Je t’aime…
Tout ce que Kolya lui avait volé, Rodney le lui rendait dans ses trois mots si simples et si beaux. Ils étaient porteurs de la vie, cette vie qu’il avait crue saccagée, cette vie qu’il aurait aimée quitté durant ces trois jours d’enfer.
Aujourd’hui il revivait.
Prends-moi dans tes bras
Je veux me cacher
Prends-moi dans tes bras
Je suis fatigué
Je n'ai plus envie
De vivre ma vie
Prends moi dans tes bras
Le temps d'une nuit
Rien ne serait facile, ils en étaient conscients tous les deux.
John allait devoir vivre avec ce traumatisme et Rodney devrait être doux, patient, attentif, bref, tout ce qu’il n’était pas à l’ordinaire.
Mais il savait qu’il y arriverait : parce que l’avenir de l’homme qu’il aimait dépendait de lui.
C’était à la fois effrayant et grisant : personne n’avait jamais dépendu de lui à ce point. Personne ne s’était jamais confié à lui, ne s’était jamais accroché à lui avec ce besoin qu’il lui insuffle l’envie de continuer.
- Je t’aime…
Ca ne suffirait peut-être pas toujours. Mais au moins c’était un bon début pensa-t-il sentant le colonel s’endormir contre lui pour ce qui devait être sa première vraie nuit depuis trop longtemps.
Il resserra son étreinte contre lui, éteignit la lumière, ramena la couverture sur eux, et il ferma les yeux, bercés par le souffle apaisé de celui avec lequel il était bien décidé à faire sa vie un jour.
FIN
Chanson de Daniel Guichard