Songfic pour l'anniversaire 2011 de Duneline...
Elle prend place à la fin de la saion 1, avant la 2 donc ne tient pas compte du premier épisode qui voit la libération (ou plutôt l'évasion) de Steve.
Préambule : Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de : Léonard Freeman, Alex Kurtzman, Roberto Orci, Peter M. Lenkov. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Genre : P.O.V. / Songfic
Personnages : Danny/Steve
Résumé : Pensées de Danny, habitant désormais le New Jersey.
Une île
Danny était assis seul dans ce grand parc, les yeux dans le vague, sans se soucier du mouvement autour de lui et son esprit l'emmenait bien loin des lieux où il se trouvait.
Une île, entre le ciel et l'eau
Une île sans hommes ni bateaux
Inculte, un peu comme une insulte
Sauvage, sans espoir de voyage
Une île, une île, entre le ciel et l'eau
Il revoyait l’immensité de l’océan, la plage de sable fin, le soleil qui éclairait les cocotiers et la couleur irisée du ciel au petit matin, tout ce qu’il n’avait pas ici, dans cette ville de béton et de ciment où le soleil tentait parfois une percée entre deux buildings. L’odeur iodée et vivifiante avait été remplacée par ces relents de gaz d’échappement et d’égouts mêlées, qu’il percevait maintenant comme nauséabonde alors que, quelques années auparavant, ils étaient pour lui naturels et presque revigorant.
Quelques années auparavant…
Toute une vie…
Lui qui n’avait eu de cesse de clamer son horreur du sable, de la plage, du soleil et de vanter son New-Jersey natal, il se trouvait soudain transplanté comme une fleur loin de la terre où elle peut croître. Et régulièrement, lorsque son service lui en laissait le loisir, il venait s’isoler dans ce grand parc parce qu’il y avait quelques palmiers anémiques qui, durant quelques trop courts instants, lui permettaient de croire qu’il était de retour là-bas et que Steve allait surgir au détour de l’allée sableuse en arborant ce sourire qui lui manquait tant.
Ce serait là, face à la mer immense
Là, sans espoir d'esperance
Tout seul face à ma destinée
Plus seul qu'au cœur d'une forêt
Ce serait là, dans ma propre défaite
Tout seul sans espoir de conquête
Que je saurai enfin pourquoi
Je t'ai quitté, moi qui n'aime que toi
Steve…
Loin de lui il s’étiolait, comme une plante en manque d’eau. Tout lui manquait de lui : son sourire, sa voix, l’odeur de son after-shave, ses manières qui le hérissaient tant par moment, sa pugnacité et sa témérité qui l’avaient si souvent mis en fureur et surtout cette manière qu’il avait d’attacher son regard sur lui, cet aveu silencieux qu’il refusait de comprendre.
Pourquoi avait-il fui ? Quel démon l’avait poussé à refuser cet amour qu’on lui offrait ?
Encore et encore, il repassait les événements des neuf derniers mois, tous ces bouleversements, et cette erreur monumentale qui l’avait conduit ici, à cet instant, loin de toute possibilité de bonheur.
Rachel et Grace s’étaient envolées sans lui, trop occupé à tenter de disculper celui qu’à cette époque il percevait juste comme un ami dans la panade. Ils avaient tout fait pour prouver l’innocence de leur chef de groupe, Kono et lui de l’extérieur et Chin de l’intérieur. Encore maintenant il s’en voulait de n’avoir pas compris la manœuvre de l’Hawaïen et d’avoir été si désagréable avec lui.
Même à ce moment-là, aussi inquiet qu’il ait pu être pour Steve, il n’avait pas voulu mettre un nom sur ce sentiment qui le poussait à prendre les risques les plus insensés pour innocenter le capitaine et confondre le véritable assassin du gouverneur.
Il leur avait fallu trois semaines pour mener leur mission à bien, trois longues semaines de tension et d’angoisse à se demander comment Steve survivait en prison où ils n’avaient pas le droit de lui rendre visite, ce qu’il pouvait subir de la part de ses co-détenus, s’ils parviendraient à prouver la culpabilité de Wo Fat et l’implication du gouverneur dans la mort des parents de l’ex-SEAL. Kono et lui avaient même pensé monter une opération commando pour arracher leur chef et ami à sa geôle, mais Chin les en avait empêchés et Danny n’était pas fier des paroles qu’il lui avait alors adressées. Il n’avait pas compris que l’Hawaïen savait parfaitement ce qu’il faisait et menait sa barque à sa façon pour obtenir la même chose qu’eux.
Et finalement leurs efforts avaient payé : Steve était ressorti un beau matin, lavé de tout soupçon, un peu plus mince qu’avant, les traits tirés mais arborant ce grand sourire qui lui faisait chaud au cœur et dans son regard il avait pu lire à la fois le soulagement et la gratitude.
Ce soir-là, après avoir fêté comme il se devait la libération de leur ami, ils étaient restés ensemble et d’un seul coup l’absence de Grace était tombée sur lui comme un couperet. Trois longues semaines qu’il n’avait pas vu sa princesse : tout juste si Rachel, dépitée d’avoir été abandonnée à l’aéroport, une fois de plus, une fois de trop, lui permettait de lui parler brièvement au téléphone ; il savait que si elle le faisait, c’était simplement parce que la petite souffrait de l’absence de son Danno. Il lui avait promis que, dès que l’oncle Steve serait sorti de ses ennuis, il la rejoindrait.
Il avait bu, plus que de raison, pour tenter d’oublier sa tristesse, mais aussi cette sensation bizarre qu’il avait ressentie en retrouvant Steve, cette espèce de désir qu’il n’avait pas compris et qui l’avait épouvanté. Il avait ri avec les autres, s’était étourdi de paroles sans queue ni tête, juste pour ne plus penser, faire le vide, chasser tout ce qui le dérangeait.
Ensuite, il ne se souvenait plus…
Au matin, lorsqu’il s’était réveillé, il avait mis un moment à comprendre où il se trouvait, et surtout avec qui. Puis la réalité s’était imposé à lui avec la violence d’une déflagration : il était chez Steve, dans le lit de Steve, à côté de Steve, blotti contre Steve… et aussi nu qu’au jour de sa naissance. Epouvanté, il s’était levé doucement, évitant de réveiller son… son quoi avait-il pensé à cet instant : son chef ? son ami ? son… amant ?
Non ! Cette pensée-là, il la repoussait de toutes ses forces : il n’était pas gay ! Il avait été marié, avait une petite fille, serait actuellement de nouveau installé avec Rachel et Grace si Steve n’avait pas eu l’imbécillité de se fourrer dans des ennuis gros comme une baraque.
Et tandis qu’il prenait une douche pour s’éclaircir les idées, refusant obstinément les images et les sensations qui se bousculaient dans sa tête, la colère l’avait envahi : tout ça, c’était la faute de Steve. A cause de lui il avait perdu la chance de reconquérir la femme qu’il aimait, de vivre à nouveau auprès de son enfant, de ses enfants, corrigea-t-il en pensant au bébé à naître… Steve, avec son inconscience naturelle, avait lui-même creusé la fosse où il était tombé et lui, comme un idiot, il s’était précipité pour l’en sortir, sans même se préoccuper de ce qui était le plus important pour lui ! Et tout ce que le capitaine faisait pour le remercier, c’était de… Non ! Ce n’était pas possible et ça ne le serait jamais !
Lorsque soudain deux bras l’avaient enveloppé, il s’était retourné avec violence et il avait frappé dur ! Etourdi, Steve avait reculé, l’incompréhension dans les yeux et il avait alors déversé sur lui toute sa tension, toute sa frustration, toute sa colère. Les mots avaient été durs, injustes, volontairement blessants. Et Steve n’avait rien dit, rien tenté pour se défendre : il était juste resté là, à le regarder et la souffrance qu’il avait lue alors dans ce regard l’avait bouleversé.
Alors il était parti sans se retourner, choisissant de laisser la colère l’emporter sur le remords et les doutes.
Il n’avait plus revu Steve depuis.
Une île, comme une cible d'or
Tranquille, comme un enfant qui dort
Fidèle, à en mourir pour elle
Cruelle, à force d'être belle
Une île, une île, comme un enfant qui dort
Il avait rejoint Rachel, avait su se faire pardonner et le fils qui leur était né avait noué un nouveau lien entre eux.
Il avait retrouvé son ancien service, ses anciens amis… Gracie était aux anges d’avoir son papa avec elle et lui il s’efforçait de cacher son mal être sous un humour un peu poussif, des sourires un peu contraints et la solitude grandissait en lui alors même qu’il était plus entouré que jamais.
Il avait eu des nouvelles par Kono : l’équipe avait été reconduite par le nouveau gouverneur mais désormais ils n’étaient plus que trois, selon les affaires, ils faisaient appel à un ou deux policiers en renfort, jamais les mêmes. La sensation qu’il avait ressentie en comprenant que Steve avait refusé de le remplacer était indescriptible, faite de joie, de regret et toujours de la colère qui grondait encore en lui par moment et qu’il s’efforçait d’entretenir, comme pour mieux chasser les images qui le hantaient de plus en plus souvent, de plus en plus clairement.
Cette nuit qu’il voulait à tout prix rayer de sa mémoire se faisait de plus en plus précise à mesure que les jours s’écoulaient, comme si l’amour voulait prendre sa revanche sur la peur.
L’amour…
Il avait fini par se l’avouer, quelques jours auparavant…
Rachel et lui avaient eu une longue discussion : ça ne marchait pas et ils en étaient conscients. Ce qu’ils auraient voulu être de l’amour n’était qu’une profonde affection, de celle qui unit deux êtres qui ont partagé un bout de chemin ensemble, mais entre lesquels il n’y a plus désormais qu’un lien tissé d’habitude et de respect. Ca peut suffire parfois, mais pas quand l’un des deux à le cœur qui bat pour quelqu’un d’autre.
C’était elle qui l’avait amené à mettre des mots sur ses sentiments : avec son intuition coutumière, elle avait perçu entre Steve et lui plus que l’amitié mais n’avait rien dit, trop désireuse de le retrouver… Mais ce sentiment qu’elle ressentait alors, elle s’apercevait qu’il ne résistait pas à l’usure du quotidien. Certes elle aimait Danny, mais pas de cet amour qui permet d’envisager de traverser les épreuves qu’on ne manque jamais de rencontrer sur sa route.
Il s’était débattu, pied à pied, avec l’énergie farouche de quelqu’un qui veut préserver le petit monde qu’il s’est construit, de l’aveugle volontaire qui refuse d’ouvrir les yeux parce qu’il a peur de ce qu’il va découvrir. Elle l’avait traité de lâche… Lui ! Lâche !! Et l’insulte en l’atteignant aussi violemment, l’avait obligé à regarder la vérité en face. Oui, il s’était comporté comme un lâche, un lâche et un salaud ! Il n’avait pas voulu affronter une réalité qui le dérangeait, il avait refusé de se rendre compte de ce qui le poussait vers Steve, juste parce qu’il avait peur du regard que les autres poseraient sur lui, à commencer par sa fille… Et il avait rejeté l’homme qui l’aimait impitoyablement, juste pour assurer sa petite vie bien conforme aux bonnes mœurs qu’on lui avait inculquées dès l’enfance.
Ils avaient parlé encore, longuement, de ce qu’il devait faire, de ce qu’elle déciderait, de leurs enfants qu’il voulait voir grandir… Il ne se souvenait plus quand pour la dernière fois ils avaient pu ainsi échanger sur des sujets aussi brûlants sans emportement, en s’écoutant, en pensant aux autres avant de penser à eux-mêmes.
Et quand elle lui avait demandé ce qu’il comptait faire, il n’avait pas pu répondre… Il savait qu’il allait de nouveau quitter ce qui n’avait jamais réellement été un foyer puisque son cœur était ailleurs, mais il ne savait pas encore ce qu’il ferait ensuite…
Il avait fallu supporter les larmes de Grace qui voyait à nouveau son petit monde s’écrouler, trouver les mots pour lui expliquer, lui promettre qu’ils se verraient toujours autant…
Et la vie avait repris son cours, à nouveau… Lui dans un appartement, elle dans la maison qu’ils avaient achetée à quelques kilomètres de là. Il faisait bien son boulot, était un équipier apprécié, voyait ses enfants quasiment tous les jours, avait des relations amicales avec son ex-femme qui lui remontait le moral lorsqu’elle le sentait malheureux, ce qui était un comble et il se sentait vide.
Vide parce que Steve n’avait jamais donné signe de vie, et il ne pouvait lui en vouloir : après les mots qu’il lui avait jeté à la figure, il était évident que le capitaine ne voudrait plus jamais de lui…
Et ça faisait mal…
Ca faisait mal parce qu’après les images qui étaient maintenant aussi claires que si cette unique nuit avait eu lieu la veille, il réentendait les mots que lui avait susurré son amant d’un soir. Et ces mots étaient beaux et pleins d’amour et de tendresse… les mots qu’on dit lorsqu’on aime vraiment.
Lui, Danny Williams, lieutenant de police de son état, il avait tué l’amour…
Ce serait là, face à la mer immense
Là, pour venger mes vengeances
Tout seul avec mes souvenirs
Tout seul qu'au moment de mourir
Ce serait là, au cœur de Sainte-Hélène
Sans joie sans amour et sans haine
Que je saurai enfin pourquoi
Je t'ai quitté, moi qui n'aime que toi
Parfois il décrochait le téléphone, formait le numéro de Steve et puis il raccrochait, avant même que la première sonnerie ne retentisse : comment pouvait-il lui parler ? Ce qu’il avait fait était irréparable.
Il avait noirci des pages et des pages de lettres qu’il déchirait à peine terminées parce qu’il n’y avait pas de mots pour décrire ce qu’il ressentait, ce remords, cette souffrance, ce vide…
Rachel avait beau l’encourager à reprendre contact, il s’y refusait : Steve ne pourrait pas lui pardonner, c’était certain.
Certaines fois encore il avait des nouvelles de Kono et de Chin, il savait que Steve allait bien, que l’équipe travaillait sans relâche… Pas un mot sur sa vie privée, rien qui mentionnait que leur chef pensait à lui… et il n’avait pas le cran de le demander.
Finalement c’était ça : Danny Williams, lieutenant de police de son état n’était qu’un lâche !
Une île, entre le ciel et l'eau
Une île sans hommes ni bateaux
Inculte, un peu comme une insulte
Sauvage, sans espoir de voyage
- Danny…
La voix inquiète, si oppressée qu’il ne la reconnue pas sur le champ, l’arracha à ses songes moroses.
Il releva la tête et sentit son cœur s’emballer tandis que sa raison lui murmurait qu’il déraillait totalement.
- Steve ?..., murmura-t-il tout de même d’un ton sceptique.
- Oui… Je… Ecoute…
Ils étaient là, face à face, incapables de trouver les mots, embarrassés et gauches, comme s’ils ne savaient pas quoi faire de leurs corps…
Et puis leurs regards se soudèrent et soudain plus rien n’eut d’importance. Dans les yeux de Steve, Danny retrouva soudain les lagons de leur île, ces endroits magnifiques qu’il avait découverts avec son ami… son amour… corrigea-t-il brusquement alors que, sans qu’il en ait conscience, il se levait et venait se lover dans les bras ouverts de l’être qui lui avait tant manqué.
Ils se tenaient tous les deux, enlacés, et plus rien n’avait d’importance : la colère, l’injustice, la violence, ces mots jetés dans l’affolement d’une révélation inconcevable… tout s’effaçait brusquement. Neuf mois de souffrance et de solitude s’annihilaient au contact de leurs corps qui se cherchaient et se retrouvaient comme s’ils ne s’étaient jamais quittés, comme si cette unique fois avait suffi pour imprimer définitivement leur empreinte l’un sur l’autre.
Il sentait battre le cœur de Steve contre le sien et soudain le ciel maussade du New Jersey se paraît des couleurs magnifiques du ciel hawaïen, tandis que les palmiers anémiques relevaient la tête et devenaient aussi majestueux que leurs homologues restés sur leur terre natale.
- Mais comment ? Comment ? parvint-il à bredouiller en restant blotti dans ces bras dans cette étreinte dont il languissait depuis si longtemps.
- Rachel…
Ce fut tout ce que l’ex-seal put dire avant de fondre sur les lèvres qui se levaient vers lui…
Et d’un seul coup tout fut balayé : la peur, les doutes, la souffrance…
Danny Williams, lieutenant de police de son état, venait enfin de trouver son graal.
Une île, cette île, mon île, c'est toi
FIN
Chanson de Serge Lama