Je n'en finis plus avec ce reclassement! Une sonfic offerte à Aviva l'an dernier...
Préambule : Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de : Russel T Davies. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Les vieux mariés
- On n’est pas bien là, rien que nous deux ?
- Si… On est bien… Tant que tu es là, je suis bien.
Leurs mains s’unirent, leurs regards se soudèrent puis leurs lèvres se rapprochèrent et dans le baiser qu’ils échangèrent, ils renouvelaient tous leurs vœux, se redisaient tout cet amour qu’ils partageaient depuis plus de trente ans.
- Tout de même… C’est tellement calme.
- Un peu de calme, ça fait du bien, répliqua l’immortel en serrant un peu plus fort son compagnon contre lui.
On vient de marier le dernier
Tous nos enfants sont désormais heureux sans nous
Ce soir il me vient une idée
Si l'on pensait un peu à nous
Un peu à nous
- Tu vas bien ?
- Mais oui… Cesse de t’inquiéter.
Le beau regard du Gallois se ficha dans celui de son époux, lui faisant comprendre que tout allait bien, qu’il devait cesser de le couver.
Mais Jack était inquiet : la journée avait été fatigante, même si c’était de la bonne fatigue, la fatigue que procure la joie partagé, l’amour renouvelé, le bonheur de ceux qu’on aime.
Aujourd’hui ils avaient mariés Cafdan, leur dernier né, l’enfant venu près de trente ans après ses aînés, prenant par surprise ses parents, un Ianto qui venait de passer de l’autre côté de son demi-siècle et un capitaine qui, même si physiquement il n’avait guère changé, sentait aussi peser sur ses épaules le poids de cette vie éternelle.
Et aujourd’hui Cafdan avait dix-neuf ans, il venait d’épouser le militaire qu’il fréquentait depuis plus de deux ans et qui lui avait donné ce petit Ianto qui faisait la joie de ses grands-pères.
Mais désormais le Gallois n’était plus le jeune homme fringuant et vif : trois mois plus tôt la maladie avait failli le foudroyer et Jack, éperdu, avait cru perdre son amour. Ianto lui était resté, mais plus fragile, plus mince, comme si déjà une partie de lui était ailleurs.
Jack savait que désormais ils devaient profiter de chaque instant que la vie leur accorderait.
On s'est toujours beaucoup aimés
Mais sans un jour pour vraiment s'occuper de nous
Alors il me vient une idée
Si l'on partait comme deux vieux fous
Comme deux vieux fous
- Rien que tous les deux ?
- Rien que toi et moi et notre amour….
Ils en avaient tellement rêvé de voyages ! Mais jamais ils n’avaient pu partir. Cinq enfants en quatre ans les avaient enchaînés à cette maison devenue désormais trop grande pour eux. Et puis ils n’osaient guère s’absenter, la faille étant particulièrement active à cette époque. Puis, quand ils auraient pu souffler enfin, Cafdan s’était annoncé et le cycle couches, biberons puis école avait repris, même s’il leur aurait été un peu plus facile de s’évader, leurs aînés pouvant fort bien s’occuper quelque temps de leur petit frère plus jeune que certains de leurs enfants.
Mais Ianto ne l’entendait pas de cette oreille : cet enfant c’était eux qui l’avaient mis au monde, il n’était pas question de le confier à d’autres, pas question qu’il ait l’impression d’avoir été négligé, moins aimé que les autres.
Ils ne regrettaient rien : leur vie avait été belle, heureuse malgré les pertes cruelles et les luttes féroces qui l’avaient émaillée. Mais aujourd’hui ils pouvaient pour la première fois penser rien qu’à eux, sans éprouver le moindre remords.
On habiterait à l'hôtel
On prendrait le café au lit
On choisirait un p'tit hôtel
Dans un joli coin du midi
Ce soir il me vient des idées
Ce soir il me vient des idées
Tant d’années qui s’étaient envolées sans qu’ils les voient passer ! Tant de jours, de semaines, de mois…
Et quand ils se retournaient, ils avaient l’impression que c’était hier. Leurs souvenirs gommaient les rides, les taches sur la peau, les mains parcheminées… Ils se retrouvaient comme ce premier jour dans ce parc, lorsque leurs cœurs s’étaient reconnus bien avant que leurs raisons ne cèdent à ce destin qui était écrit pour eux.
Ils n’avaient ménagé ni leur peine, ni leurs forces.
Ils pouvaient être fier de ce qu’ils avaient fait.
On a toujours bien travaillé
On a souvent eu peur de n'pas y arriver
Maintenant qu'on est tous les deux
Si l'on pensait à être heureux
A être heureux.
- On a réussi n’est-ce pas ?
Ianto sourit, regarda son compagnon, s’attendrissant de cette fragilité dans sa voix. Qui aurait jamais pu deviner que le capitaine Jack Harkness doutait tellement ? Il semblait si fort, si sûr de lui.
Etait-ce le fait de savoir qu’il survivrait à tous ceux qu’il aimait, Cafdan et son fils excepté, qui s’étaient révélés être aussi particuliers que lui, qui le rendait si vulnérable ?
Soudain Ianto avait l’impression que des deux c’était Jack qui était le plus fragile alors que, vu de l’extérieur, il était un homme dans la force de l’âge quand son compagnon était désormais un vieillard aux cheveux blancs et au dos voûté.
- On a réussi, oui. Tu n’as plus à porter le poids du monde sur tes épaules mon amour…
Tu m'as donné de beaux enfants
Tu as le droit de te reposer maintenant
Alors il me vient une idée
Comm'eux j'aimerais voyager
Hum voyager.
- Si tu m’emmenais sur Boeshane ?
Ianto se souvenait de son émerveillement lorsque Jack l’avait emmené sur sa planète pour leur lune de miel. Les paysages fantastiques, la lumière incroyable, tout l’avait ravi. Mais ils n’y étaient plus retournés depuis, malgré l’envie qu’ils en avaient, leur vie étant trop remplie pour leur permettre ce long voyage.
- Je t’y emmènerai par la pensée mon amour. Le voyage serait dangereux pour toi.
Ianto fit la moue, comme à chaque fois que Jack lui rappelait que désormais il ne pouvait plus être totalement libre de ses actes. S’il n’y avait eu que lui, il aurait continué à vivre comme avant, il ne craignait pas la mort. Mais il savait que sa disparition plongerait son compagnon dans le désespoir, alors il se raisonnait, pour lui, malgré les frustrations que cela engendrait.
- Tu sais… Il n’y a pas besoin de partir si loin pour trouver des paysages magnifiques. Et de toute façon, il me suffit que tu sois là pour me forger des souvenirs impérissables.
Mais on irait beaucoup moins loin
On n'partirait que quelques jours
Et si tu me tiens bien la main
Je te reparlerai d'amour
Ce soir il me vient des idées
Ce soir il me vient des idées
- Tu n’es pas trop déçu ?
- Déçu ? Mais de quoi ?
- De devoir t’occuper de moi, que je t’empêche de vivre la vie que tu pourrais avoir. Je suis si vieux Jack…
- Non ! Tu n’es pas vieux ! Quand je te regarde, je vois Ianto Jones, l’homme plein d’énergie et de ressources qui m’a tant de fois sauvé la vie, qui a toujours été là pour nous, qui n’a jamais baissé les bras. Je vois le père fantastique que tu as été pour nos enfants, le grand-père adoré de nos petits enfants. Je vois mon amant, mon amour…
- Ton amant…
La voix était triste, désemparée : l’amour physique était devenu tellement plus rare entre eux.
- Oui, mon amant… Le sexe n’est rien Ianto. T’avoir contre moi, partager ton lit, sentir ton odeur, te tenir dans mes bras… C’est cela qui me rend heureux. Cela, et rien d’autre.
- Tu es sûr ?
- Je n’ai jamais été aussi sûr, insista le capitaine en se penchant vers son aimé pour l’embrasser de nouveau.
Nous revivrons nos jours heureux
Et jusqu'au bout moi je ne verrai plus que toi
Le temps qui nous a rendus vieux
N'a pas changé mon coeur pour ça
Mon coeur pour ça.
Un jour, de plus en plus proche, un jour il ne serait plus là.
Mais tant qu’il le tenait dans ses bras, tant qu’il sentait son cœur battre contre le sien, tant qu’il pouvait goûter sa saveur, tant qu’il s’abandonnait à ses caresses, comme à cet instant, le futur pouvait attendre.
Seul le présent comptait. Et le présent, c’était leur amour.
FIN
Chanson de Michel Sardou