Reclassement de la fiction anniversaire de Duneline.
Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de : Léonard Freeman, Alex Kurtzman, Roberto Orci, Peter M. Lenkov. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Au creux de mon épaule
- Steve… Ce n’est pas ce que j’ai voulu dire… S’il te plaît… Ecoute-moi.
Danny était anéanti. Comment avait-il pu laisser la colère le dominer à ce point ? Comment avait-il pu jeter à la face de son amant les mots cruels et injustes ?
Certes celui-ci l’avait poussé à bout, comme trop souvent, avec sa façon de se conduire comme s’il était immortel, de se jeter au-devant du danger sans se soucier de ce qui pouvait arriver, avec la belle inconscience des enfants. Mais Steve n’était plus un enfant depuis longtemps et Danny désespérait de faire un jour entrer un grain de raison dans sa cervelle de SEAL ignorant les règles de sécurité les plus élémentaires.
Combien de fois avait-il tempêté après son compagnon revenu avec plaies et bosses d’une intervention de « routine » ? Combien de fois s’était-il emporté, la colère masquant l’inquiétude ressentie.
Mais cette fois-ci il était allé trop loin et la brusque pâleur qui avait envahi les traits de son amour, son visage décomposé soudain lui avaient fait comprendre, mais trop tard, qu’il avait dépassé les bornes.
Steve s’était reculé puis détourné, comme si le regarder lui faisait horreur ou plutôt, réalisa Danny avec le cœur brisé, pour tenter de dissimuler les larmes qui embuaient ses yeux.
Mais comment avait-il pu, se dit-il pour la énième fois en avançant vers son amant pour le prendre contre lui.
Si je t'ai blessé
Si j'ai noirci ton passé
Viens pleurer au creux de mon épaule
Viens tout contre moi
Et si je fus maladroit
Je t'en prie, chéri, pardonne-moi
A quelques centimètres de lui, il pouvait voir sa lèvre inférieure trembler, comme celle d’un enfant triste, et ses yeux s’étaient voilés de larmes. Il n’avait jamais vu Steve pleurer, il n’avait même jamais pensé que cela pourrait lui arriver.
Pourtant ce n’était qu’un homme comme les autres, avec ses forces et ses faiblesses, un homme que la vie avait déjà bien malmené et qui avait pris l’habitude d’aller au devant du danger pour masquer sa peur, de montrer l’image de l’assurance pour cacher ses hésitations et, en tout temps et tout lieu, de dissimuler ses sentiments pour qu’on ne puisse pas avoir prise sur lui.
Il aurait dû le savoir : il était celui qui le connaissait le mieux au monde ! Il savait combien de douceur et de fragilité se dissimulaient sous l’armure du super SEAL, combien de peur de souffrir s’abritait derrière les regards de défi, combien s’attacher était pour lui une gageure, lui qui avait perdu tous ceux qu’il aimait à l’adolescence, sa mère tuée, sa sœur et lui séparés, envoyés sur le continent et son père resté à Hawaii. Un tel déracinement engendre obligatoirement une impression d’abandon et d’insécurité et ce n’était certes pas l’académie militaire qui avait pris soin de son âme et de son cœur blessés. Mais c’était là-bas qu’il avait appris à porter un masque qui était devenu comme une seconde peau.
Le seul pour qui il acceptait parfois de l’enlever c’était lui, Danny. C’était pour cela qu’il pouvait lui faire autant de mal, qu’il était l’unique personne à le pouvoir…
Et qu’il venait de le faire.
Laisse ta pudeur
Du plus profond de ton cœur
Viens pleurer au creux de mon épaule
Oublie si tu peux
Nos querelles d'amoureux
Et, chéri, nous pourrons être heureux
Il avait comblé la distance qui les séparait, mais Steve se dérobait, reculait, le repoussait durement, comme on fuit l’injustice, la douleur, la méchanceté.
Avec un pincement au cœur, Danny réalisa que bien qu’à quelques centimètres de son amant, un abîme les séparait en cet instant. Un abîme qu’il avait creusé à coup de phrases vindicatives, violentes, assénant les mots comme des coups, dont chacun avait fait mouche et marqué l’âme de son compagnon plus profondément qu’un coup de poing n’aurait pu marquer sa peau.
A cet instant précis, le lieutenant Williams eut peur comme jamais : peur d’avoir franchi la limite, d’avoir saccagé tout ce qu’il avait réussi à construire depuis six mois que Steve et lui avaient officialisé leur relation après tellement d’atermoiements, d’hésitations, de craintes qui leur avaient interdit de laisser paraître quoi que ce soit.
Et si Steve le rejetait, préférant continuer son chemin seul que de le partager avec quelqu’un capable de le faire souffrir d’un regard, d’une phrase, d’un geste ?
Ô, mon amour
Ne m'enlève pas le souffle de ma vie
Ni mes joies
Pour ce qui ne fut qu'un instant de folie
Danny s’était battu pour cet amour, battu contre ses propres sentiments d’abord puis contre les préjugés militaires de Steve qui avait bien du mal à accepter d’être attiré par un homme. Il s’était battu sans relâche jusqu’à ce que son amour baisse pavillon et se laisse embarquer.
Petit à petit il avait pris conscience de l’influence qu’il avait sur son compagnon, de tout ce qu’il était seul à pouvoir se permettre envers lui : personne d’autre ne pouvait le sermonner comme il le faisait, l’amener à reconsidérer ses décisions, l’obliger à admettre ses erreurs…
Il s’était enivré de ce pouvoir jusqu’à oublier que cet abandon était avant tout une preuve d’amour, de confiance et qu’en abusant de ce qu’on lui confiait, il se montrait indigne et de cet amour et de cette confiance.
Les yeux de Steve s’étaient attachés aux siens et il y lisait tant de souffrance, tant d’interrogation qu’il en eut le cœur déchiré. Il savait qu’il s’en fallait de peu pour que son amour se détourne de lui, quitte à souffrir comme un damné, mais à souffrir seul plutôt que d’être déchiré à belles dents par celui qui aurait dû avant tout être son protecteur, lui qui avait si longtemps pris soin de lui sans personne.
- Pardonne-moi… J’étais fou. Pardonne-moi ! balbutia Danny les larmes aux yeux en comblant de nouveau la distance entre eux.
Cette fois-ci Steve ne recula pas mais le blond le sentit se raidir tandis qu’il l’enlaçait, resserrant son étreinte comme s’il avait peur qu’il ne lui échappe pour ne plus jamais revenir.
Ne dis pas adieu
Nous serions trop malheureux
Viens pleurer au creux de mon épaule
Car si tu partais
Si mon bonheur se brisait
Mon amour, c'est moi qui pleurerais
Et soudain il le sentit s’abandonner dans ses bras tandis qu’il venait nicher sa tête au creux de son épaule.
Danny monta la main et se mit à caresser doucement la nuque offerte en murmurant des mots d’amour, de contrition, de regret, des serments, des engagements…
Il aurait voulu pouvoir effacer les dernières heures, les dernières minutes, effacer cette peur panique qu’il avait ressentie et qui l’avait conduit à jeter ces phrases méchantes, blessantes… Tenant son amant contre lui, il se fit la promesse qu’il passerait le restant de sa vie à se faire pardonner, à lui faire oublier.
Ô mon amour
Ne m'enlève pas le souffle de ma vie
Ni mes joies
Pour ce qui ne fut qu'un instant de folie.
- Je t’aime…
Les mots étouffés de Steve lui parvinrent et chantèrent à son cœur comme un hymne de victoire.
- Je t’aime aussi Babe, je t’aime tant ! balbutia-t-il.
Ses lèvres tremblantes furent recouvertes par les lèvres tout aussi tremblantes de son amant et le baiser qu’il initia fit table rase de cette querelle. Certes il savait qu’il resterait des cicatrices et qu’il devrait panser jour après jour les plaies qu’il avait ouvertes. Mais tandis que leur désir mutuel s’éveillait et que leurs mains soudains s’animaient sur le corps de l’autre, il savait aussi qu’il avait la chance que l’amour de son compagnon soit assez fort pour le pardon, ce pardon qu’il lui accordait de sa bouche sur la sienne, de ses mains sur sa peau, de leurs virilités qui se rencontrèrent avec un besoin presque désespéré l’une de l’autre…
Steve était à lui, rien qu’à lui.
C’était pour cela qu’il devait prendre soin de lui et ne jamais lui faire de mal.
Et puis il ne pensa plus, tout au plaisir du moment dans les bras de celui qu’il aimait.
FIN
Chanson de Charles Aznavour
Note : les adjectifs étaient pour la plupart au féminin.