Une histoire écrite pour l'anniversaire de Yukie...
Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de : Brad Wright & Robert Cooper. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Tomber dans ses yeux
Il faudrait bien qu’un jour il arrive à le lui dire. Il faudrait bien qu’un jour enfin il ose l’affronter. Il faudrait bien qu’un jour il tente de percer les défenses que semblait s’être érigées l’homme qui hantait ses rêves depuis trop longtemps maintenant.
Je sais bien que tout nous sépare
Je sais qu'il faudrait s'enfuir
Mais je n'irai plus nulle part
Sans vouloir lui revenir
Sans vouloir nous retenir
Ce soir c’était le bon soir, celui de toutes les audaces, celui de toutes les espérances. La fête battait son plein et tous avaient un peu trop bu. L’excuse serait facile, à supposer que Rodney se rappelle ce qui s’était passé, lui aussi visiblement bien éméché.
Soir de Noël, soir de joie… Un enfant était né, il y avait de cela une éternité, mais sa naissance continuait de tisser entre les hommes quelques jours de trêve, quelques jours où tout était permis, surtout l’impossible.
Et à cet instant précis, le colonel John Sheppard se sentait prêt à toutes les folies.
Mais d'où vient le feu qui s'empare
De mon âme, ma moitié ivre
Soudain pour un simple regard
Je veux vivre au bord du vide
Je veux vivre au bord du vide
Il y avait trop longtemps maintenant qu’il taisait ses sentiments les plus profonds, les recouvrant sous le vernis policé d’une amitié bien virile, bien franche, comme il ne pouvait en exister que dans les conditions difficiles qui étaient les leurs sur Atlantis. Il y avait trop longtemps qu’il taisait les mots, qu’il retenait les gestes… Trop longtemps que, dans la moiteur des nuits, il rêvait du scientifique, des songes torrides et violents où la pudeur n’avait pas sa place.
Aujourd’hui il avait décidé de plonger, quelles que puissent en être les conséquences.
Pour tomber dans ses yeux
Tomber, m'abandonner au désir qui s'embrase
Danser, dans ses yeux danser
Je veux tanguer aux accents de l'extase
Peut-être que Rodney ne lui pardonnerait pas. Peut-être que ce qu’il s’apprêtait à faire allait irrémédiablement compromettre leur amitié. Mais il n’en pouvait plus de ce secret qui l’étouffait, il n’en pouvait plus de cette règle stupide qui empêchait les gens d’être heureux, il n’en pouvait plus de n’avoir pas le droit d’afficher son amour et de se promener librement, main dans la main, avec l’homme de sa vie.
Parce que oui, il était l’homme de sa vie… En tout cas de cette vie… Même si, dans le métier qui était le leur, cette vie pouvait être fauchée en une fraction de seconde. Mais justement pour cela il fallait en profiter plus encore, la savourer avant qu’elle ne se consume.
Avant que la vie nous sépare
Avant que la vie vacille
Je veux succomber sans égard
Et valser au bord du vide
Et valser au bord du vide
Il savait qu’il prenait un sacré risque : attaché à son statut, immensément fier de l’admiration qu’il inspirait, Rodney MacKay aurait-il le cran de se révéler aux yeux des autres, quitte à déchoir de son piédestal pour quelques imbéciles pétris de préjugés ?
Soudain John eut peur de faire la plus belle bêtise de sa vie. Certes il n’y avait autour d’eux maintenant que des amis proches, des personnes sur lesquelles il savait pouvoir compter, quoi qu’il se passe. Il pensait même que certains avaient deviné ses tourments et il lui semblait lire dans le regard de ceux-là un encouragement à franchir le pas.
Restait que jamais le principal intéressé n’avait eu le moindre geste équivoque à son égard : sur quoi reposait sa certitude que leurs sentiments étaient partagés ? Sur quelques regards, sur quelques non-dits, sur la chaleur de la main de Rodney quelques semaines plus tôt, l’intensité de sa voix tandis qu’il l’implorait de s’accrocher, de ne pas les laisser alors qu’il venait d’être grièvement blessé par le peuple hostile rencontré dans le nouveau monde exploré. Oui, c’était ce souvenir qui le poussait en avant maintenant, ce souvenir et quelque part dans sa tête, trois mots qu’il lui semblait avoir entendus durant son coma. Trois mots qu’il avait peut-être rêvés mais faisaient toute la différence à cet instant précis.
Pour tomber dans ses yeux
Tomber, m'abandonner au désir qui s'embrase
Danser, dans ses yeux danser
Je veux tanguer aux accents de l'extase
Il vit Rodney le regarder avec une interrogation au fond des yeux, ces yeux qui l’avaient irrémédiablement fasciné la première fois qu’ils s’étaient rencontrés. Il ne pouvait détacher son regard de lui tandis qu’il s’approchait encore et encore, chaloupant au rythme de la musique, un sourire sans doute d’une niaiserie abominable plaqué sur ses lèvres. Bon sang qu’il devait avoir l’air encore plus idiot que d’habitude aux yeux du génie qui occupait son cœur !
Mais après tout tant pis ! Il ne cherchait pas à mentir sur ce qu’il était ou sur ce qu’il ressentait. A cet instant précis il offrait tout ce qu’il pouvait offrir : ni plus, ni moins. C’était à prendre ou à laisser et il priait du fond du cœur pour que Rodney prenne.
Pour tomber dans ses yeux
Tomber, m'abandonner au désir qui s'embrase
Danser, dans ses yeux danser
Je veux tanguer aux accents de l'extase
Il était là maintenant, tout contre lui et l’interrogation avait fait place à l’appréhension, une sorte de panique dans les prunelles du scientifique qui regardait à droite et à gauche, un peu comme un cerf cerné par la meute. Pourtant la meute qui l’entourait était tout sauf hostile. Tous les autres participants s’étaient figés, les yeux rivés sur le couple, et déjà des sourires naissaient sur les lèvres, des sourires qui semblaient dire : « Enfin, il était plus que temps ! ».
Il prit doucement le visage qui peuplait ses nuits entre ses mains, plongea son regard dans le regard maintenant empli d’un espoir incrédule et il dit simplement, d’une voix empreinte de solennité d’où toute ivresse avait désormais disparu :
- Je t’aime Rodney MacKay.
Et sans lui laisser le temps de répliquer, il posa ses lèvres sur les siennes : qu’au moins, si le scientifique le rejetait, il ait eu le bonheur de goûter à cette bouche tentatrice !
Tomber de ses yeux
Tomber comme une larme
A la fin de l'histoire.
Sous le baiser il sentit son partenaire se raidir et il s’apprêta à encaisser le coup de poing ou la gifle qui s’abattrait sur lui dès que Rodney l’aurait repoussé avec toute l’énergie dont il était capable.
Mais soudain les bras du génie se refermèrent autour de lui tandis que les lèvres s’ouvraient pour lui laisser accès à sa bouche. Leurs langues se goûtèrent pour la première fois, d’abord timidement puis de plus en plus goulûment. Leurs corps s’imbriquèrent l’un dans l’autre, comme pour ne plus faire qu’un.
Ils n’entendirent même pas les vivats de leurs amis : ils étaient seuls au monde, dans un monde où ils pouvaient enfin s’aimer d’amour.
FIN
Chanson extraite de 1789, les Amants de la Bastille