Et je continue à reclasser!!!
Va falloir que je pense à arrêter d'offrir des songfics....
Celle-ci était destinée à dame Natasia.
Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de:
Steven S. DeKnight Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Tout va changer
- Ce sera une autre vie, un autre monde… Nous pourrons vivre ensemble, heureux et libres !
Allongé sur le lit de fortune où son amant l’avait guidé, Agron se laissait bercer par cette voix tant aimée.
Comme Nasir, il voulait croire que l’avenir leur appartenait et qu’ils survivraient à cette guerre malgré la disproportion des forces en présence. Il voulait croire que les dieux leur donneraient la victoire parce que leur cause était juste et qu’ils avaient déjà payé un tribut bien élevé à cet espoir qui les avait amenés un jour à se soulever derrière Spartacus.
Il voulait croire que tout était encore possible.
Tout va changer ce soir
On prend un nouveau départ
La neige a blanchi le monde
Les enfants sont pleins d´espoir.
Nasir parlait : il parlait pour détourner l’homme qu’il aimait des souvenirs affreux incrustés dans son esprit comme les clous s’étaient incrustés dans la chair de ses mains. Il parlait pour lui faire oublier les cris des siens tombant sous les coups de leurs ennemis. Il parlait pour l’empêcher de penser à tous ceux qui ne reviendraient plus alors que lui était là, épargné par la destinée sans bien comprendre pourquoi elle lui avait fait cette faveur. Mais était-ce réellement une faveur que de vivre avec ce poids au cœur et cette souffrance au corps ?
Pourtant il voulait croire que tout cela n’avait pas été vain et qu’à la veille de l’ultime bataille il pouvait rêver d’un monde meilleur, un monde où leurs enfants ne mourraient pas de faim, où leurs femmes ne seraient pas souillées par des mâles en rut, où leurs frères pourraient vivre leur vie, où nul ne pourrait asservir un autre être de chair et de sang.
Tout va changer demain
Tu n´as qu´à ouvrir les mains
Pour que de là-haut te tombent
En rafales une pluie de cadeaux
Sous un torrent d´étoiles
Demain il fera beau
Demain…
Y aurait-il un demain pour eux ? Seraient-ils encore là le soir suivant pour poursuivre l’épopée gravée en lettres de sang ? Serrerait-il encore contre son cœur son amant, celui qu’il avait quitté pour cette quête impossible, sans se soucier de ses larmes, voulant le préserver de cette fin qu’il pressentait ?
- Rappelle-toi ce que j’étais : Tibérius, l’esclave préféré de son maître, celui qui le comblait de sa queue en ayant l’impression que cela le rendait spécial au point de n’avoir même jamais envisagé de secouer mes chaînes. Et puis vous êtes arrivés et vous avez fait basculer ma vie.
- Tu aurais peut-être été plus heureux en restant Tibérius.
- Arrête ! Ne renie pas tout ce que nous avons vécu ! Je suis heureux d’être redevenu Nasir ! Heureux que tu m’aies remarqué parmi les autres ! Je suis heureux d’être près de toi, de veiller sur toi ! Sans toi je ne suis rien. A nous deux, nous pouvons tout et même les dieux ne nous séparerons pas ! C’est ici et maintenant que nous pouvons changer notre destin !
Tout va changer ce soir
Selon notre bon vouloir
Les rues seront des théâtres
On jouera sur les trottoirs.
Agron l’écoutait et il se sentait revivre à entendre ces mots qui le revigoraient plus que ne l’avaient fait l’eau qu’on avait versée entre ses lèvres desséchées lorsque les Romains l’avaient descendu de sa croix.
Il n’avait pas compris alors qu’une fois de plus la roue venait de tourner : il avait été un guerrier, puis un gladiateur, il était devenu l’un des généraux de Spartacus puis un allié de Crixus avant d’être un prisonnier parmi d’autres, un vaincu voué aux coups et à la croix. Et soudain il devenait une monnaie : sa vie parmi d’autres en échange d’un seul !
Tant de vies en une existence, tant de bouleversements auxquels il avait survécu.
Alors oui, il voulait croire qu’ils étaient capable de changer le cours du temps et qu’un jour ils récolteraient les fruits qu’ils avaient semés.
Tout va changer demain
D´hier il ne reste rien
Demain c´est le grand spectacle
Qu´on allume des millions de chandelles
Qu´on change de costumes
Ce soir la vie est belle.
- C’est la dernière bataille, tu le sais et je le sais…
- C’est la dernière bataille mon amour, et nous nous battrons côte à côte parce que ma place est à jamais à tes côtés.
- Mais si je tombe…
- Alors je tomberai avec toi : je ne te laisserai plus t’éloigner de moi, fut-ce pour gagner les rivages de l’au-delà. Tu es à moi comme je suis à toi et nos destins sont liés.
Agron regardait ses mains mutilées, ces mains qui auraient dû faire de lui un inutile, l’un de ceux qu’on laisse à l’arrière ou qu’on envoie à l’écart en espérant qu’il survivra. Mais Nasir avait trouvé le moyen de lui rendre son rang de guerrier et grâce à lui, il tiendrait sa place dans le grand combat final.
Alors ce soir, il voulait simplement aimer son homme comme il ne l’avait jamais aimé, lui appartenir pour s’assurer qu’il serait toujours là, en lui, pour lui, contre lui. Ce soir-là c’était leur premier soir, c’était leur dernier soir, c’était la fin d’une épopée.
Tout va changer ce soir
On prend un nouveau départ
La neige a blanchi le monde
Les enfants sont pleins d´espoir.
Tant étaient tombés à leurs côtés, tant de noms chantaient dans leurs têtes, tant de visages hantaient leurs cœurs tandis qu’ils marchaient vers ce qui serait leur dernière bataille. Que les dieux soient pour ou contre eux, ils savaient que tout allait s’arrêter là, sur cette montagne.
Plus jamais ils ne seraient esclaves, plus jamais ils ne se battraient pour le plaisir d’autres hommes, plus jamais ils ne souffriraient les coups, l’humiliation… Plus jamais on ne les menacerait de les accrocher à une croix…
Il en tomberait d’autres, ils le savaient mais rien ne les ferait reculer : ceux qui survivraient porteraient leur souvenir et honoreraient leurs mémoires. Et si un seul survivait pour connaître la liberté, alors les épreuves n’auraient pas été vaines. Si un seul voyait son horizon s’éclairer alors leur cause aurait triomphé.
Tout a changé déjà
Pendant qu´on chantait tout ça
Demain est venu en douce
Et la course ne s´arrêtera pas
Pas plus que la grande Ourse
Pas plus que toi et moi.
Ils partaient au combat, l’espoir au cœur, forts de leur amour, sûrs de mener une lutte juste. Ils suivraient le Faiseur de Pluie jusqu’à la mort parce qu’ils croyaient en lui comme ils croyaient en leur cause.
Ils n’avaient pas peur parce que quoi que leur réserve le destin, ils savaient qu’ils l’affronteraient ensemble.
Nasir avait sanglé l’épée de son amour à son poignet et saisit sa propre arme, bien décidé à rester à ses côtés dans la vie comme dans la mort. Un dernier baiser les unit et ils se tournèrent vers Spartacus : le dernier salut des gladiateurs à celui qui leur avait fait comprendre qu’il y avait une autre vie pour eux.
Vainqueurs ils seraient libres, vaincus ils seraient mort et libres aussi…
Leur monde ne serait jamais le même.
FIN
Chanson de Michel Fugain