Petite songfic offerte à Mapi l'an passé.
Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de : Michael Brandt et Derek Haas. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Je voudrais tant que tu sois là
Kelly tournait en rond dans son appartement : fichue épaule qui l’empêchait d’aller travailler, de se joindre à son équipe, de braver avec eux le danger : sauver des vies, se sentir utile !
Là, seul depuis que Renée était partie pour l’Espagne, blessée qu’il ne la suive pas, il se sentait vide, bon à rien, sans ressort, sans but…
Toute sa vie il avait été actif, il n’avait jamais écouté son corps et aujourd’hui son corps le trahissait, l’obligeait à l’entendre, le forçait à ce repos qu’il haïssait.
Aujourd’hui Kelly Sereride était seul.
Je voudrais tant que tu sois là
Pour te dire ma solitude
Pour te dire ma lassitude
De te savoir si loin de moi.
Ils étaient si longs les jours ! Bien sûr il sortait s’aérer, il allait faire sa thérapie, il passait même voir les copains. Mais il avait l’impression d’être devenu un étranger là-bas. Ils avaient beau l’accueillir avec de grands cris de joie, des sourires chaleureux, lui demandant quand il reviendrait prendre la tête du Secours 3, il avait l’impression que rien n’était plus pareil. Notamment lorsque les retrouvailles étaient interrompues par l’alarme et qu’il devait rester sur place tandis que ses équipiers partaient vers une intervention dont ils ne reviendraient peut-être pas. Il n’était plus des leurs et il n’était pas sûr un jour de retrouver sa place parmi eux.
Pourtant, s’il regardait au fond de son cœur, il devait s’avouer que la principale cause de son mal être ne résidait pas là.
Je voudrais tant que tu sois là
Pour te dire mon espérance
Et le prix que je paie d'avance
De t'avoir un jour tout* à moi
Le fait d’être éloigné de la caserne lui avait soudain fait prendre crument conscience que ce qui lui pesait le plus c’était de ne plus voir Casey chaque jour.
Il en aurait presque ri si ça n’avait été aussi pathétique à ses yeux ! Quoi ! Lui, l’homme à femme, le macho, le dominant, l’alpha dans toute sa splendeur, il se languissait d’un homme comme il ne s’était jamais langui d’aucune femme ? Son cœur battait pour un collègue et quel collègue ! Celui avec lequel il s’était battu, celui qui, de tous, était le moins susceptible de succomber à son charme.
Bien sûr, depuis qu’il était arrêté, Casey était passé le voir chez lui, de façon plutôt régulière d’ailleurs. Mais cela ne lui suffisait pas. Cela ne lui suffisait plus.
Dans mon désert y a pas de fleurs
Pas d'oasis et pas de vent
Et si tu venais plus souvent
Ça ferait du bien à mon cœur
Mon pauvre cœur.
Kelly avait dû se rendre à l’évidence : il aimait cet homme. Peut-être fallait-il d’ailleurs trouver là la raison de leur hostilité réciproque, de leurs affrontements récurrents. Inconsciemment il se battait contre Matt pour ne pas fondre sur ses lèvres et succomber à son charme !
A ce moment de son introspection, il s’était traité d’imbécile, se moquant de lui-même. Voilà qu’il se la jouait psychanalyste, lui qui avait toujours décrété que tout ce qui commençait par psy était une vaste fumisterie juste faite pour les faibles incapables d’accepter leur vie telle qu’elle était et de se battre pour la rendre meilleure.
Que faisait-il d’autre, lui qui gémissait sur son sort plutôt que d’affronter ses sentiments ?
Je voudrais tant que tu sois là
Pour réveiller mes fleurs éteintes
Ton absence comme une plainte
Vient toujours me parler de toi.
La solitude lui avait permis de faire le tri et d’accepter ce qu’il n’avait jamais voulu voir depuis tant de temps : il était amoureux, irrémédiablement et totalement amoureux, lui qui avait toujours évité de tomber dans ce piège qui, à ses yeux, était dangereux. Une femme à laquelle il aurait été profondément attaché aurait pu, à force de cajolerie et de plaintes, l’arracher à l’univers qui était le sien en faisant valoir combien elle avait peur pour lui.
L’avantage avec Casey, c’était que, pompier lui-même, il ne risquait guère de vouloir le mettre à l’écart…
De nouveau il se gifla mentalement : où il allait là ? Casey, si jamais il apprenait les sentiments qu’il lui portait, risquait plutôt de lui en coller une que de se montrer flatté !
Je voudrais tant que tu sois là
A l'heure où les nuages passent
Tu élargirais mon espace
Rien qu'à te blottir contre moi.
Pourtant… Pourtant il y avait eu ces fois où leurs regards se croisaient, où leurs mains se touchaient….
Il y avait eu ce soir-là, dans le bar, lorsqu’il lui avait annoncé qu’il partait pour l’Espagne avec Renée : il avait eu l’impression de voir un réel chagrin dans les yeux bleus fixés sur lui. Il avait eu vaguement l’impression que Casey voulait lui dire autre chose que le « Bon… alors tchin… à ta nouvelle vie » qui avait franchi ses lèvres lorsqu’il avait compris que sa décision était irrévocable. Il avait lu d’autres mots dans son regard… Ou il avait cru les lire… à retardement, lorsque, dans la solitude de son appartement puisque Shay était au boulot elle, la veinarde ! il avait passé et repassé leur conversation dans sa tête, depuis le moment où Matt lui avait proposé de faire sa rééducation, à sa manière bien sûr, en se moquant gentiment.
Depuis qu’il avait finalement décidé de rester avec cet espoir que sa guérison serait plus rapide, il n’avait pas revu le blond bien souvent, comme si, les choses étant finalement réglées, celui-ci retournait à sa vie.
Sa vie sans lui…
Dans mon désert y a pas de fleurs
Pas d'oasis et pas de vent
Et si tu venais plus souvent
Tu comprendrais pourquoi j'ai peur
Parce que j'ai peur.
D’un geste distrait, Kelly arrangea le bouquet qu’il avait reçu des copains : des roses jaunes pour lui rappeler qu’ils pensaient à lui et qu’il leur manquait. Il aurait tellement aimé des roses d’une autre couleur et venant d’un seul d’entre eux !
« Arrête de rêver ! » se morigéna-t-il.
Casey ne serait jamais à lui ! Il ne pourrait jamais lui avouer ce qu’il ressentait. Toutes les déclarations qu’il osait dans sa tête dans la solitude de ses journées, il savait bien que jamais il ne les tenterait dans la réalité. Comment oser certains mots lorsque celui qui est en face de vous ne vous a jamais donné l’impression de ressentir pour vous autre chose que de l’amitié, et encore, les bons jours…
Cette rivalité qu’ils avaient cultivée, qui les avait si souvent dressés l’un contre l’autre, si elle leur avait permis de progresser dans leur profession, elle les avait vraisemblablement irrémédiablement séparés : chacun sa vie, chacun sa voie, chacun son lit…
Je voudrais tant que tu sois là
Pour mettre du rouge à mes roses
Et pour que serve à quelque chose
Ces mots que je pleure à mi-voix.
Ils s’étaient épaulés mutuellement dans l’adversité : il savait qu’il pouvait compter sur Matt comme Matt pouvait compter sur lui.
Ils s’étaient affrontés durement, notamment au sujet de Darren puis de Heather… Maintenant Kelly comprenait que ce qu’il avait ressenti ce matin-là n’était pas dû au fait que Matt ait pu coucher avec la veuve de leur ami commun, mais simplement à la jalousie violente qui lui avait mordu le cœur à cet instant là. Il avait passé sa colère sur Casey mais c’était à Heather qu’il en voulait, Heather qui lui avait volé l’homme qu’il ne s’était pas encore avoué aimer.
Ce jour-là, il n’avait pas compris, pas plus que celui où il était allé récupérer le chef du ladder dans le brasier et qu’il avait ressenti un soulagement immense lorsqu’il s’était avéré qu’il n’y avait rien de grave.
Tant d’indices qu’il n’avait pas voulu voir… Tant de petits riens qui auraient dû lui faire comprendre plus tôt avant qu’il ne soit trop tard. Mais sans doute était-il trop tard avant même que ses yeux ne se portent sur le corps désirable du blond, parce que celui-ci ne marcherait jamais sur le même chemin que lui…
Il pouvait rêver… mais ça ne resterait jamais qu’un rêve, un rêve douloureux et secret qu’il chérirait au fond de lui.
Je voudrais tant que tu sois là
Pour partager la chambre close
Où mon avenir se repose
En attendant que tu sois là.
Quelle ironie ! Lui ! L’homme à femmes ! Le beau gosse qui faisait tomber les filles comme des mouches (oui, ce n’était pas très modeste, mais il avait entendu les copains parler de lui en ces termes), le Casanova de service, celui qui s’était attiré les foudres du chef en s’envoyant en l’air avec sa fille dans la réserve, le coq de basse-cour dans toute sa splendeur… il aimait comme jamais il n’avait aimé. Pour la première fois de sa vie il était prêt à s’engager, prêt à respecter l’autre, ses désirs, ses fêlures, ses sentiments… Et tout ça pour qui ? Pour un homme ! Qui plus est un homme qui ne répondrait jamais à son amour.
D’ailleurs ce n’était peut-être pas plus mal : dans leur monde, l’homosexualité n’était pas vraiment bien acceptée. Oh bien sûr, la plupart des collègues disaient que cela ne les embêtait pas… chez les autres… Comment réagiraient-ils si les deux chefs les plus respectés de la caserne affichaient soudain leur liaison ? C’était un truc à voir l’un des deux muté en Alaska ou au fin fond d’un état merdique du meedle-ouest !
De nouveau il s’envoya une claque mentale : voilà qu’il imaginait la réaction de leurs coéquipiers à une liaison qui n’avait aucune chance d’être !
Et dans cet univers borné
Où tout est vide et décevant
Je pourrais me sentir vivant
Près de toi pour qui je suis né
Toi qui ne m'aime pas assez
Le timbre de la sonnette d’entrée le fit sursauter et l’arracha à ses songes. Il alla ouvrir la porte et resta figé sur le seuil : Casey se tenait là, arborant un grand sourire, comme s’il avait été incarné par la force des pensées qu’il remuait dans sa tête depuis des heures.
- Salut… Je peux entrer ?
- Salut… Bien sûr… Tu n’es pas au boulot ?
- Non… Je suis en repos aujourd’hui. Alors je me suis dit que j’allais venir te rendre visite. Je ne te dérange pas au moins ?
- Non pas du tout. Entre ! Installe-toi !
- J’ai apporté de la bière : tu peux en boire ?
- Une, pas plus… Je dois éviter…
- OK… Tu garderas les autres pour plus tard.
- Pas de problèmes… Tu veux autre chose ? Un café ? Un biscuit ?
Les mots… les mots qui ne voulaient rien dire… Les mots pour cacher la confusion, le cœur qui battait la chamade… Les mots pour s’empêcher de se ruer sur lui, de saisir ses lèvres, de laisser ses mains prendre le contrôle et s’emparer de ce corps !
- Non… Ta rééduc, ça se passe bien ?
- Oui… Je devrais revenir très vite.
- Tant mieux… Tu nous manques…
Leurs bouches disaient des choses, leurs yeux en avouaient d’autres… Soudain… Sans qu’ils sachent comment ni pourquoi, ils étaient l’un contre l’autre, leurs regards ancrés l’un à l’autre, leurs corps enlacés…
Et quand leurs lèvres s’unirent, Kelly Severide comprit qu’il ne serait plus jamais seul.
FIN
Chanson de Serge Lama
*Paroles originales : tout