Réponse au défi : lettre de Saint-Valentin. A la base je voulais partir sur un délire… Mais je suis en train de me faire un marathon Drop Dead Diva et j’adore ces personnages ! Du coup, le délire a un peu tourné au tragique !
Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de:
Josh Berman. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Lettre de Saint Valentin
Mon amour, mon aimée, ma Deb adorée,
Qui aurait dit qu’un jour je t’écrirais ces mots ? Tu n’aimes pas beaucoup lire, à part ces magazines de mode et de ragots dont tu raffoles.
Tu vois, je parle toujours de toi au présent, parce que pour moi tu es là, plus présente que jamais.
Je sais, on me dit que tu aurais voulu que je tourne la page, que je vive ma vie. Mais qu’en savent-ils tous ceux qui me donnent ces conseils ? Les mêmes qui m’ont dit que tu n’étais pas faite pour moi, que tu n’étais qu’une écervelée qui me briserait le cœur.
Sur ce point, ils n’ont pas eu tort : tu m’as bien brisé le cœur, mais tu n’y étais pour rien. Je maudis ce jour où je t’ai embrassée pour la dernière fois, je maudis les camions, les autres automobilistes, les téléphones portables ! Pourquoi a-t-il fallu que tu téléphones en conduisant ? Pourquoi ne pouvais-tu pas être un peu plus raisonnable, un peu plus responsable ?
Pardon ! Pardon mon amour… Ces mots t’auraient fait de la peine. Je t’aimais… Je t’aime comme tu es : ma beauté, mon cœur, ma douce… Moi seul savait combien de fragilité se cachait sous ton apparente force, combien de douceur se dissimulait dans ta feinte pugnacité… Moi seul savait tes doutes, tes craintes, tes espoirs… Tu étais ma reine, ma source de vie et d’inspiration. Pour toi j’aurais gravi toutes les montagnes, affronté tous les dangers…
Sans toi je me sens vide.
Et en ce jour de fête, je me sens plus vide encore.
Tu te souviens de notre dernière Saint-Valentin ? Je revois encore tes yeux briller, j’entends ton rire résonner et surtout tintent à mon oreille les mots d’amour que tu m’as susurré ce soir-là. Je ne savais pas, nous ne savions pas que le rendez-vous que tu m’as alors fixé, nous ne le connaîtrions pas. Il n’y aura plus de Saint-Valentin pour nous deux et là où tu es, je suis sûr que tu trouves ça triste. A moins que tu n’aies trouvé là-haut ce cher Valentin et qu’avec ta franchise habituelle tu ne lui aies dit ce que tu penses de ce sort qui t’a rappelé si tôt.
Ce n’est pas juste ! Je suis avocat et contre cette injustice là je ne peux rien. Qui attaquer ? A qui s’en prendre ? Le chauffeur du camion n’y est pour rien : tout indique que tu étais la seule responsable de cet accident. C’est tout toi ça : incapable d’imaginer qu’une action en apparence anodine peut entraîner un tel désastre.
Non… non… je ne suis pas en train de te faire de reproche… enfin… si… peut-être un peu. Je t’avais dit déjà de ne pas téléphoner au volant… mais… C’est toi… C’était toi… Trop vivante pour imaginer que le pire puisse arriver.
Le pire… Il est pour moi, pour ton père, pour ta mère… pour nous qui devons continuer sans toi, sans ta joie de vivre, sans ta fraîcheur, sans ta spontanéité, sans ta beauté qui illuminait toute ma vie. Tu sais que je ne peux plus manger de pamplemousse ? Je crois que ça te ferait rire ce dommage collatéral. Oui… Je sais que ça te ferait rire.
Mais rassure-toi… Je ne t’écris pas pour te dépeindre ma pauvre vie misérable sans toi. Non… J’ai cru un moment que je ne pourrais jamais me remettre, que tout était fini pour moi et pourtant j’ai continué. Tu te souviens que je venais de passer un entretien d’embauche ? Et bien j’ai été pris chez Harrison & Parker, un grand cabinet. Je travaille beaucoup, j’ai des dossiers passionnants. Je vois parfois ta mère, je l’ai même aidée à quelques reprises dans des affaires judiciaires… Non… ne t’inquiète pas… Rien de bien grave… Et de toute façon, nous avons gagné, c’est tout ce qui compte n’est-ce pas ? En tout cas, c’est ce que tu disais.
Et puis il y a Stacy… Nous nous voyons très régulièrement. Elle commence à faire carrière… Tu serais fière d’elle tu sais. Ou alors jalouse… qui sait ? Tu voulais tellement réussir ! Votre amitié aurait-elle résisté à la réussite de l’une si l’autre était restée au point de départ ? Je voudrais croire que oui…
J’ai rencontré d’autres femmes… Tu dois le savoir et les avoir jugées de là-haut. Kim est venue trop tôt… Elle n’était pas toi, tout simplement. Je ne pense pas qu’elle t’aurait plu. Vanessa aurait peut-être trouvé grâce à tes yeux… Avec elle j’aurais pu bâtir quelque chose… Je crois… Mais elle m’a laissé comme un crétin au pied de l’autel. Qu’en as-tu pensé ma douce ? Je sais que tu rêvais que je te passe la bague au doigt, j’avais bien l’intention de le faire… et le destin m’a privé de ce rêve… Peut-être que c’est tout simplement mon karma : d’abord toi, puis Vanessa…
Ou peut-être qu’elle avait raison, que je n’étais pas aussi prêt que je le croyais, que tôt ou tard notre couple se serait déchiré… mais je ne le saurais jamais. Pas plus que je ne saurais ce qu’il serait advenu de toi et de moi au bout de cinq, dix ans, ou plus. J’aime à croire que nous aurions vieilli ensemble en élevant nos deux ou trois enfants mais… aurais-tu même accepté d’avoir des enfants, toi qui avait la hantise de la moindre ride et traquait le plus petit bourrelet, fut-il imaginaire ?
Tu sais, en t’écrivant, je m’aperçois que mon amour ne t’aurait peut-être pas suffi. Tu n’étais pas de celles qu’on met en cage, qu’on enferme dans « les liens du mariage ». D’ailleurs, tu détestais cette expression, tu disais toujours qu’elle te faisait penser qu’on servait la femme ligotée comme un rôti à son mari qui pouvait alors la déguster à son aise sans qu’elle ait son mot à dire. Ca m’a toujours fait rire et je n’ai jamais cherché ce que cela impliquerait dans notre vie si nous décidions de nous marier. Tu m’aurais dit oui, ça j’en suis sûr, mais à tes conditions… auraient-elles été les miennes ?
Et là je t’entends rire : « Un avocat raisonnera toujours comme un avocat ! » Tu as peut-être raison : je suis toujours en train de supputer la réaction de la « partie adverse »… Pour toi la vie était bien plus simple : tu la prenais comme elle venait, le bon comme le mauvais, et tu « faisais avec ». C’est pour cela je crois que nous nous entendions si bien, c’est pour cela que tu m’étais tellement nécessaire. Sans toi j’ai perdu ce petit grain de folie qui était si rafraîchissant, qui me faisait tant de bien. Je suis devenu un avocat sérieux, trop sérieux diraient certains, rabat-joie diraient sans doute d’autres…
Tu me manques. Je pensais que plus le temps passerait, moins ce serait le cas, mais je me trompais. Je pense à toi à chaque moment, à chaque événement qui t’aurait fait réagir, à chaque nouvelle rencontre que je fais… Je me demande toujours : « Qu’aurait pensé Deb ? Deb l’aurait-elle aimé(e) ? Que ferait Deb ?... »
Tu n’étais pas seulement ma compagne, tu étais aussi ma meilleure amie, celle à qui je pouvais tout dire, avec qui je pouvais tout partager.
J’ai une nouvelle amie désormais : elle s’appelle Jane. Je crois que tu l’aimerais bien. Oh bien sûr, tu serais horrifiée par son apparence ! Disons qu’elle a quelques kilos en trop et ne s’habille pas du tout comme toi. Pourtant il y a chez elle parfois un petit grain de folie qui me fait penser à toi. Et puis, elle est quasi incollable sur les séries TV, les vedettes, les people en général et c’est une passionnée de mode ! Et… ça va te faire rire… c’est la meilleure amie et la colocataire de Stacy. Tu imagines ça ? Stacy vivant avec une grande avocate ! Parce que c’est une grande avocate : intelligente, intuitive, capable de déceler la faille, de contourner le système en toute légalité… Je l’admire…
Non ! Ne sois pas jalouse. Je peux bien te dire que j’admire une autre femme que toi. Toi… tu es… tu étais exceptionnelle… ce qu’il y avait entre nous…
Un avocat devrait pourtant savoir trouver les mots non ? Mais je crois que notre amour était au-delà des mots. Et Jane m’écoute lorsque je parle de toi. Parce que je lui parle de toi et elle sait toujours m’écouter et être de bon conseil. J’ai parfois l’impression qu’elle te connaissait aussi bien, voire mieux que Stacy ou que moi… Qui sait ? Peut-être y avait-il entre vous un lien mystérieux ? Peut-être la providence l’a-t-elle mise sur ma route pour atténuer un peu mon chagrin ?
Ca va te faire rire sans doute, mais si je devais un jour refaire ma vie, je me demande si Jane ne serait pas la personne avec laquelle je pourrais construire quelque chose. Bien sûr ça ne pourrait pas être la même chose qu’avec toi mais… au-delà de vos physiques on ne peut plus dissemblables, il y a tellement de ressemblances entre vous.
Ma Deb… Ou que tu sois… quoi que tu fasses… En ce jour des amoureux, je voulais juste te dire que je ne t’oublie pas, que je ne t’oublierai jamais. Tu seras toujours en moi, toujours un doux souvenir que je chérirai jusqu’à ma mort. Mais si tu m’as aimé comme je pense que tu m’as aimé, comme je t’ai moi-même aimée, je pense que tu voudrais que je sois heureux.
Avec Jane, peut-être que j’aurais cette chance…
Alors ne m’en veux pas si, à la prochaine Saint-Valentin, ce n’est pas à toi que j’écris… si, peut-être, je ne t’écris plus jamais. Lorsque j’ai commencé à écrire, je ne savais pas vraiment pourquoi, quelle était cette idée saugrenue de t’adresser un courrier que tu ne lirais jamais. Maintenant je crois que je comprends : c’est en écrivant que mes idées s’éclaircissent, que je vois mieux le fil de mon raisonnement. Je veux croire que c’est toi, ma Deb, qui m’a soufflé cette idée, pour me montrer le chemin à suivre.
Tu es mon passé, un passé qui m’a construit, qui m’a fait ce que je suis, qui m’a donné la force aujourd’hui de me tourner vers l’avenir.
Et je crois que cet avenir, c’est Jane.
Je te quitte ma Deb…
Je t’aimerai toujours
Greyson
Le jeune homme posa son stylo, plia sa lettre et la glissa dans une enveloppe qu’il referma. Il jeta un coup d’œil à l’horloge : dix-huit heures trente. Il avait encore le temps de prendre son téléphone et d’inviter Jane à venir le rejoindre.
FIN