Bien que je ne sois pas fan de ce couple en tant que couple, adorant leur relation fraternelle, voici une petite histoire écrite pour Cass Shelly qui, elle, aime les imaginer ensemble...
Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de : Cheryl Heuton & Nicolas Falacci. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Que l’amour
- Arrête de te torturer, arrête de penser que tout cela n’aurait pas dû arriver, que nous n’aurions pas dû…
- Mais nous n’aurions pas dû ! Nous n’avons pas le droit Charlie ! Tu le sais et je le sais !
- Pas le droit ? Et pourquoi ?
- Ne fais pas l’imbécile ! Tu sais parfaitement pourquoi !
Charlie regarda son frère avec tristesse : comment parvenir à lui faire comprendre que ce qui les unissait n’était pas sale, et qu’il n’avait pas à en avoir honte ? Qui pouvait prédire où l’amour frapperait et qui avait le droit de le condamner lorsque cela arrivait ?
Y a que l'amour qui vaille
La lumière du vitrail
La passion, les blessures
Les prénoms sur un mur
Y a que l'amour qui ose
Nous faire jeter des roses
Avant Dieu, avant tout
Y a que l'amour, c'est tout
l n’avait pas cherché à aimer son frère d’un amour autre que celui que la société leur octroyait, cet amour fait de jeux et de rires, de colères et de luttes, de protection et de rejet, de confidences et de cachotteries, de rivalité et de concessions, d’indulgence et de sévérité… Cet amour si particulier que partagent deux enfants nés sous le même toit de mêmes parents et qui vont tour à tour s’aimer et se détester, se jeter l’un sur l’autre et se défendre mutuellement, se chercher et se rejeter…
Mais un jour il s’était aperçu que ce qui le poussait vers son frère était bien plus intense que cela, bien plus violent, bien plus douloureux aussi. Il s’était aperçu que rien au monde n’était si important que ce sentiment qui le consumait jour après jour et nuit après nuit.
Que tes yeux dans mes yeux
Que ta main dans ma main
Que nos gestes amoureux
Aujourd'hui comme demain
Bien sûr il avait tenté de lutter, de toutes ses forces, avec toute la conviction de ses vingt ans, tout le poids d’une société qui acceptait à peine l’homosexualité et n’allait donc pas de si tôt tolérer que deux frères puissent s’aimer comme s’aiment deux amants.
Pourtant petit à petit il avait commencé à se demander où était le mal : il était adulte, Don aussi. Ils étaient tous les deux responsables, matures, menant leur vie du mieux qu’ils le pouvaient, se dévouant aux autres. Ils se montraient bons fils, bons amis, bons collègues…
Pourquoi n’auraient-ils pas eu le droit de vivre l’amour qui les rendrait heureux, cet amour qui, pour tout autre, aurait été une chose merveilleuse, non seulement acceptée, mais encouragée par leur entourage ?
Y a que l'amour qui dise
Du grandiose, des bêtises
Des mots doux, du Mozart
Des choses belles ou bizarres
Petit à petit Charles Edouard Eppes avait commencé à évoluer, à admettre que le sentiment qui le poussait vers son aîné n’avait rien de sale, rien de répréhensible et que si on le condamnait c’était avant tout pour des raisons génétiques qui prenaient leur source dans l’indispensable survie de la lignée. Comme beaucoup de règles édictées par les religions, celle-ci parait des couleurs de la morale ce qui n’était à la base que le besoin de faire perdurer l’espèce.
Il était un scientifique, il savait quantifier les choses et il était capable de les étudier sans passion, avec détachement. Il avait fini par conclure que nul n’avait le droit de s’opposer à ce qu’il ressentait.
L’amour n’était pas quantifiable, il ne s’enfermait pas dans des règles étroites, il ne se soumettait pas aux diktats d’une société frileuse, il ne s’exprimait pas en équations simples.
Il était, simplement.
Y a que l'amour qui danse
Quand les soldats s'avancent
Sur la terre finalement
Y a que l'amour vraiment
Et lorsqu’enfin il était arrivé à la conclusion que personne n’avait à se dresser entre lui et son amour, Charles Edouard Eppes avait entrepris la conquête de ce frère si lointain et trop proche, si fort et trop fragile.
Contre cet amour-là, cette volonté-là, l’agent du FBI n’avait aucune chance. Mais voulait-il vraiment en avoir, lui qui se sentait si bien lorsqu’ils étaient ainsi, l’un contre l’autre, comme oubliés de la société qui n’aurait pas compris, comme suspendus hors du temps et des règles humaines ?
Que nos coeurs contre coeurs
Que nos joues contre joues
Que l'infinie douceur
Planant autour de nous
Que l'amour
Il avait succombé aux yeux sombres, aux mains chaudes, à la peau enfiévrée, au corps souple, au sourire ravageur…
Il avait succombé à cet amour qui le réchauffait, le faisait exister, vibrer, trembler de bonheur et de désir, de peur et de bien-être…
Il avait succombé et, lorsqu’il tenait son cadet dans ses bras, lorsqu’ils s’aimaient, il n’y avait plus rien d’autre qui comptait.
Que tes yeux dans mes yeux
Que ta main dans ma main
Que nos gestes amoureux
Aujourd'hui comme demain
Pourtant, à chaque fois qu’il redescendait de leur septième ciel, la société reprenait ses droits et avec elle la kyrielle de questions, de remords que Charlie s’efforçait de saper, jour après jour, nuit après nuit, avec l’acharnement qu’il pouvait mettre lorsqu’il savait qu’il avait raison.
Petit à petit Don finissait par oublier, à chaque fois un peu plus longtemps et par s’abandonner plus franchement, plus facilement.
Petit à petit il finissait par accepter l’inacceptable, s’avouer l’inavouable et partager ces moments volés en s’interdisant de penser aux autres, en se concentrant uniquement sur eux, sur leur amour, sur ce bonheur qui n’était jamais aussi parfait que lorsqu’ils étaient ensemble.
Que nos coeurs contre coeurs
Que nos joues contre joues
Que l'infinie douceur
Planant autour de nous
- Nous sommes fous ! murmura-t-il dans le cou de son amant.
- Alors soyons-le jusqu’au bout ! rétorqua celui-ci. Arrête de te torturer, de nous torturer ! Je t’aime et tu m’aimes… Personne n’a le droit de nous dire que c’est mal, que c’est sale ! Personne n’a le droit de chercher à nous séparer. On n’a pas choisi, c’est juste arrivé.
- Mais…
- Il n’y a pas de mais ! Il n’y en aura plus ! Je n’en veux plus ! Tu connais cette théorie de l’âme qu’on déchire en deux pour que deux êtres en reçoivent la moitié et qu’ils la reconstituent un jour en se rencontrant ?
- Oui… J’en ai entendu parler. Et je la trouve triste parce qu’il y a trop d’âmes qui ne retrouvent jamais leur moitié.
- Justement ! Nous avons trouvé la nôtre ! Par accident les deux moitiés d’âmes ont abouti sous le même toit, à moins que ça n’ait été la volonté de la Destinée, dès le départ que de nous réunir des mêmes parents. Qui sait ?
- Qui saura jamais ?
- Justement : qui saura jamais ? Mais nous sommes les deux moitiés de cette âme et il était écrit depuis la nuit des temps qu’elle se reconstituerait un jour, alors n’insultons pas la volonté des astres et vivons ce bonheur que tant d’autres ne connaîtrons pas : vivons le pour eux, et pour nous.
Don plongea ses prunelles dans celles de son frère qui scintillaient de mille feux brûlant de passion. Il plongea dans ce regard et il décida de se noyer : après tout, qui était-il pour lutter contre le destin ? Il avait déjà bien assez à faire avec les criminels de tous poils !
- Alors soyons heureux, tant que nous le pouvons, abdiqua-t-il en attirant son cadet contre lui.
- Soyons heureux, répliqua celui-ci en posant ses lèvres sur celles de l’agent fédéral.
- Je t’aime, murmura-t-il un peu plus tard, lorsque repus d’amour ils se retrouvèrent enlacés sur le lit saccagé.
- Je t’aime, répondit Don en écho.
Peut-être seraient-ils punis de cet amour un jour, ou peut-être pas… En tout cas, ce n’était pas aux hommes d’en décider puisque quelqu’un de bien plus puissant les avait poussés l’un vers l’autre.
A cet instant précis, dans le grand lit il n’y avait pas deux frères, juste deux hommes qui s’aimaient d’un amour comme trop peu de gens ont la chance d’en connaître un jour. Et on ne repousse pas la chance. Pas plus qu’on ne repousse l’amour.
FIN
Chanson de Didier Barbelivien