Reclassement du cadeau d'anniversaire de Pandi en 2013!
Les personnages de Luka et d’Alec de « Les infiltrés » sont la propriété exclusive de Pandi et Fanncis. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en scène dans cette histoire.
Petit développement sur les sentiments de Luka alors qu’il pense que son amant a été tué.
Que tu reviennes
Luka regardait les vagues qui venaient se briser sur la rive. Il regardait mais il ne les voyait pas. A perte de vue il n’y avait, pour lui, que le vide, l’immensité déserte. D’un geste rageur il écrasa la larme qui venait perler à sa paupière : à quoi servait de pleurer ? A quoi servait de se lamenter ?
Rien ne le ferait revenir : ni les larmes, ni les prières, ni la colère…
Rien.
Encore un jour qui se lève
Encore un jour inutile
Où la vie balaie les rêves
Alors qu'ils étaient tranquilles.
Il regarda le grand voilier qui s’éloignait majestueusement et un instant il se demanda si ce n’était pas ce qu’il devait faire : s’embarquer sur le premier cargo venu, sans même se soucier de sa destination, quitter ces lieux où il avait été heureux, où il avait eu l’imprudence de croire que lui aussi avait droit au bonheur.
Il pouvait aussi simplement prendre son propre bateau et mettre les gaz droit devant, jusqu’à ce qu’il n’ait plus de carburant, jusqu’à ce que la mer décide de son sort : peut-être alors qu’il rejoindrait l’homme qu’il aimait dans les abysses obscures.
Partir… partir à son tour…
Les bateaux quittent le port
Quitte à ne jamais revenir
Poussés par des vents plus forts
Comme ceux qui t'ont fait partir
Et du passé qui s'endort
Je n’ai rien à retenir
Il retourna lentement vers son camping-car, ne remarqua même pas la désolation qu’était devenu son chez-lui : les papiers de sucreries, les reliefs du peu de nourriture qu’il ingurgitait, les cotons souillés de son sang.
Il ne voulait plus rien sentir, plus rien ressentir, sauf cette douleur salvatrice qui lui permettait de se savoir encore vivant quand il avait l’impression d’être déjà mort. Et en regardant le sang qui coulait de l’entaille, il ne voyait que le visage de son amant, et la douleur qui le transperça à ce moment-là, il fallait qu’elle s’évacue. Alors il posa de nouveau le couteau à l’intérieur de la cuisse et il appuya, exhalant un long soupir lorsque la chair s’ouvrir sous la pression.
Quelque part au fond de lui, une petite voix lui murmurait que ce n’était pas la bonne solution, qu’il ne faisait que se détruire et que rien de tout cela n’apaiserait le chagrin ni les affres de l’absence. Mais il était incapable de l’écouter, obnubilé qu’il était par ce vide qui le remplissait entièrement.
Que tu reviennes
Je ne m'y attends plus
Que tu reviennes
J'ai tellement attendu
Des jours et des semaines
Des mois peut-être plus
Autant que je m'en souvienne
Je crois que tout était perdu. *
Tant qu’il avait gardé un soupçon d’espoir, il avait réussi, tant bien que mal, à faire face. Mais l’annonce de la mort d’Alec l’avait anéanti. Il n’avait plus rien… Plus rien ne le rattachait en ce monde et pourtant il n’avait pas le courage d’aller voir dans l’autre.
En fait il ne croyait plus à rien : ni à la vie, ni à la mort, ni à cet autre monde que l’on dit meilleur, ni au bonheur… Chaque fois qu’il avait eu la faiblesse de céder à ce sentiment de sécurité et de plénitude, le destin s’était abattu sur lui comme pour lui rappeler qu’il était destiné à souffrir et à être seul.
Chienne de vie qui ne donnait que pour mieux reprendre ! Saloperie de destin qui vous broyait dans un sourire !
Alec… son sourire… ses lèvres pleines… ses mains douces…
Que tu reviennes
Je ne m'y attends plus
Que tu reviennes
J'ai tellement attendu
Des jours et des semaines
Des mois peut-être plus
Autant que je m'en souvienne
Je crois que tout était perdu.
Il était revenu sur le rivage, là où se commençaient et se terminaient ses journées, comme si il s’attendait à ce que la mer lui rende le corps de son homme et qu’en marchant sur la grève il le découvre à ses pieds. Peut-être alors qu’en se penchant sur lui, en effleurant ses lèvres d’un baiser il réussirait à l’arracher à son profond sommeil… Peut-être que tout cela finalement n’était qu’un affreux cauchemar dont il allait enfin se réveiller.
Mais il savait que ce n’était pas de ces mauvais rêves que le matin emporte avec lui dans les premiers rayons du soleil. Il savait que c’était réel et que son cœur glacé ne se réchaufferait plus jamais.
Il était là, à regarder le soleil disparaître dans l’eau et il lui semblait que la vie disparaissait avec lui, sa vie, engloutie dans les vagues qui avaient emporté son aimé.
Encore un soir qui s'achève
Dans cette chambre immobile
Et pourquoi me lèverais-je?
Et pour qui le faudrait-il?
C'est du passé qui s'endort
Je n'ai plus que des souvenirs.
Il essayait de se raccrocher à tous leurs bons moments, mais finalement, ils avaient eu si peu de temps ! Il avait si peu de chose à se remémorer pour faire revivre l’homme de sa vie… Il revoyait son arrivée dans l’équipe, la froideur de son chef, leur rapprochement, leur première fois, SA première fois…
Valait-il mieux avoir connu cela et l’avoir perdu, comme disaient certains, ou aurait-il mieux valu qu’il reste sur ses gardes, qu’il prenne la fuite dès qu’il avait compris que son cœur ne lui appartenait plus ? Parce que cette souffrance qu’il tentait de dompter en se mutilant chaque jour un peu plus, il n’imaginait pas qu’elle puisse un jour être adoucie par le souvenir de ses heures heureuses.
L’espoir qui l’avait tenu debout l’avait déserté et il n’y arrivait plus. Sa démission était effective, il n’avait plus besoin de rester là à attendre ce qui n’arriverait jamais.
Que tu reviennes
Je ne m'y attends plus
Que tu reviennes
J'ai tellement attendu
Des jours et des semaines
Des mois peut-être plus
Autant que je m'en souvienne
Je crois que tout était perdu.
Le couteau avait parlé : ce serait le Montana. Drôle de coïncidence, à moins que ce ne soit encore un coup foireux de ce destin qui s'acharnait sur lui! Il fourra un peu de linge dans son sac, n’oublia pas ses indispensables sucreries, jeta un dernier regard sur le champ de bataille qu’était devenu son intérieur et il sortit, refermant la porte derrière lui en se disant que plus jamais il ne franchirait ce seuil.
Il partit droit devant lui, sans se retourner. Il emportait tout ce qui comptait pour lui au fond de son cœur meurtri : le visage d’Alec, son rire chaleureux, d’autant plus précieux qu’il était rare, les mots qu’il lui avait murmurés, ce dernier baiser avant de le quitter pour cette mission sans retour… Il emportait le souvenir d’un amour qui le hanterait jusqu’à ce que sa chienne de vie veuille bien prendre fin.
Sur le bord de la route, pouce levé, il attendait… Et lorsqu’un routier s’arrêta pour le prendre à son bord, il n’eut pas un regard pour la ville qu’il quittait, qu’il fuyait plutôt. Il n’espérait pas trouver le bonheur ailleurs, juste peut-être une certaine forme d’apaisement, d’acceptation.
« Alec… J’arrive mon amour… Attends-moi. »
FIN
Chanson de Patrick Fiori
Paroles originales :
*Je crois que tu ne m'aimais plus