Une songfic offerte en juin 2013 à Laure
Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de : Léonard Freeman, Alex Kurtzman, Roberto Orci, Peter M. Lenkov. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Les trois dernières minutes
Il aurait dû le savoir… Il aurait dû sentir que la chance allait tourner. Combien de fois avait-il défié le sort, déjoué les probabilités les plus évidentes ? Combien de fois avait-il joué sa vie à pile ou face en tombant toujours sur le bon revers ?
Il y a un moment où la chance tourne, et ce moment-là semblait arrivé pour lui.
Plus que trois minutes trois minutes à vivre
J´attends simplement la balle qui délivre
Ceux qui vont tirer je ne sais rien d´eux
On m´a lié les mains et bandé les yeux.
Il revoyait chaque péripétie de cette mission pourrie, de ce moment où il avait reçu le message alors qu’il planchait sur une enquête avec son équipe, à cet instant qui allait être son dernier.
Avoir fait tout ça pour terminer ainsi ! Si ce n’était pas stupide ! Il aurait suffi de si peu : quelques minutes de plus ou de moins et la patrouille l’aurait manqué, quelques mètres de plus ou de moins et son équipier ne se serait pas trouvé pris dans les crocs redoutables du piège à ours qui lui avait brisé net la cheville, quelques clics de plus ou de moins et ça n’aurait pas été lui qui se serait retrouvé dans ce merdier.
Mon dos est collé contre un mur tout blanc
Je vois des images je suis un enfant
Je sors de l´école ma mère vient m´attendre
Je cours dans ses bras Dieu comme elle est tendre.
Il avait toujours rigolé de cette croyance commune qui veut qu’au moment de faire le grand saut on revoie sa vie défiler en une fraction de seconde. Il pensait que ce n’était que des fariboles, des inepties de scénaristes, des inventions de ces personnes qui veulent avoir l’air de savoir ce que nul ne peut connaitre puisque personne n’est jamais revenu de l’au-delà pour dire ce qu’il avait ressenti vraiment.
Pourtant, c’était bien ce qui se passait à cet instant : il revoyait sa mère lui tendre les bras, il entendait le rire de son père, les cris de sa sœur et il sentait sur ses joues tuméfiées le soleil brûlant d’
Hawaii tandis que ses narines semblaient humer l’air iodé.
L´image a changé j´ai dix-sept ans
On se tient la main comme deux enfants
Un soir de novembre elle n´est plus venue
Mon premier amour qu´es-tu devenu ?
Elle était belle cette fille, belle comme on l’est lorsqu’on se pense éternel et qu’on est certain que la vie ne nous réserve que le meilleur. Il se souvenait de son sourire, de ses yeux clairs, de la chaleur de ses mains, de la tendresse de ses baisers. Il n’était qu’un gamin goûtant à la liberté des deux mois de vacances, libéré pour ce temps du joug de l’académie militaire et jouissant de cet été qui avait été si particulier pour lui. Ils n’avaient pas franchi ensemble le pas qui aurait fait de lui un homme et d’elle une femme. Peut-être cela se serait-il produit si le destin n’en avait pas décidé autrement.
Il se rappelait aussi de ses escapades à la rentrée pour la retrouver, jusqu’à ce qu’elle se lasse de leurs jeux. Il avait alors noyé son chagrin dans le travail, avait décidé que rien au monde ne valait la vie de militaire : après avoir perdu sa mère, envoyé loin par son père, séparé de sa sœur, cette rupture avait signé son choix de vie. Il serait soldat avant tout et nul au monde ne le ferait plus jamais souffrir. Son cœur ne s’emballerait plus pour quiconque, en tout cas pas au point de lui faire oublier l’essentiel.
Plus que deux minutes avant de mourir
Ceux qui vont tirer n´ont qu´à obéir
Je vois une fille elle n´est pas très belle
Ce ne fut qu´un soir je me le rappelle
J´avais plus de peur que j´avais de joie
On n´oublie jamais la première fois.
Il ne se souvenait même pas de son prénom : Rosane ou Albane, à moins que ce ne soit Oriane ou Mégane… Il avait quoi ? dix-huit ans ? D’autres vacances durant lesquelles il était parti camper seul dans les Appalaches. Elle était arrivée un jour, au détour d’un sentier et lui avait sourit. Ce sourire par contre éclairait toujours sa mémoire ainsi que la douceur de sa peau et la volupté qu’il avait connu en se fondant en elle pour la première fois.
Au petit matin elle était partie, envolée comme elle était apparue et il s’était demandé un moment s’il n’avait pas rêvé, s’il n’avait pas croisée une de ces fées des montagnes… Mais non, les fées ne s’unissaient pas aux humains et, avec la franchise cruelle des adolescents, il s’était aussi dit qu’elles étaient autrement plus belles que celle avec laquelle il avait perdu sa virginité.
Il ne l’avait pas oubliée, mais n’avait jamais cherché à la revoir. D’ailleurs, l’aurait-il voulu qu’il n’aurait même pas su où et comment la trouver. Il y avait eu d’autres filles après elle, bien d’autres, des visages anonymes qui se confondaient dans sa mémoire, des corps de toutes sortes, des cheveux longs ou courts, bruns, blonds, roux, châtains et même bleus… Un arc-en-ciel de sensations et de plaisir mais qui jamais ne lui avait permis de trouver ce qu’il cherchait vraiment et que lui-même était incapable de formuler.
Maintenant défilent des visages flous
De vagues amis tout ça je m´en fous
Mais toi que j´adore mon seul vrai copain
Toi que j´ai frappé pour une putain
Dans l´aube montante du dernier matin
Cette gifle là me fait mal aux mains.
Comment en étaient-ils arrivés là ? Pourquoi avait-il ainsi réagi ? Lorie avait-elle fait exprès de se dresser entre elle et Danny ?
Il savait bien sûr qu’elle avait un gros faible pour lui, mais il n’avait jamais eu envie d’aller plus loin que l’amitié qu’il lui offrait, sans même se demander pourquoi il ne le souhaitait pas. Il se réfugiait derrière le professionnalisme, le fait que coucher avec elle risquait de déstabiliser l’équipe, mais s’il voulait être franc avec lui-même en cet instant où il n’avait plus le temps de se mentir, il savait qu’il y avait tout autre chose derrière cette retenue, autre chose qu’il s’était refusé à voir parce qu’il avait peur de ce que cela engendrerait. Danny était pour lui un ami, sans doute le meilleur qu’il ait jamais eu : durant sa vie de seal, il avait fait confiance à ses équipiers parce que sa vie dépendait d’eux, certains avaient compté pour lui, mais il n’y en avait aucun avec qui les liens avaient été aussi fort que ceux qui s’étaient tissés entre lui et son subordonné. Personne d’autre que le lieutenant Williams ne pouvait se permettre de lui parler comme il lui parlait, personne ne savait aussi bien que lui lire en lui, personne n’était capable comme lui de trouver les mots qui l’apaisaient.
Alors, lorsque dépitée de se voir laissée à distance, Lorie était venue lui dire que Danny l’aimait, il avait réagi comme un pauvre crétin arriéré. Tout ce qu’il avait trouvé à faire pour lui prouver qu’elle se trompait, c’était de mettre son second au pied du mur en lui demandant ce qu’il pensait des élucubrations de leur partenaire.
Danny l’avait regardé bizarrement en se mordillant la lèvre inférieure tandis que lui-même le regardait, incrédule, refusant de croire à ce qu’il lisait dans le regard du lieutenant, refusant d’entendre son cœur qui battait, refusant de lire ses propres pensées. Puis, quand le blond s’était approché de lui, il avait reculé et lorsqu’il s’était retrouvé acculé au mur, il avait frappé, comme si Danny pouvait lui faire le moindre mal ! Il se demandait encore quel démon l’avait saisi à ce moment-là, pourquoi il n’avait pas voulu comprendre ce qui l’animait.
Lorie avait quitté l’équipe et il avait accepté cette mission pour prendre le temps de réfléchir, le temps de comprendre, le temps de s’adapter à cet amour qu’il n’avait pas vu venir, qu’il ne pouvait même pas imaginer ressentir.
Non… Danny n’était pas seulement son copain, son seul vrai copain comme il le lui avait dit un soir de déprime où il avait bu plus que de raison. Danny était bien plus que cela, il était sans doute ce qui lui était arrivé de meilleur dans cette chienne de vie qu’il avait traversé comme un bulldozer sans vraiment se soucier des dégâts qu’il occasionnait.
Et maintenant, il n’aurait jamais l’occasion de lui faire savoir à combien il regrettait, combien il s’en voulait et combien il avait compté pour lui. Il ne saurait jamais jusqu’où ils auraient pu aller tous les deux, s’il aurait pu connaître une autre première fois, d’autres sensations, d’autres voluptés… Il ne saurait jamais si le blond lui aurait pardonné sa réaction stupide, si vraiment l’amour qu’il lui portait était de ceux qui traversent le temps.
Il ne saurait jamais plus rien…
Mais à cet instant précis, alors qu’il entendait la voix gutturale jeter des ordres dans une langue qu’il ne comprenait pas mais dont il devinait parfaitement pourtant ce qu’ils disaient, il ne voulait garder qu’un visage en mémoire pour l’emporter dans son éternité…
Danno(2)... je t´embrasse... je pars en voyage
Cette fois c´est toi qui dois être sage
Tout ira si vite... je n´aurais pas mal
Ça tue d´un seul coup douze bouts de métal
Devineras-tu qu´à l´heure de mourir
J´ai pensé à toi.. et laisse moi te dire
Combien je...
Les détonations avaient retenti et l’odeur de poudre envahissait ses narines, pourtant il était toujours debout, sans comprendre comment cela était possible.
Puis il y eu ces voix qui s’entrecroisaient, ces ordres que cette fois-ci il comprenait parfaitement et finalement des mains sur son visage :
- Steve… Dis-moi que tu vas bien ! Steve !!!!
Le bandeau glissait de ses yeux et il vit les prunelles bleues de Danny fixées sur lui et ce qu’il lut dans ce regard lui emplit le cœur d’un bonheur comme il ne l’avait jamais connu.
- Bon Dieu, s’emportait maintenant le blond. Tu n’en feras jamais d’autres ! Tu sais que tu me feras mourir avant l’heure avec tes conneries !
Mais déjà il s’attaquait aux liens qui le retenaient et bientôt ses mains furent libres. Alors, sans regarder les autres : Kono et Chin qui le contemplaient avec des larmes d’émotion dans les yeux et un sourire d’une oreille à l’autre, Jo et l’équipe de neavy seals qui tenaient en respect ceux de ses ravisseurs qui n’étaient pas morts ou au sol, il referma ses bras sur Danny et l’attira à lui :
- Pardon, lui murmura-t-il, j’ai été un vrai crétin ! Je t’aime Danno…
Ils auraient bien sûr beaucoup de choses à se dire, le chemin ne serait sans doute pas semé de roses avec deux tempéraments comme les leurs, mais lorsque leurs lèvres se joignirent pour la première fois, leurs âmes se reconnurent et ils surent que, quels que soient les épreuves à venir, ils les affronteraient ensemble, parce qu’il était écrit depuis la nuit des temps que c’était ensemble qu’ils étaient entiers.
FIN
Chanson de Pascal Danel
Paroles originales
(2) Maman