Reclassement d'une fiction offerte l'an passé à Captain à laquelle j'ai emprunté un couple qu'elle a créé.
Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de : Shane Brennan pour les unes et Cheryl Heuton & Nicolas Falacci pour les autres. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Aucune différence
G Callen n’avait jamais vraiment cru en quoi que ce soit. Comment croire quand vous avez été ballotté de famille d’accueil en famille d’accueil sans jamais trouver l’amour que vous étiez en droit d’espérer ? Comment croire quand la violence est devenue votre quotidien au point que vous ne savez plus ce que veulent dire les mots, douceur, tendresse, affection ?
Il s’était réfugié dans des principes rien qu’à lui, qui le tenaient à l’écart de tout ce qui pouvait lui faire mal, le faire douter, le faire chuter. Et cela était surtout vrai en amour : il ne voulait pas, n’avait jamais voulu se fixer et il avait toujours tout fait pour n’avoir que des amants de passage, des hommes d’une nuit ou d’une semaine qu’il ne reverrait jamais et dont il oubliait le nom aussitôt la porte refermée sur eux.
J´vois aucune différence
Entre le grand amour
Pour toujours
Et l´aventure
Qui n´dure qu´un court instant.
G Callen n’avait jamais vraiment appris à faire confiance. Comment faire confiance quand les adultes vous trahissent, vous haïssent, vous font souffrir physiquement et mentalement ? Comment faire confiance quand vous ne savez même pas d’où vous venez, qui vous a mis au monde et pourquoi on vous a un jour laissé sur le bord du chemin ? Comment faire confiance quand toute votre formation d’ancien de la CIA, vos missions en infiltration pour le FBI ou la DEA et maintenant pour le NCIS vous ont appris à toujours rester sur vos gardes et à porter en permanence un masque ?
Il en était ainsi dans ses relations amoureuses : il montrait à l’autre le visage que celui-ci s’attendait à voir et rien de plus. Il ne se livrait pas, pour éviter d’avoir à répondre à des questions auxquelles il n’avait pas de réponse.
De cœur en cœur, de corps en corps, il n’avait jamais pris le risque d’oser une seule fois le mot « couple ».
J´vois aucune différence
Si c´n´est qu´évidemment
Bien souvent
C´est l´aventure
Qui dure le plus longtemps.
Mai pour une fois G Callen voulait espérer, il voulait croire que lui aussi avait le droit au bonheur, le droit à un avenir, le droit à l’amour.
Ca lui était tombé dessus, comme ça, sans s’annoncer, comme un orage soudain qui déchire le ciel d’été et s’en va tout aussi brutalement en laissant derrière lui une terre bouleversé. C’était cela : il était bouleversé. Tout ce en quoi il croyait, toute cette armure qu’il s’était bâtie jour après jour, année après année, venait de se fendiller, par la grâce d’un regard bleu et d’un sourire à faire se damner un saint.
Aujourd’hui, G. Callen se prenait à croire en l’avenir.
L´éternité c´est quand j´prends ta bouche
Pas le nombre d´années
Que purgent les condamnés.
C’en aurait été presque risible si ça n’était pas aussi violent !
Il était en train de remettre en cause tout ce en quoi il avait voulu croire jusqu’à présent, ces règles édictées au fil du temps qui lui permettaient de garder un semblant d’équilibre dans une vie où il s’étourdissait pour ne pas avoir à penser.
La règle d’or, son point d’appui, son excuse, son leitmotiv… Aujourd’hui il la foulait allègrement aux pieds et il s’en moquait. Ne jamais sortir avec un collègue ou un flic ! tu parles !
Tout avait volé en éclats par le biais de quelques mots et d’une main tendue, de quelques équations sur un tableau transparent, de cette impression de déjà vu, d’inexorable. L’impression que c’était depuis toujours et pour toujours.
L´éternité c´est quand on se touche
Pas une diabolique
Notion mathématique.
Pour lui, s’attacher c’était se mettre en danger et la famille ne pouvait être qu’une source de difficultés, de souffrance, de mensonge… Sa famille c’était son équipe, Sam sur qui il pouvait compter à tout moment, Kens, Deeks, Eric, Hetty… tous ces gens auxquels il confierait sa vie sans hésiter, ces gens qui l’acceptaient tel qu’il était, qui n’avaient jamais remis en cause son caractère, son professionnalisme, qui lui offraient leur amitié sans rien exiger en retour, que l’annonce de son homosexualité n’avait pas éloignés…
Il avait longtemps pensé qu’il n’avait besoin de rien d’autres qu’eux : même pas d’un chez lui dont il n’avait pas envie. S’installer c’était donner une chance à la vie de le rattraper, à l’amour de le débusquer… S’installer c’était donner une chance à un lendemain auquel il n’avait pas cru jusqu’à présent.
L´éternité c´est quand tes yeux brûlent
Ca c´est mieux qu´une messe
Mieux qu´une belle promesse.
Mais aujourd’hui il abdiquait, de tout son corps, de tout son cœur, de tout son esprit, de toute son âme. Aujourd’hui il savait que la bataille était perdue d’avance parce qu’il ne voulait pas la gagner. Aujourd’hui il voulait simplement se perdre dans les yeux bleus, passer ses doigts dans les courts cheveux blonds, plaquer son corps contre un corps tout aussi vigoureux que le sien et laisser des bras l’enserrer comme dans une cage dont désormais il ne souhaitait surtout pas s’évader.
Qu’importaient les heures, les minutes, les secondes ? Près de lui plus rien n’existait plus.
L´éternité c´est quand tout bascule
Puisqu´à ce moment
On oublie le temps.
Ils étaient simplement là, la main dans la main, épaule contre épaule et ils regardaient l’océan du haut de la terrasse qui surplombait la plage.
Ils ne se parlaient pas et pourtant ils se disaient tant de choses dans le silence troublé simplement par le bruit du ressac. Entre eux les mots n’étaient pas nécessaires, chacun avait lu dans les yeux de l’autre la même envie, la même volonté : ici ils seraient bien, ici ils pourraient devenir un couple avec les mêmes rêves, les mêmes attentes, les mêmes buts…
Ce serait ici, pour hier et aujourd’hui, pour demain et dans un siècle…
L´éternité c´est quand tes yeux brûlent
Ca c´est mieux qu´une messe
Mieux qu´une belle promesse.
Qui aurait cru lorsqu’il était arrivé au bureau du FBI, en infiltration dans cette équipe, que le destin l’attendait au tournant ?
Mais finalement, était-ce si étonnant ? Ils avaient tellement en commun : l’armée, le sens du devoir, le courage confinant parfois à la témérité, le respect de leurs équipiers et de leur chef en même temps que le cran de suivre leur instinct plutôt que les ordres.
Alors ils s’étaient tout de suite reconnus et pourtant ils avaient tout fait pour s’éloigner l’un de l’autre, comme s’ils voulaient garder une liberté qu’ils n’avaient déjà plus. Cette distance qu’ils avaient mis entre eux n’avait cessé de se combler, malgré tous leurs efforts, jusqu’au moment où ils n’avaient plus été capables de se mentir plus longtemps, jusqu’à cette première nuit, ce premier baiser, ce premier réveil dans des droits froissés…
C’était écrit, pensaient-ils parfois avec le même sourire aux lèvres et le même éclat dans les yeux.
L´éternité c´est nos instants d´extase
Et non une lourde peine
Dont les jours se traînent.
Ils avaient voulu cacher leur liaison, mais peut-on cacher le soleil et l’éclat du bonheur ? Parce qu’ils tenaient à eux, leurs équipiers avaient bien vite deviné et s’étaient réjouis pour eux. Oh bien sûr, il soupçonnait Sam d’avoir pris son amant entre quatre yeux pour le menacer de lui faire la peau si jamais il lui faisait le moindre mal, comme l’avait fait le meilleur ami de son compagnon avec lui… Mais nul ne s’était offusqué de leur choix, nul n’avait même u l’air étonné, comme si tout cela était normal, comme si dès le premier instant chacun avait su que leur rencontre déboucherait sur cette histoire.
Une aventure, s’étaient-ils jurés la première fois, juste une aventure qui se terminerait avec la mission…
La mission était finie depuis des mois, et l’aventure n’en était plus une ou plutôt si, mais la plus belle des aventures qu’ils puissent vivre, celle qui les mènerait à se révéler à eux-mêmes, à devenir meilleurs, plus forts, plus ardents…
L’aventure de la vie et de l’amour.
L´éternité s´il faut qu´elle nous rase
Qu´elle aille et sur l´heure
Se faire voir ailleurs.
Alors oui, ils y étaient aujourd’hui, pensa G. Callen en se tournant vers l’agent immobilier :
- On la prend.
Il sourit parce que son amant avait dit les mêmes mots avec une synchronisation exacte.
Oui, aujourd’hui il était prêt à franchir un nouveau cap et à enfin avoir un chez lui, sur cette plage, ou plutôt un chez eux, un endroit où ils pourraient se ressourcer entre deux missions, où ils auraient le droit de rêver, où un jour peut-être ils élèveraient une famille.
- C’est pour de bon alors ? murmura-t-il à son compagnon, cherchant dans son regard la confirmation qu’ils ne faisaient pas d’erreur.
- Pour de bon, et pour toujours…
Et pour le convaincre qu’il ne parlait pas en vain, Colby Granger enlaça l’homme qu’il aimait et l’embrassa avec tout l’amour qu’il ressentait pour lui. Il fit passer dans l’étreinte toute sa force, toute sa conviction et son amour se laissa emporter dans un monde où le bonheur existait.
A cet instant précis, G. Callen croyait en son amour et il avait confiance en l’avenir.
FIN
Chanson de Alain Chamfort.