Toujours dans mes reclassements, je vais finir par vous filer une overdose de songfic!
Celle-ci était destinée à Brigitte.
Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de : Stéphane Giusti, Alain Robillard & Alain Tasma. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Cette scène prend place après l’agression dont a été victime Yann et la rupture qui s’en est suivie entre les deux hommes.
Parler d’amour
Seul au bar, Yann regardait fixement son verre d’alcool, comme si celui-ci allait lui donner la réponse à ses questions, le remède à ses tourments.
Que faisait-il là, au milieu de ces soiffards qui, peu à peu, perdaient pied avec la réalité, lui qui était ancré dans celle-ci, incapable de larguer des amarres qu’il avait voulu pourtant trancher net, de quelques mots bien sentis.
Un seul souffle de vent, des coups de pattes
Nos amours ressemblent aux châteaux de cartes
A la merci d'un sourire, d'un regard
Qu'il avançait en retard.
Ca avait paru si simple sur le moment, si facile. Il n’était pas, n’avait jamais été et ne serait jamais gay. Tout cela n’était qu’une immense méprise, un terrible gâchis, juste un moment de folie qui ne pouvait et ne devait pas se reproduire. Les coups reçus ce soir-là, en pleine rue, étaient comme autant de coups de semonce lui indiquant la voie à suivre. Il ne devait pas déroger à sa ligne de conduite.
Et pourtant… pourtant son cœur lui tenait un tout autre langage.
Parler d'amour,
Quant tant de coeurs usés s'éteignent
Sur des baisers salés de peine
J'ai peur que le sommeil ne vienne
Avant de pouvoir dire "je t'aime"
Kevin, son regard azur, si innocent malgré ce foutu métier qui leur ôtait jusqu’à la moindre de leurs illusions. Kevin et son sourire à faire se damner tous les saints du paradis et tous les démons de l’enfer. Kevin et ses mains douces… Kevin si tendre, si attentionné… Kevin chez qui il avait trouvé ce qu’aucune femme ne lui avait jamais offert.
Pourquoi avait-il fallu que ce soit lui, que ce soit eux ? Pourquoi avait-il craqué pour ces yeux bleus, ce sourire enjôleur, ce corps d’athlète ? Il savait pourtant, dès le début, que c’était une erreur, un chemin qu’il ne devait pas suivre et qui ne le conduirait nulle part.
Chacun sur nos fils pauvres acrobates
Accrocher à des rêves qui nous échappent
Chercher des soleils dans le noir
S'échouer sur des lits de hasard.
Il aurait tant aimé trouver les mots pour faire comprendre à son amant ce qu’il ressentait au plus profond de lui. Mais là, dans ce bar, face à ce verre qu’il ne buvait pas, il se demandait soudain s’il savait lui-même ce qu’il ressentait.
Depuis qu’il avait rompu, il avait l’impression d’être en sursis, entre deux mondes, entre deux rives. Ses collègues disaient qu’il n’avait jamais été d’aussi mauvais poil et pourtant sa réputation de sale caractère n’était plus à faire ! Il voulait se persuader qu’il avait pris la bonne décision et pourtant ce vide au fond de lui, ce cœur lourd, ce sentiment d’abandon, tout lui disait qu’il s’était trompé, que les mots qu’il avait jeté en cachaient d’autres, qu’il n’osait prononcer de peur de s’enchaîner à jamais.
Parler d'amour
Quand tant de corps cachés retiennent
Nos coeurs attachés à des chaînes
Faut-il se faire si mal qu'on saigne
Avant de savoir dire "je t'aime".
Voir Kevin jour après jour, l’entrapercevoir au coin d’un couloir, entendre sa voix dans une salle où il ne rentrerait pas… tout faisait remonter en lui des souvenirs qu’il ne voulait pas oublier, qu’il ne pourrait pas oublier. Leurs étreintes torrides ou tendres, leurs fous-rires, leurs engueulades aussi, qui étaient une partie d’eux… Parce que sous ses airs de sainte-nitouche, Kevin était un sacré râleur lui aussi et il savait ce qu’il voulait. Tête de pioche !
Mais c’était sa tête de pioche ! La sienne, à lui… Et maintenant… Maintenant…
Et si Kevin le remplaçait ? Et s’il profitait de cette liberté qu’il lui avait accordée ? Et si déjà il était trop
tard ?
Et si…
Yann jeta quelques pièces sur le bar pour payer un verre qu’il ne boirait pas et il s’élança dans la nuit.
J'ai pas grand chose à donner
Quelques chansons sans importance
Pour venir caresser tes silences
Si tu veux bien m'écouter
Si tu me donnes ton indulgence
Peut-être on réduira nos distances
Il était là, devant l’appartement et son regard indécis allait de la porte à la fenêtre allumée. Kevin ne dormait pas… Mais peut-être n’était-il pas seul ? Peut-être qu’un autre homme en ce même moment goûtait à ses lèvres pleines, faisaient courir ses mains sur son corps parfait, tirait de lui ces gémissements qui résonnaient encore à ses oreilles ?
La lumière allumée ne voulait rien dire : Kevin n’était pas du genre à aimer dans le noir. Il adorait voir son partenaire se perdre dans les méandres du plaisir et que celui-ci puisse avoir le spectacle réciproque.
Il pouvait aussi s’être simplement endormi devant la télé, comme ça lui arrivait parfois après une dure journée… Il pouvait…
Yann ne voulait plus faire des suppositions. Il avait besoin de savoir, quitte à souffrir. Il était peut-être trop tard, mais s’il ne sonnait pas à cette foutue porte il n’aurait jamais de réponse.
Parler d'amour
Quand tout revient toujours au même
Nos mains tendues nos poings se ferment
Avons-nous en nous aussi la haine
Avant d'oser nous dire
Ils étaient là, face à face, dans le salon. Yann ne savait plus vraiment comment dire ce qu’il avait au fond de lui. Ce qu’il avait lu sur le visage de son amant l’avait frappé en plein cœur : l’étonnement, la rancœur, la peine et cette once d’espoir qui lui faisait penser que rien n’était perdu, que s’il était capable, pour une fois dans sa putain de vie de trouver les bons mots, il pourrait regagner la place qu’il n’aurait jamais dû quitter.
Mais bon sang que c’était dur de s’arracher ces phrases qui tournaient dans sa tête depuis ce jour où il avait fait la plus grosse connerie de sa vie, qui pourtant était riche en la matière !
Au moins Kevin avait accepté de l’écouter alors quoi qu’il lui en coûte, il devait parler, parler et parler encore pour lui faire comprendre et peut-être pour comprendre lui-même.
Parler d'amour,
Quand tant de corps cachés retiennent
Nos coeurs attachés à des chaînes
Faut-il se faire si mal qu'on saigne
Avant de savoir dire "je t'aime".
- Ne me refais plus jamais ça Berthier, sinon je te jure que je te descends !
- Connard ! Tu ne pourrais pas vivre sans moi !
- Et bien je me descendrais ensuite et basta !
Aussitôt la gouaille de Yann se mua en peur irraisonnée : Kevin ne devait pas mourir, jamais ! Kevin était son ancre, son refuge, son graal. Il avait mis du temps à le trouver mais maintenant rien ni personne ne le lui arracherait jamais. Alors, plutôt que de continuer cette conversation sans queue ni tête, cette dispute pour rire qui cachait bien d’autres mots, bien d’autres serments, il referma ses bras autour de l’homme qu’il aimait.
L’homme qu’il aimait ! Il lui avait fallu tant de temps pour oser dire ces mots même dans le secret de ses pensées. Il avait fait tant de conneries qui aurait pu le faire passer à côté de ce bonheur.
L’homme qu’il aimait ! Là… A cet instant, tandis qu’il murmurait les trois petits mots magiques, Yann Berthier sut qu’il faisait partie des chanceux qui retrouvaient leur âme sœur durant leur vie terrestre. Et tandis qu’ils s’aimaient, il se promit que plus rien, jamais, ne l’éloignerait de son amour.
FIN
Chanson des Charts
*Paroles originales : Qu'elle*