Une songfic offerte à Natalou l'an passé:
Les personnages de Yanaël, Adam et les autres ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de Natalou, issus de sa fiction « Loup ». Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en scène dans cette songfic.
Songfic inspirée du chapitre de rupture entre Adam et Yanaël.
Requiem pour un fou
La chasse allait s’arrêter là. Il le savait. Il l’avait su dès le début. Il n’avait pas fui pour leur échapper. De toute façon il savait que c’était impossible : tôt ou tard il allait se retrouver là, au point de non retour, à l’orée du territoire des ombres. Il le savait et il s’en moquait.
De toute façon, pour lui, la vie n’avait plus aucune importance, plus de saveur, plus de but, plus d’espoir. Il était vide, l’âme désespérée et l’animal en lui hurlait à la mort, sachant sa fin proche et refusant pourtant d’abandonner sans montrer une fois encore son pouvoir.
Ils étaient là autour de lui et même s’il savait sa fin inéluctable, il voulait faire front encore, juste pour avoir le temps de voir la Lune se lever, une dernière fois… Il l’avait aimée, révérée, elle avait été son alliée le plus souvent, son ennemi parfois et là où il allait, il voulait emporter le souvenir de son éclat, ce souvenir qui rejoindrait au fond de son cœur celui d’une peau douce, d’une voix envoutante, d’un sourire magnifique…
Ils étaient là autour de lui et il n’avait à leur opposer que ses mains nues et son cœur mort… Mais il voulait partir à son heure.
Je vous préviens n'approchez pas
Que vous soyez flic ou badaud
Je tue celui qui fait un pas
Non, Je ne ferai pas de cadeau
Eteignez tous ces projecteurs
Et baissez vos fusils braqués
Non, je ne vais pas m'envoler sans lui.*
Deux cents ans ! Deux cents ans à vivre une vie qu’il pensait parfaite, à taire ses craintes, à devenir plus fort, à veiller sur les siens…
Deux cents ans de solitude qui avait pris fin le jour où il avait croisé deux prunelles chocolat dans lesquelles du bleu se glissait lorsque le loup affleurait sous l’humanité.
Il n’aurait jamais pensé que les sentiments puissent être si forts. Il n’aurait jamais pensé rencontrer un jour son âme sœur, celle qui lui était destinée depuis la nuit des temps, celle que son loup avait tout de suite reconnue…
Son âme sœur… sa moitié… sa source de vie…
Il avait eu deux cents ans pour vivre sa solitude et si peu de temps pour savourer son bonheur. Personne ne pouvait rien pour lui. Personne ne pouvait prendre sa vie parce qu’il était déjà mort. La lutte était vaine, il le savait.
A quoi bon ? Pour quoi ? Pour qui ?
Dites au curé, dites au pasteur
Qu'ailleurs ils aillent se faire pendre
Le diable est passé de bonne heure
Et mon âme n'est plus à vendre
Si vous me laissez cette nuit
À l'aube je vous donnerai ma vie
Car que serait ma vie sans lui.
Il s’était découvert dans cet amour, il avait grandi. C’était un bouleversement plus profond encore que celui qui avait fait de lui un loup-garou, tellement longtemps auparavant. Au contact de Yanaël il était devenu entier, il avait retrouvé foi en l’humanité, foi en l’autre.
Il avait donné tout ce qu’il pouvait donner, il avait su écouter, comprendre et surtout il s’était découvert ce besoin primal de posséder et de protéger. Yanaël était son ancre, sa flamme, sa vie…
Il l’avait marqué pour que chacun sache qu’il était à lui et que quiconque lui ferait du mal le paierait de son existence. Il lui avait offert des cadeaux, l’avait accueilli chez lui, en avait fait leur chez eux. Il l’avait laissé prendre dans son cœur, dans son âme, une place que nul autre jamais ne pourrait occuper, à laquelle nul autre n’aurait pu prétendre.
Il s’était senti renaître au feu de son amour, avait eu l’impression de retrouver ses vingt ans à la folie de sa jeunesse, avait enfin découvert un sens à sa vie.
Yanaël… Son amour… Son amant… Son précieux… Son phare… Son besoin… Son soutien…
Yanaël… Son âme sœur…
Il n’avait jamais su avant lui ce que c’était qu’aimer, aimer à en perdre la raison.
Je n'étais qu'un fou mais par amour
Il* a fait de moi un fou, un fou d'amour
Mon ciel c'était ses yeux, sa bouche
Ma vie c'était son corps, son corps
Je l'aimais tant que pour la garder je l'ai tuée
Pour qu'un grand amour vive toujours
Il faut qu'il meure qu'il meure d'amour.
Il avait couru toute la nuit sous la lune blême qui semblait le regarder avec colère, le condamner de ses actes de ce moment d’égarement sur lequel il ne pourrait jamais revenir, qu’il ne pourrait jamais réparer.
Il avait couru toute la nuit, parfois homme, parfois loup, hurlant son désespoir à l’astre froid qui ne le réchauffait plus parce que rien jamais ne pourrait le réchauffer.
L’aube était là et il était adossé à un grand pin, les jambes flageolantes, l’écume à la bouche… Il regardait les chasseurs qui le cernaient, il reconnaissait certains d’entre eux : Siam, Alaric et Sihat étaient là, au premier rang, aussi pâles que lui… Il y avait de la colère et de la douleur dans les yeux des deux premiers, de l’incompréhension et du chagrin dans les yeux du dernier.
Ils étaient là parce que c’était leur devoir et il savait qu’il ne ferait rien pour échapper à la sentence. De toute façon il ne le voulait pas, il ne le voulait plus.
Il avait eu les quelques heures qu’il avait demandées : des heures pour se souvenir, pour se recueillir, pour se repentir aussi… Des heures pour se demander comment il en était arrivé là, pourquoi tant d’amour lui avait fait perdre ce contrôle dont il était si fier. Des heures pour réécrire une histoire qui ne se réinventerait pas, pour imaginer une autre fin… Une fin à deux…
Ils étaient là, autour de lui… Alors il se laissa glisser le long du tronc, humant à pleins poumons les odeurs de cette nature qu’il connaissait si bien. Son loup ne hurlait plus : il ne cherchait même pas à lutter.
L’un comme l’autre avaient accepté la sentence. Parce qu’il ne pouvait en être autrement, parce qu’ils savaient que, de toute façon, la vie pour eux n’avait plus aucun sens.
Le jour se lève la nuit pâlit
Les chasseurs et les chiens ont faim
C'est l'heure de sonner l'hallali
Et la bête doit mourir ce matin
Je vais ouvrir grand les volets
Crevez-moi le coeur je suis prête
Je veux m'endormir pour toujours, pour toujours.
Sihat s’approcha, les larmes aux yeux. A cet instant précis, Adam eut mal pour son ami. Il comprit quel fardeau pouvait représenter la charge d’Alpha. Il savait que, s’il avait écouté son cœur, Sihat l’aurait épargné. Mais il était l’Alpha, il se devait d’appliquer la justice s’il voulait que la meute le respecte et accepte son autorité.
Il détourna le regard, acceptant d’être dominé, sans aucune difficulté. De toute façon, rien n’avait plus d’importance. Rien n’en avait plus depuis cet instant ou, alors que Yanaël lui signifiait qu’il allait le quitter, il avait bondi sur lui. Il ne voulait pas lui faire de mal, juste le retenir, l’obliger à l’écouter, lui faire comprendre que les mots qu’il avait jetés avaient dépassé sa pensée, que ce n’était pas du tout ce qu’il voulait dire.
Il avait simplement oublié sa puissance, démultipliée par la crainte de voir partir son amour. Yanaël avait basculé en arrière et sa nuque était venue frapper la corniche de la cheminée. Il n’avait pas eu besoin de porter la main à son cœur pour savoir que la vie ne pulsait plus dans ses veines. Le vide sidéral qu’il avait ressenti soudain, le hurlement lugubre de son loup lui avait fait comprendre qu’il n’y aurait pas de retour en arrière possible.
Il venait de priver la meute d’un élément exceptionnel, méritant par là-même le châtiment suprême. Mais surtout, il venait de se priver de la chance de vivre son amour et quand bien même la meute lui aurait pardonné, il n’aurait pu vivre avec le poids de la culpabilité et l’immensité de la solitude.
Sa pire souffrance était que son amour était parti persuadé qu’il le méprisait, assommé par les paroles reçues comme autant de coups. Il espérait simplement que là où il irait, il le retrouverait, il pourrait s’expliquer… Une deuxième chance dans une autre vie…
- Fais ce que tu dois faire, murmura-t-il à Sihat.
Celui-ci se détourna : Adam était comme son frère, il ne pouvait pas, il ne voulait pas. Puis il croisa les regards d’Alaric et de Siam qui réclamaient justice pour leur fils et ami. Il n’avait pas le choix… C’était son devoir d’Alpha…
Adam le regardait, lut sa condamnation et tendit son cou… Soudain il était en paix.
Je n'étais qu'un fou mais par amour
Il* a fait de moi un fou, un fou d'amour
Mon ciel c'était ses yeux, sa bouche
Ma vie c'était son corps, son corps
Je l'aimais tant que pour la garder je l'ai tuée
Je ne suis qu'un fou, tu n'es qu'un fou, un fou d'amour, rien qu'un fou
Un pauvre fou qui meurt
Qui meurs
Qui meurt d'amour
- Adam… Adam… Mon amour…
Adam ouvrit des yeux égarés, étonné d’être encore en vie. Il se sentait si fatigué, anéanti… Et puis soudain ses prunelles plongèrent dans celles qui le regardaient avec inquiétude, il leva une main faible, toucha les cils mouillés et sentit une larme tomber sur sa paume.
Il ne comprenait pas… Il ne comprenait plus…
- Yanaël… Tu es là ? Mais… Je t’ai tué…
- Non… Non… Je suis là… Je suis vivant… Souviens-toi…
Il ne parvenait pas à rassembler ses idées, alors Yanaël l’aida à faire le tri dans son cerveau enfiévré, lui faisant revivre leur querelle, ce moment où il avait voulu bondir sur lui pour le retenir mais où son amant l’avait repoussé en puisant dans son lac.
- Je t’ai blessé, pleurait maintenant le jeune homme. Je ne voulais pas… J’avais juste peur… Tellement peur…
- Ne pleure pas, c’est ma faute…
Soudain tout reprenait sa place : un cauchemar, un stupide cauchemar engendré par la fièvre dû au traumatisme crânien. Yanaël l’avait veillé durant deux jours, refusant de quitter son chevet, affolé de l’entendre gémir dans son sommeil, l’appeler avec dans la voix un désespoir qui transperçait son cœur.
Maintenant tout allait rentrer dans l’ordre : ils étaient vivants, tous les deux. Rien d’irréparable n’était arrivé et Adam aurait tout le temps de se faire pardonner ses paroles blessantes. Il pourrait s’expliquer, tenter de lui faire comprendre et aller de l’avant.
Tant qu’ils étaient ensemble rien n’était impossible. Ils étaient des âmes-sœurs et rien d’autre n’avait d’importance. Des querelles, ils en auraient sans doute d’autre étant donnés leurs caractères respectifs. Mais Adam se jurait qu’il n’aurait ni regret, ni remords, plus jamais.
Yanaël était son amour, son âme sœur. L’amour pouvait rendre fou… Le sien le rendrait plus fort, plus généreux, meilleur.
Leur vie ne pourrait être que belle parce qu’ils étaient destinés l’un à l’autre.
FIN
Chanson de Johnny Hallyday
*Paroles originales : elle