Reclassement de la songfic offerte à Laure.
Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de : Léonard Freeman, Alex Kurtzman, Roberto Orci, Peter M. Lenkov. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Fais-moi une place
- Danny c’est quoi ça ?
Le ton était hargneux lorsque le lieutenant répliqua :
- A ton avis ? Ca ressemble à quoi ? On t’a pas appris à lire dans ton école de kamikazes ?
- Bien sûr que j’ai appris à lire ! Et même à écrire et à compter figure-toi !
- Ouais… Ben dommage qu’on t’ai pas aussi appris à te servir de ta tête figure-toi !
- Danny…
- Quoi Danny ? Y’a plus de Danny ! Il en a ras le cul Danny de te voir te jeter à corps perdu devant le danger et de revenir avec un petit sourire fat comme si rien de tout cela n’avait d’importance pour toi : comme si l’inquiétude des autres n’avait aucune importance pour toi !
- Quoi… C’est parce que l’autre jour cet enfoiré m’a foncé dessus avec sa voiture ?
- Cet enfoiré t’a foncé dessus avec sa voiture, et la semaine d’avant un autre enfoiré t’a poussé du haut d’un building de cinquante étages, et il y a un mois, un autre enfoiré t’a envoyé une grenade entre les jambes ! Ce monde est plein d’enfoirés et comme par hasard, c’est toujours sur toi qu’ils tombent !
- Mais c’est mon job de…
- Non ! Ton job, notre job, c’est de les poursuivre, de les arrêter si possible et de les enfermer mais pour cela on n’a pas besoin de passer systématiquement par la case hosto en attendant de terminer à la case cimetière ! T’as une idée de combien de fois t’as failli y rester depuis qu’on se connaît ?
- C’est ça ! Tu t’inquiètes pour moi !
- Ben oui je m’inquiète pour toi ! Quoi d’étonnant à ça ! Je m’inquiète pour toi et toi on dirait que tu fais tout pour que je continue à m’inquiéter ! Tu veux que je te dise : t’as pas plus de cœur que de cervelle ! C’est pour ça que j’ai demandé ma mutation ! Et tu peux me dire ce que tu voudras, pas question que je la retire !
- Danny… Danny… Ecoute-moi !
- Non ! Non je n’ai pas l’intention de t’écouter, parce que tu vas t’arranger pour m’emberlificoter une fois de plus et que si je suis assez idiot pour t’écouter…
Le blond s’interrompit soudain parce que son vis-à-vis s’était approché de lui, avait pris son visage en coupe dans ses mains et le fixait, les yeux dans les yeux, avec une expression qu’il n’avait jamais vue sur son visage.
- Danny… S’il te plaît…
Fais-moi une place
Au fond d' ta bulle
Et si j' t'agace
Si j'suis trop nul
Je deviendrai
Tout pâle, tout muet, tout p'tit
Pour que tu m'oublies
Danny ne savait plus où il était, il ne comprenait plus rien. L’instant d’avant il était empli d’une colère qu’il nourrissait au feu de son inquiétude et de sa frustration, et voici qu’il se sentait soudain comme un morceau de guimauve déposé sur la flamme d’un feu de camp : il fondait littéralement sous la douceur du ton, sous le miel des mots, ces mots qu’il n’arrivait pas vraiment à assimiler venant d’un être dont il était certain que s’il y avait une notion qui lui était étrangère c’était le romantisme.
Fais-moi une place
Au fond d' ton cœur
Pour que j' t'embrasse
Lorsque tu pleures
Je deviendrai
Tout fou, tout clown, gentil
Pour qu' tu souries.
Bordel ! Où avait-il perdu les pédales entre ce premier jour où il avait braqué son arme sur ce type et ce moment précis où il voyait les lèvres charnues dont il rêvait si souvent nuit après nuit à quelques centimètres de son visage ?
Finalement, il aurait mieux fait de suivre son premier instinct, quatre ans plus tôt et de descendre cette tête brûlée ! Certes il aurait sans doute fini en taule, mais au moins il aurait pu y dormir sans être hanté par deux yeux bleus, un corps de rêve et des lèvres qu’il rêvait présentement de dévorer de baisers !
Et ces mots… ces mots qui coulaient de ces lèvres-là et qui s’imprimaient dans son être, le faisant frissonner d’émotion et de crainte.
J' veux q' t'aies jamais mal
Q' t'aies jamais froid
Et tout m'est égal
Tout, à part toi
Je t'aime
Steve savait que ce moment était crucial. Il avait trop joué avec le feu et avait fini par s’y brûler. Cela faisait longtemps maintenant qu’il avait réalisé que le petit blond hargneux qui lui servait d’équipier était bien autre chose à ses yeux qu’un ami. Mais il y avait eu Rachel, Catherine et quelques autres qui les avaient rattachés l’un et l’autre à un semblant de « normalité » telle qu’on la pensait dans leur milieu. Et surtout, rien jamais n’avait pu le faire se sentir assez en confiance pour oser les mots qui peut-être feraient tout changer et basculer l’amitié en l’amour qu’il ressentait.
Mais à cet instant précis, sans qu’il ait rien prémédité, il savait que c’était quitte ou double : ou son instinct ne l’avait pas trompé et il allait enfin avoir la chance d’avancer vers cette autre relation dont il rêvait, ou il se plantait totalement et après lui avoir flanqué son poing dans la figure, son lieutenant allait quitter définitivement l’unité, comme il semblait en avoir l’intention.
Steve Mc Garrett ne pouvait pas, ne voulait pas imaginer l’équipe sans Danny, il savait que si celui-ci quittait le 5-0 il perdrait quelque chose d’infiniment précieux. Alors il se jetait à l’eau, avec cette même témérité qui avait provoqué la colère de son Danno.
Fais-moi une place
Dans ton av'nir
Pour que j'ressasse
Moins mes souvenirs
Je s'rais jamais
Eteint hautain lointain
Pour qu'tu sois bien
C’était là, maintenant ou jamais. Bien sûr, s’il avait pu établir des plans, il s’y serait pris totalement autrement : un petit restaurant romantique, une musique d’ambiance, un bon repas aux chandelles, un coucher de soleil sur la lagune… Il y avait tant de façons de se déclarer qui semblaient plus appropriées que là, dans ce bureau, en plein psychodrame.
Mais il savait que s’il ne choisissait pas ce moment, il n’y en aurait plus d’autre.
Fais-moi une place
Dans tes urgences
Dans tes audaces
Dans ta confiance
Je s'rai jamais
Distant, distrait, cruel
Jamais rebelle*
C’était donc si simple que ça finalement ? Des mots qui glissaient avec une facilité qu’il n’avait jamais connue, lui qui était plus renommé pour ses réactions physiques que pour sa verve littéraire, un regard accroché au sien où la colère avait fait place à un étonnement sans bornes qui tournait maintenant à l’émotion la plus pure ?
Il affermit sa prise sur le visage aimé, ses pouces vinrent essuyer deux perles qui glissaient sur les joues puis ses mains glissèrent vers la nuque, descendirent le long du dos et soudain Danny fut tout contre lui, tandis qu’il lui murmurait à l’oreille :
J' veux pas q' tu t'ennuies
J' veux pas q' t'aies peur
J' voudrais q' tu oublies
L' goût du malheur
Je t'aime
Il était bien, là, blotti contre le corps ferme de l’homme qu’il aimait. L’homme qu’il aimait… L’homme qu’il aimait…
Comment était-ce arrivé ? Par quelle facétie de la nature avait-il fini par s’éprendre d’un type qui le rendait complètement dingue et ferait de lui un veuf avant qu’il n’ait eu le temps de se sentir marié… Son esprit s’affola : quelques mots susurrés à l’oreille, une étreinte virile et le voilà qui déjà se voyait devant l’autel, passant un anneau au doigt d’un mec qui n’avait peut-être nullement l’intention d’aller jusque là.
Après tout, Steve était un SEAL, rien d’étonnant à ce qu’un petit cinq à sept avec un gars ne l’effraie pas. Il avait souvent imaginé que dans leur monde viril, il fallait bien que ces têtes brûlées laissent parler leurs instincts les plus basiques de temps à autre sous peine d’imploser ! Cela signifiait-il pour autant qu’ils étaient prêts à s’assumer aux yeux du monde et à vivre une petite vie pépère dans une jolie maison aux barrières blanches, à la pelouse bien tondue, avec un labrador et un chat angora ?
Une petite place
Ici, maintenant
Car le temps passe
À pas d' géant
Je me ferai
Tout neuf, tout beau, tout ça...
Pour être à toi
- Quoi ? Qu’est-ce qui te fait rire ? s’indigna Steve en entendant glousser son lieutenant, le nez enfoui dans sa poitrine.
- Rien… Une pensée qui me traversait la tête… Toi et moi… Une jolie petite maison et…
- Et pourquoi pas hein ? répliqua Steve en l’éloignant un peu pour planter son regard dans le sien. Tu crois que je plaisante peut-être ?
- Non… Je crois que tu es sérieux… Mais pour combien de temps ?
Il ne riait plus maintenant. Son cœur battait la chamade tandis que Steve se penchait sur lui en murmurant :
- Pour autant de temps que tu le voudras.
Puis leurs lèvres se joignirent et il ne pensa plus à rien qu’à cette bouche sur la sienne, cette langue qui vint à la rencontre de sa jumelle, ce goût d’interdit qui l’emporta. Bien sûr il y aurait beaucoup de choses à mettre au point mais pour le moment il voulait juste vivre l’instant présent.
Pour être à toi
FIN
Chanson de Julien Clerc
*Paroles originales : Pour q' tu sois belle