Bien que n'étant pas convaincue de la probabilité de ce couple, j'ai écrit cette petite songfic pour Stephanie, qui, elle, le trouve tout à fait plausible...
Préambule : Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de : Jeff Davis. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Je l’aime à mourir
Il le regardait tenir tête à ces hommes, crânement, sans montrer de peur. Peut-être n’avait-il pas peur d’ailleurs. Pourtant, lui qui le connaissait si bien, mieux que personne dans son entourage sans doute, il voyait à la crispation de ses mâchoires que son calme n’était qu’apparent. Il savait qu’au fond de lui il devait crever de trouille, tout comme il savait que ce n’était pas pour sa propre vie qu’il tremblait tandis qu’il négociait pied à pied pour que ces hommes relâchent au moins l’un de leurs otages.
Non, il était certain que celui pour lequel il s’inquiétait c’était lui, lui qui le regardait faire, tétanisé à la vue des armes braquées sur sa poitrine. Ah il était beau l’agent fédéral !
Et une fois de plus il se demanda ce qu’il faisait là, ce qui faisait que cet homme l’avait choisi, lui, parmi tous ceux qui l’entouraient bien plus beaux, plus habiles, plus courageux que lui. Malgré ce qu’on appelait son génie, il ne savait toujours pas pourquoi un jour les yeux bruns s’étaient posés sur lui avec un autre regard, ce regard où il avait lu de l’amour, ce regard qui, jour après jour, le faisait grandir, l’aidait à se révéler à ses propres yeux. Ce regard sans lequel il ne serait plus rien.
Moi je n'étais rien
Et voilà qu'aujourd'hui
Je suis le gardien
Du sommeil de ses nuits
Je l'aime à mourir
Vous pouvez détruire
Tout ce qu'il vous plaira
Il n'a qu'à ouvrir
L'espace de ses bras
Pour tout reconstruire
Pour tout reconstruire
Je l'aime à mourir
Près de neuf mois : le temps d’une grossesse, le temps d’une naissance, de sa naissance. Auprès de lui il avait appris à maîtriser ses angoisses, à accepter son corps grâce à ses caresses, grâce à ces instants où il le voyait s’abandonner totalement, se fondre en lui et devenir en ces instants cet homme plus fragile, nu au sens propre comme au figuré, qui lui donnait ce qu’il n’avait jamais donné à personne avant lui.
Et de son côté il s’était totalement offert, corps et âme, parce que, pour la première fois de son existence, il se sentait en vie. Et lorsqu’il reposait entre ses bras, il avait l’impression d’être le roi du monde.
Il a gommé les chiffres
Des horloges du quartier
Il a fait de ma vie
Des cocottes en papier
Des éclats de rire
Il a bâti des ponts
Entre nous et le ciel
Et nous les traversons
À chaque fois qu'il
Ne veut pas dormir
Ne veut pas dormir
Je l'aime à mourir
D’abord ils n’avaient rien dit : ils avaient gardé leur secret précieusement pour le protéger des horreurs qu’ils vivaient au quotidien. Mais on ne pouvait pas faire partie de cette équipe en vivant cachés. Il avait fallu moins de trois mois à leurs collègues pour découvrir leur liaison et il se souvenait encore avec émotion des sourires et des
encouragements qu’ils avaient alors reçus, lui qui avait pensé qu’ils se détourneraient avec dégoût ou colère.
Il avait encore bien des choses à apprendre sur les humains : il en avait trop vu le mauvais côté et avait fini par oublier qu’ils pouvaient aussi se montrer bons, compréhensifs, indulgents, généreux.
Auprès de son compagnon il réapprenait, jour après jour, à faire confiance, à se laisser aller, à cesser de se regarder dans le regard des autres. Désormais, le seul regard qui comptait pour lui c’était le sien, lorsqu’il le fixait avec cette infinie tendresse qui lui mettait les larmes au bord des cils. Il était son roc, son ancre, sa bouée… Auprès de lui il ne craignait même plus cette maladie qui courait peut-être dans ses veines.
Il a dû faire toutes les guerres
Pour être si fort aujourd'hui
Il a dû faire toutes les guerres
De la vie, et l'amour aussi
Jour après jour il avait découvert d’autres facettes de lui : son côté enfantin, ces éclats de rire qui n’étaient qu’à lui et un sourire magnifique qu’il arborait trop peu souvent au travail. Sous la carapace il avait découvert un océan de tendresse et d’amour et aussi cette fêlure qu’il ne laissait jamais personne entrapercevoir.
Il se souvenait de ce soir où il lui avait dit qu’il le rassurait autant qu’il pouvait le conforter. Jusqu’à cet instant il n’aurait jamais cru pouvoir être nécessaire à quelqu’un, et surtout pas à quelqu’un comme lui. En quelques secondes son monde avait basculé et de protégé il s’était aperçu qu’il pouvait être aussi le protecteur.
Depuis ce jour son amour pour lui n’avait fait que croître jusqu’à être douloureux parfois.
Il vit de son mieux
Son rêve d'opaline
Il danse au milieu
Des forêts qu'il dessine
Je l'aime à mourir
Il prend des cerfs-volants (1)
Qu'il laisse s'envoler
Il me chante souvent
Que j'ai tort d'essayer
De les retenir
De les retenir
Je l'aime à mourir
Combien de nuits avait-il passé à le regarder dormir, à admirer son profil redevenu vulnérable dans l’abandon du sommeil, à prendre sa main lorsque des cauchemars l’agitaient, à caresser doucement les cheveux drus pour l’apaiser tandis que son souffle courait sur son visage.
Il savait les démons qui venaient le hanter, les regrets qui l’assaillaient, les remords qui le torturaient. Il savait ses moments de doute et ses moments de joie. Il pouvait désormais lire dans ses prunelles la moindre étincelle de gaité ou de crainte.
Ils étaient un couple, un couple solide, un couple uni, un couple qui pensait avoir la vie devant lui, partager les années à venir parce qu’il avait acquis la certitude qu’avec ce qu’ils avaient traversé ils avaient largement mérité leur part de bonheur. Lui d’habitude si pusillanime, si réservé, avait fini par lâcher totalement prise : il savait qu’avec cet homme là il ne risquait rien. Ils s’étaient ouvert leurs jardins secrets, avaient parlé sans tabous, sans réserve et chacun savait l’autre parfois mieux que lui-même.
Pour monter dans sa grotte
Cachée sous les toits
Je dois clouer des notes
À mes sabots de bois
Je l'aime à mourir
Je dois juste m'asseoir
Je ne dois pas parler
Je ne dois rien vouloir
Je dois juste essayer
De lui appartenir
De lui appartenir
Je l'aime à mourir
Pourquoi la vie leur faisait-elle ce coup-là ? Ils étaient venus là pour choisir les alliances qu’ils échangeraient lors de leur union et ces hommes étaient entrés, visiblement en manque et d’autant plus dangereux à causede cela. Ils étaient cinq dans la boutique : le directeur de la bijouterie et sa vendeuse, une cliente d’une cinquantaine d’années et eux deux. Les trois hommes les avaient pris totalement par surprise, mais le propriétaire avait eu le temps de déclencher l’alarme et la prise d’otages était inéluctable.
Il avait tout de suite compris que son amant ne resterait pas les bras croisés à attendre que la situation se délite, d’une manière ou d’une autre. Il n’était pas de ceux qui attendent, mais de ceux qui montent au créneau, qui agissent, qui essaient d’arranger les choses.
Il a dû faire toutes les guerres
Pour être si fort aujourd'hui
Il a dû faire toutes les guerres
De la vie, et l'amour aussi
Et à cet instant précis, tandis que la colère du junkie semblait monter, il savait que son compagnon luttait pour lui avant tout, pour le sortir de là. C’était pour cela qu’il venait de s’identifier en sortant son badge, sans toutefois signaler que l’homme qui l’accompagnait était lui aussi du F.B.I.
Il savait aussi qu’il n’y avait pas d’autre choix : les preneurs d’otages étaient prêts à tuer la jeune vendeuse et il ne pouvait pas laisser faire cela, il en était tout simplement incapable. Dans le regard qu’ils avaient échangé, juste quelques secondes avant qu’il ne sorte son badge, il lui avait dit tout ce qu’il y avait à savoir :
- Je t’aime… Pardonne-moi. Je n’ai pas le choix. Je t’aime.
Il savait…
Il savait avant de voir le rictus de colère de l’homme au-delà de tout raisonnement, il savait avant de voir le coup de crosse brutal qui projetait son compagnon à terre, il savait avant de voir l’arme se diriger vers lui.
Alors il se jeta en avant, sans réfléchir, emporté par un élan auquel il n’aurait pas pu résister, quand bien même l’aurait-il voulu.
Il sentit les balles pénétrer dans son corps et s’écrasa contre lui, pour une dernière étreinte : pouvoir une fois encore respirer son odeur, entendre son cœur battre, écouter son souffleà son oreille… Un ultime cadeau avant de fermer les yeux sur les cris, la fumée, le bruit…
Moi je n'étais rien
Et voilà qu'aujourd'hui
Je suis le gardien
Du sommeil de ses nuits
Je l'aime à mourir
Vous pouvez détruire
Tout ce qu'il vous plaira
Il n'aura qu'à ouvrir
L'espace de ses bras
Pour tout reconstruire
Pour tout reconstruire
- Non ! Spence ! Non !!!!
Hotch s’était relevé, sans se soucier du sang qui coulait de sa tempe, sans s’arrêter à la douleur qui taraudait sa tête. Il saisit le corps de son amant et se mit à le bercer, caressant le visage trop pâle en pleurant :
- Ouvre les yeux… Je t’en supplie… Je t’en conjure… Tu n’as pas le droit de me laisser. J’ai besoin de toi…
Commes’il ne pouvait pas résister à cet appel, Spencer souleva les paupières, dévoilant un regard assombrit par la douleur. Un peu de sang perlait à ses lèvres et sa main restait crispée sur son côté ensanglanté :
- Tu n’as rien ? souffla le génie.
- Non… Je vais bien… Grâce à toi. Tiens bon mon amour… Tiens bon… Tu vas t’en sortir.
Il sourit.
A cet instant il se fichait de savoir s’il allait vivre ou mourir : son amant lui vivrait et c’était tout ce qui importait. Il avait accompli ce pour quoi il était venu au monde : il avait sauvé celui qui avait donné un sens à sa vie, il avait payé son dû.
- Je t’aime, gémit-il, embrasse-moi.
Et au moment où leurs lèvres s’unissaient, ses yeux se refermèrent : il était tranquille, tout irait bien.
Je l'aime à mourir
FIN
Chanson de Francis Cabrel
(1) : paroles originales : Elle porte des rubans.
Toute la chanson a été réécrite au masculin bien sûr.