Voilà... Comme il n'est bonne compagnie qui ne se quitte, nous arrivons au terme de cette petite histoire... Merci à vous de l'avoir suivie.
Chapitre 9
- Alors ?
L’homme regardait le couple avec un sourire. Sa longue expérience lui disait que la victoire ne faisait aucun doute. Il n’y avait qu’à regarder l’air émerveillé de la femme, le sourire à la fois ravi et attendri de l’homme pour comprendre que cette maison était ce qu’ils recherchaient pour abriter leur bonheur. Et, foi d’agent immobilier, du bonheur ils en avaient à revendre, eux et leurs deux charmants bambins qu’on entendait rire dans le jardin clos.
- Alors… où signe-t-on ? répliqua l’homme, lui confirmant son impression.
Et quelques heures plus tard, une Pénélope émue et un Derek euphorique recevaient les clés de cette maison qui signait une nouvelle étape dans leur vie : depuis le temps qu’ils cherchaient un nid pour abriter leur tribu, ça y était enfin ! A trente minutes à peine de Quantico, dans un quartier paisible et fleuri, ils allaient pouvoir démarrer une nouvelle vie, prendre de nouveaux repères et surtout cultiver jour après jour ce bonheur qui était le leur.
Lorsqu’ils avaient traversé le quartier, à la suite de l’agent immobilier, ils s’étaient regardés, tous les deux conquis par son calme et les jolies petites maisons bordées de jardins bien entretenus : mais ils s’étaient interdit d’avoir trop d’espoir. Il y avait maintenant six semaines qu’ils cherchaient vraiment et plusieurs fois déjà un quartier leur avait plu, la déception n’en avait été que plus grande lorsqu’ils avaient visité une maison qui ne correspondait pas à leurs attentes ou étaient bien trop chère pour leur budget. Même en ayant vendu leurs appartements respectifs, ils n’avaient quand même pas une somme astronomique à mettre dans l’acquisition.
Le quartier leur plaisait, il était assez proche de leur travail pour ne pas allonger leurs journées déjà bien remplies, un jardin d’enfant et une école primaire se trouvaient à moins de trois rues de la maison qu’ils allaient visiter et celle-ci avait été un vrai coup de cœur, leur faisant sur le champ oublier les quelques déceptions connues lorsqu’ils avaient cru avoir trouver leur bonheur et que, pour une raison ou une autre, la vente ne s’était pas conclue.
Sur deux niveaux, la maison était grande, bien exposée, très ensoleillée. Une grande pièce à vivre et une cuisine typiquement américaine dans son prolongement occupaient les deux tiers du rez-de-chaussée, complété par deux pièces plus petites donnant l’une sur l’avant et l’autre sur l’arrière de la bâtisse et séparées par une salle de bain et toilettes ayant une ouverture sur chacune des pièces mais aussi sur le petit couloir séparant cet espace de la pièce à vivre dans laquelle, au premier coup d’œil, Pénélope s’était vue s’affairer, entourée de sa tribu.
Le premier étage était constitué de quatre autres pièces et d’une seconde salle de bain. Plusieurs grands placards judicieusement placés dans chaque pièce indiquaient que les précédents occupants avaient parfaitement su optimiser l’espace nécessaire à leur famille de cinq enfants, désormais grandis et partis aux quatre coins du pays, ce qui avait amené les parents à prendre une retraite bien méritée au soleil de Floride, d’où la vente de ce bien magnifique qui faisait saliver d’envie le jeune couple.
La maison était en outre flanquée d’un grand garage et d’un grand jardin ombré d’un magnifique chêne et de quelques arbustes judicieusement disposés, fleuri de massifs entretenus amoureusement par le couple. La première fois qu’ils avaient vu la maison, Derek et Pénélope avaient su qu’ils la voulaient, mais étant donné sa superficie et son environnement, ils avaient aussi pensé qu’ils n’auraient jamais les moyens de se l’offrir. Pas question pour eux de s’endetter sur des années : ils avaient trois enfants à élever et devaient penser à leur avenir, à leurs études futures pour lesquelles trois comptes étaient déjà ouverts alimentés par une rente mensuelle en plus des dons faits par leurs amis lors de leur mariage sept semaines plus tôt.
Ca avait été le moment parfait dont ils rêvaient tous les deux : leurs amis, la famille de Derek et leurs enfants. Rossi et Prentiss, en organisateurs de cérémonie, avaient été parfait et ils avaient été émus aux larmes de tout l’amour qui les avait environnés ce jour-là. La mère de Derek était déjà folle des trois enfants et le petit Terrence avait trouvé une place particulière dans son cœur tant il ressemblait à ses yeux à son Derek au même âge, un Derek que l’enfant avait définitivement adopté et qu’il suivait comme son ombre. Pour la première fois de sa jeune vie, le garçonnet s’était aperçue qu’un homme pouvait être doux, tendre et attentif et qu’il pouvait aller vers lui sans risque d’être rabroué ou frappé et désormais son nouveau père était son idole. C’était amusant de le voir se disputer avec sa petite sœur pour obtenir l’attention du chef de famille qui trouvait toujours le moyen de contenter les deux petits assoiffés de tendresse, quand bien même son métier l’emmenait souvent loin d’eux, parfois pour plusieurs jours.
C’est aussi à cause de ce métier que les deux tourtereaux se refusaient à s’endetter pour de longues années : qui savait si un jour la vie de Derek ne serait pas fauchée par l’un des monstres qu’il poursuivait quotidiennement ? Nouveau père, il avait proposé à sa dulcinée d’abandonner son poste pour un poste plus calme d’encadrement, sachant qu’un agent de sa trempe serait le bienvenu dans le staff d’instructeurs de Quantico ou comme chef de section dans une agence quelconque, quitte à déménager s’il le fallait. Mais Pénélope, malgré la peur qu’elle pouvait ressentir pour lui, savait qu’il ne serait pas entier sans ce travail si particulier où il se sentait exister, où il savait qu’il était utile et que son action sauvait de nombreuses vies. Derek était un excellent profileur et vouloir le priver de ce pan de son existence aurait été égoïste. De toute façon, avait-elle fini par ajouter, on avait vu des comptables passer sous des bus, des employés de banque mourir dans un braquage et nul n’était à l’abri de rien, où que ce soit. Au moins il savait que son travail était dangereux et il agissait en conséquences, et puis il n’était pas seul : l’équipe était là où chaque membre veillait sur les autres. Elle avait ajouté que l’exemple tragique de Hotch prouvait que, malheureusement, ce n’était pas forcément celui qui paraissait le plus exposé dans le couple qui devenait victime d’un criminel.
Derek avait donc conservé son poste mais le couple savait que du jour au lendemain Pénélope pourrait se retrouver seule à veiller sur les enfants, c’est pourquoi il n’était pas question qu’elle se retrouve seule à payer des mensualités auxquelles elle ne pourrait pas faire face malgré la pension que lui verserait le FBI s’il tombait dans l’exercice de son devoir. Alors cette maison, pour magnifique qu’elle soit, était sans doute hors de leur portée.
Mais leur chance avait voulu que le couple soit présent le jour de la visite. La femme était tombée sous le charme des bambins qui lui rappelaient les siens et, bizarrement, le farouche Terry s’était tout de suite trouvé en confiance avec elle. C’est ainsi qu’elle avait appris une partie de l’histoire, comprit que ces enfants méritaient de trouver enfin la stabilité et que les parents qui les avaient choisis méritaient qu’on les aide dans leur quête d’un abri où leurs petits pourraient finir de panser leurs plaies. L’homme de son côté avait été sensible au métier exercé par les visiteurs : l’un de leurs enfants s’était trouvé piégé un jour dans une prise d’otage dans la banque où il était stagiaire et il avait eu la vie sauve grâce au négociateur du FBI qui avait dénoué la situation. Alors quand le couple avait vu le désappointement se peindre sur le visage de leurs acheteurs potentiels à l’annonce du prix de vente, la même pensée avait traversé l’esprit de l’homme et de la femme : donner une chance à cette famille d’être aussi heureuse dans leur maison qu’eux-mêmes l’avaient été.
Et quand, après quelques jours de réflexion, Pénélope et Derek étaient arrivés avec une proposition d’achat calculée au plus juste de leurs revenus, mais inférieure de plus de quinze mille dollars à la somme demandée, pensant n’avoir aucune chance mais désireux de ne pas laisser passer celle-ci le cas échéant, ils avaient eu l’immense surprise et la joie tout aussi intense d’apprendre que le couple avait baissé le prix de façon significative. Désormais la maison était dans leurs moyens.
Et maintenant la maison leur appartenait. Leur maison pour leurs enfants… Ces enfants qui désormais portaient leur nom. Shawn Dickson n’avait pas eu le loisir de voir se dérouler le procès en appel de la décision concernant ses enfants. Un ex flic en tôle ne fait souvent pas de vieux os et il n’avait pas dérogé à la règle : quatre jours après le jugement confiant ses enfants à Pénélope et Derek, on l’avait trouvé dans les douches, baignant dans son sang, la gorge ouverte d’une oreille à l’autre. L’enquête pour découvrir le coupable n’avait toujours pas abouti et les enquêteurs savaient qu’elle n’aboutirait sans doute jamais, sauf par hasard ou si l’un des détenus venait à dénoncer le meurtrier soit par vengeance, soit pour obtenir un accord suite à une incartade pouvant lui coûter cher.
La réaction de Derek et Pénélope en apprenant la nouvelle avait d’abord été le soulagement : personne ne viendrait plus leur disputer les enfants. Puis ils avaient pensé à ceux-ci : comment leur apprendre qu’après leur mère ils venaient de perdre leur père ? Ils avaient longtemps hésité à leur apprendre la vérité, ou du moins à Terrence et Laureen. Mais ils s’y étaient résolus, ne voulant pas bâtir leur vie future sur des non-dits. Laureen n’avait pas semblé vraiment comprendre ce dont il s’agissait, fillette qui allait sur ses trois ans maintenant et pour laquelle sa famille c’était désormais cette jolie maman blonde toujours souriante et ce papa si beau et si gentil. Terrence, lui, s’était contenté de dire :
- Alors, il ne nous prendra plus jamais ?
- Non mon ange, personne ne pourra plus jamais nous séparer, avait répliqué Pénélope.
L’enfant s’était plongé dans ses pensées, puis, le regard brillant, il avait regardé Derek et demandé :
- Alors… Je peux t’appeler papa maintenant ?
Ca avait été tout l’éloge funèbre de Shawn Dickson qui était mort comme il avait vécu : dans la violence et la haine. Derek était allé à son inhumation : il fallait qu’il voie où l’homme reposait parce que peut-être qu’un jour les enfants éprouveraient le besoin de se retourner sur leur histoire et qu’il se refusait à leur en cacher le moindre pan. Il avait alors rencontré le père de Shawn Dickson, Roy, un ancien agent d’assurance, fragile et doux, qui avait vécu dans la peur de ce fils qui trop vite avait pris le dessus sur lui, protégé et adulé par une mère qui s’était toujours rangé de son côté. Il pleurait l’enfant qu’il avait tenu dans ses bras, mais il déplorait le mal que celui-ci avait fait autour de lui. Et quand Derek lui avait dit que, s’il le souhaitait, il aurait sa place dans la vie de leurs enfants, il avait simplement fondu en larmes avant de répliquer que ce n’était peut-être pas la meilleure des choses à faire pour les petits qui ne le connaissaient pas. Fallait-il vraiment leur rappeler qu’ils avaient eu un autre père qui s’était montré indigne de la chance qu’il avait ?
Et Roy Dickson n’avait plus donné signe de vie, mais le couple lui avait envoyé des photos des enfants lors de leur mariage et lors de l’adoption plénière, qu’ils avaient entrepris dès l’annonce du décès du père naturel, et qui leur avait été accordée sans aucun problème. Désormais les trois enfants portaient le nom de Morgan, tout comme Pénélope.
Maintenant la famille Morgan venait de trouver la maison dans laquelle elle vivrait heureuse.
- Comment fait-on ? On installe les chambres à l’étage et un bureau et une salle de jeu en bas ? Ou un bureau et une chambre d’amis ? questionna Derek tandis qu’ils passaient de pièce en pièce en imaginant leur prochain aménagement.
Ils étaient au premier étage et, ouvrant la porte le plus près de l’escalier il reprit :
- Cette chambre serait parfaite pour Terry. En face nous mettrions la nôtre et Camy à côté de nous. Lily en face de lui…. Elle serait la plus proche de la salle de bain ce qui n’est pas plus mal à son âge…
- Non… Nous… On pourrait s’installer en bas. On achètera un baby phone pour entendre Camy.
- En bas ?
Il était étonné. Il avait pensé que son épouse voudrait s’installer au plus près de leurs enfants.
- Oui, les parents en bas et on laisse le haut pour les enfants ! Et on fait un bureau chambre d’amis dans la pièce restante.
- Mais… Il y aura une pièce inoccupée en haut ! Pourquoi ne pas y mettre la chambre d’amis ? objecta-t-il.
Elle sembla hésiter, se mordant la lèvre dans un tic nerveux tout en ayant du mal à le regarder et il sentit son cœur se gonfler de crainte : quelque chose tracassait visiblement Pénélope et si elle n’osait pas lui en parler à cœur ouvert ça n’augurait rien de bon.
- Qu’est-ce qu’il y a ma princesse ? Pourquoi es-tu si nerveuse ? Tu sais que tu peux tout me dire.
- Je sais mais… Tu as déjà tant fait pour nous…
- Stop ! l’interrompit-il. Je ne veux pas t’entendre parler comme ça. Je n’ai rien fait pour vous ! J’ai fait tout cela pour moi aussi. Je t’aime comme un fou et j’adore nos enfants ! Je n’ai jamais été aussi heureux que depuis que je partage ta vie et celles de nos petits ! Alors quoi qu’il se passe, quoi que tu aies à me dire, ne pense jamais que tu m’es redevable de quoi que ce soit !
Elle hocha la tête puis s’approcha de lui et posa ses mains sur sa poitrine :
- La quatrième chambre… On va en avoir besoin…, murmura-t-elle.
- Oui… Que veux-tu en faire ? Un dressing ? Une salle de jeu ?
- Non… Une chambre d’enfant.
Il mit un instant à comprendre. Au moment où il ouvrait la bouche pour objecter, la lumière se fit dans son esprit. Il recula d’un pas et la regarda intensément :
- Une chambre d’enfant ? Tu veux dire… Une autre chambre ?
Elle osa enfin affronter son regard, et, pleine d’appréhension elle murmura :
- Oui…, puis elle enchaîna très vite : Je suis désolée ! Vraiment ! Je ne l’avais pas prévu ! Je suis stupide ! J’aurais dû faire attention mais… Il est là maintenant et je crois que je l’aime déjà alors si…
Il lui posa la main sur la bouche pour la faire taire :
- Chut… Tu n’es pas stupide et tu n’as pas à être désolée ! C’est une merveilleuse nouvelle ! Un bébé ! Un bébé de toi et de moi !
- C’est vrai ? Tu n’es pas fâché ? Après tout, nous avons déjà trois enfants alors…
- Alors ce quatrième sera tout autant bienvenu que ses aînés ! Nous allons avoir une magnifique famille ! Je suis le plus heureux des hommes.
Il la serra contre lui et l’embrassa avec tout l’amour qu’il ressentait pour elle. Elle lui rendit son baiser avec usure et le désir grandit entre eux tandis que leurs langues s’enlaçaient et que leurs corps se collaient l’un à l’autre.
Une cavalcade et des cris joyeux les appelant les forcèrent à se séparer, les yeux brillants de joie et d’amour. Ils descendirent vers Laureen et Terrence qui se jetèrent dans leurs bras dès qu’ils les aperçurent.
- Quand est-ce qu’on s’installe ? questionna le garçonnet.
- Oui ? Quand on se tale ? demanda sa sœur en écho.
- Dès qu’on aura emballé toutes nos affaires, répliqua Derek.
- Alors vite ! Vite ! On va tout emballer !
Les deux enfants saisirent les mains de leurs parents et les entraînèrent au dehors. Ils les suivirent en riant, s’arrêtant le temps de refermer la porte de leur maison. Puis ils reprirent la voiture et rentrèrent à l’appartement où la fidèle Margaret gardait Cameron.
Quelques jours plus tard, profitant des congés accordés, le couple s’installait dans sa nouvelle demeure et le soir même un repas de famille les réunissait autour de la grande table. A la fin du repas, Pénélope alla coucher le bébé et quand elle redescendit elle s’arrêta un instant sur la dernière marche pour profiter du spectacle qui fit gonfler son cœur de joie et de tendresse : blottis contre leur père, les deux enfants s’endormaient, épuisés par le déménagement et l’excitation du changement. Derek, sentant le regard de sa femme sur lui se retourna et lui sourit. Ils se comprenaient sans se parler : à cet instant précis leur nouvelle vie commençait et ils feraient tout pour qu’elle soit magnifique.
FIN