Reclassement de l'anniv' de Tessqueen.
Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de : Erik Kripke & Robert Singer. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
S’aimer est interdit
La vie est tout de même bizarre, songeait Dean Winchester. Vous cherchez sans l’avouer quelque chose qui vous manque et quand vous le trouvez on dirait que toutes les forces de la création s’unissent pour vous l’arracher.
Mais il ne plierait pas. Jamais ! Il se battait depuis assez longtemps maintenant pour n’avoir pas peur de lutter, quand bien même les forces étaient inégales, quand bien même on prédisait sa défaite.
Il ne baisserait pas les bras, parce que cette fois-ci s’était personnel.
On croit que rien n'est jamais plus fort que l'amour
Que c‘est un don que le ciel nous a fait un jour
Un bien plus grand que tous les trésors de la terre
On croit qu'on peut le garder rien que pour soit
Comment penser que quelqu'un puisse le défaire
Et oublier à qui l'on tient quand on le perd.
La mort est tout de même bizarre, songeait Castiel. Elle devrait vous libérer du poids des interdits et pourtant…
Pourtant même dans l’autre monde il y avait des règles, des diktats. Même lorsque votre âme aurait dû être libre on l’enfermait dans un carcan.
Mais cette fois-ci il n’avait pas l’intention d’écouter. Ce vaisseau qu’il avait emprunté il ne permettrait pas qu’il reste une coquille vide et froide. Ce cœur qu’il sentait battre, il voulait lui permettre de battre encore et encore, y compris et surtout pour des raisons que l’on disait n’être pas les bonnes.
Il n’abandonnerait pas, parce que cette fois-ci c’était son choix.
Que j'ai ou pas vraiment le droit
Même loin de toi je serais là
Fait-on les mêmes promesses chaque fois ?
La vie est une vaste fumisterie : elle vous donne pour mieux vous reprendre, elle vous sourit pour mieux vous trahir, elle vous dorlote pour mieux vous faire souffrir.
Du plus loin qu’il se souvenait il avait été seul. Oh ! Nul doute que s’il avait affirmé ceci à haute voix son cher petit frère se serait insurgé contre sa déclaration. Mais pourtant c’était le cas. Il aimait Sam, de tout son cœur de grand frère, mais jamais celui-ci ne l’avait vraiment compris, parce qu’il ne le connaissait pas vraiment. Il voyait en lui le grand frère protecteur qui l’avait arraché aux flammes lorsqu’il n’était encore qu’un enfant, celui qui vous console, celui qui vous écoute…
Il y avait tant de choses que Sam ignorait de lui, tant de choses que Castiel, lui, en si peu de temps, avait compris. Ces affrontements entre eux n’étaient que les prémices de la passion qui déjà les poussait l’un vers l’autre.
Alors non… Il n’accepterait pas de repartir de son côté de nouveau seul, de nouveau vide.
S'aimer pour nous est interdit
Impossible amour
Mais amour infini
S'aimer pour nous n'est pas permis
Indicible est l'amour
C'est ce qu'ils nous auront appris
La mort est une tromperie : elle vous enveloppe pour mieux vous abandonner, elle vous éloigne pour mieux vous rapprocher, elle vous anesthésie pour mieux vous éveiller.
Depuis qu’il était devenu cet être immatériel, il y avait une éternité de cela, il en avait trop vu sans en avoir jamais assez. Il avait participé à bien des combats, soutenu bien des causes, il s’était érigé juge avant que d’être bourreau, avait cessé de se poser des questions sur les moyens de défendre la cause du Bien, utilisant s’il le fallait les mêmes armes que leurs adversaires.
Il avait cessé d’être un être à part entière pour n’être plus que le bras armé de son Père, porteur de vie et de mort, messager tyrannique parfois qui ne se permettait pas le moindre doute.
Mais le destin, dans un pied de nez dont il était familier, prenait aujourd’hui sa revanche et les interrogations lui venaient maintenant en foule, par le biais de ce corps qui lui faisait ressentir des émotions oubliées depuis trop longtemps. Pouvait-il braver l’interdit ? Pouvait-il risquer ce qui lui était le plus cher ? Pouvait-il mettre la vie de cet homme qu’il n’aurait jamais dû regarder en danger ?
Si j'avais su que c'était joué d'avance
Si j'avais su que j'allais te faire souffrir
Avec le fer encore chaud de nos alliances
Comment savoir d'où vient le mal, d'où vient le pire
J'aurais fait le premier pas vers toi
Je n'aurais pas eu peur de ça
Fait-on les mêmes erreurs chaque fois ?
La vie est une maîtresse que l’on subit ou que l’on domine. Il n’avait jamais subi et ne comptait pas commencer aujourd’hui.
Cet amour il ne l’avait pas demandé, il avait même lutté de toutes ses forces pour l’extirper de son cœur. Mais lorsque deux âmes sœurs se rencontrent, rien ne saurait leur interdire de se rejoindre, ni la vie, ni la mort, ni surtout une bande d’emplumés rétrogrades qui ont oublié qu’on est plus forts à deux, que lorsque quelqu’un compte pour vous, vous vous battez mieux et que le guerrier a besoin d’un corps à aimer pour se ressourcer.
Qu’importait si ce corps n’avait rien des courbes féminines auxquelles il était habitué de longue date ? Qui avait le droit de proclamer que l’homme ne doit aimer que la femme et que l’ange lui, ne doit pas aimer du tout ? Une connerie au moins aussi énorme que la croyance populaire colportant que les anges n’ont pas de sexe. Parce qu’à ce niveau-là, pardon, mais…
Mais… Là n’était pas l’intérêt, même si ce n’était pas anodin. Ce qu’il voulait à cet instant, ce qu’il demandait, c’était le droit de vivre son amour, sans que quiconque vienne tenter de l’en empêcher pour des raisons aussi stupides qu’injustes.
S'aimer pour nous est interdit
Impossible amour
Mais amour infini
S'aimer pour nous n'est pas permis
Indicible est l'amour
C'est ce qu'ils nous auront appris
La mort est une cavale que l’on maîtrise ou qui s’emballe. A cet instant il avait l’impression d’être emporté au rythme d’un galop échevelé qu’il ne dominait pas.
Pourtant il savait qu’il pouvait, qu’il devait reprendre les rênes. Là, devant ce tribunal fait de ses frères, il devait trouver les phrases pour attendrir, menacer, gronder, enjoindre, ordonner… Il n’avait jamais été très disert, pourtant soudain les vannes s’étaient ouvertes en grand et les mots venaient sans effort.
Non, il ne refusait pas d’obéir à leur père, mais non, il ne renoncerait pas à cet amour qui éclairait sa vie d’une nouvelle aube, qui éclairait sa mort d’un nouvel espoir, qui éclairait sa lutte d’une autre lumière. Il ne se battait plus pour de grands idéaux sans limites et sans perspective : il se battait pour un être de chair et de sang que son âme avait retrouvé après une éternité de solitude. Il se battait pour proclamer son droit à une part de ce bonheur universel qu’il défendait.
A quoi bon lutter pour un monde meilleur quand on sait que son monde sera toujours vide et que jamais personne ne posera sa tête sur votre poitrine juste pour écouter le son de votre cœur, que personne ne vous prendra la main juste pour enlacer ses doigts aux vôtres et qu’aucun baiser jamais ne fera frissonner vos lèvres.
Pourquoi devrait-il faire un choix ?
On peut partir sans ne jamais rien quitter
On peut rester sans ne jamais rien oublier
On peut s'aimer au point de s'en aller
S'en aller
Ils étaient là, debout devant leur tribunal : le chasseur et l’ange, deux êtres qui n’avaient pas le droit de s’aimer d’amour et qui pourtant bravaient l’interdit.
Ils étaient là parce qu’ils voulaient avoir le droit eux aussi de partager les moments de doute, de tendresse, de remords, de violence… Ils voulaient pouvoir déposer leurs fardeaux lorsqu’ils leur pesaient trop. Ils voulaient avoir un but, savoir qu’au terme des batailles ils auraient eux aussi leur havre où se ressourcer, un endroit rien qu’à eux où ils auraient le droit d’espérer, le droit d’être heureux, le droit de s’aimer.
Ils étaient là, le chasseur et l’ange, l’humain et le messager, eux que tout séparait et que la force de l’amour avait indissociablement unis. Ils étaient là pour proclamer qu’ils vivraient ensemble ou qu’ils mourraient ensemble mais que jamais ils n’accepteraient de reprendre chacun ce chemin solitaire qui avait pris fin le jour où ils s’étaient retrouvés.
S'aimer pour nous n'est pas fini
Impossible amour
Est amour infini
S'aimer pour nous est interdit
Invincible est l'amour
C'est ce qu'ils nous auront
C'est ce que nous aurons appris
Appris
Il y avait eu un orage : colère divine, colère du ciel, colère de ceux qui ne sont pas capables de comprendre la force d’un amour.
Qu’importait…
La mort et la vie avaient passé un pacte par l’entremise de leurs mains entrecroisées. Ils étaient chacun un versant de l’univers, alternativement le bien ou le mal, la lumière ou l’obscurité.
Ils étaient deux âmes qui n’en formaient plus qu’une : l’ange déchu et le chasseur blessé…
Main dans la main ils regardaient le ciel qui se dégageait : les nuages noirs laissaient place à un soleil, certes timide, mais qui annonçait de beaux jours à venir.
Ils se détournèrent sans désunir leurs doigts et marchèrent vers leur cabane, leur chez eux, leur nid…
Ils avaient gagné le droit de s’aimer. Le reste, tout le reste, était sans importance.
Fin
Chanson extraite de la comédie musicale Le roi soleil