Cadeau destiné à Catouchka l'an passé.
Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de : Ann Donahue & Anthony E. Zuiker. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Je fais semblant
Perdu dans ses pensées, Danny Messer faisait le point. Le point sur lui, sur sa vie, sur ses envies, sur ses besoins.
Il est de ces moments où l’humain se replonge dans le passé, appréhende l’avenir pour habiller le présent de couleurs qui lui conviennent. Il est de ces moments où il est nécessaire de se rappeler d’où on vient, d’imaginer où l’on va pour comprendre comment poser ses pas.
Il repassait dans sa tête cette enfance entre violence et confiance, guidé par ce grand frère qu’il avait fini par rejeter pour mieux retrouver ensuite, trop tard… Il revoyait ses amis d’alors, leurs jeux, leurs joies, leurs peines…
Il défilait son passé comme on visionne un film.
La photo de classe
Le sourire rose d´une fille qui me dépasse
Le petit air malin qui suit mes grimaces
La vie qui trace
Les souvenirs qui n´ont plus assez de place
Et les grands airs qui me font boire la tasse
Le temps qui passe
Il se souvenait… Il se souvenait et il réalisait qu’il avait menti, dès les premiers moments où il avait perçu la différence entre lui et les autres.
Il s’était inventé la famille idéale, le père bienveillant, mais très occupé par son travail, la mère aimante dévouée à sa famille, le grand frère veillant sur lui, la sœur parfaite…
Il avait même fini par croire lui-même à ses histoires, croire qu’il était un gamin comme les autres avec un avenir devant lui qui ne serait pas bordé par les barreaux d’une prison. Il avait cru qu’un jour il serait quelqu’un de bien, quelqu’un qu’on aimerait, quelqu’un qui aimerait, quelqu’un qui aurait une raison de vivre, de se lever jour après jour.
Je fais semblant
Je joue au grand, je m´invente des papas
Des grands, des forts, à qui j´ressemble pas
Mais qui me donnent la force de croire en moi
Je fais semblant
Je suis tremblant à l´idée qu´on ne m´aime pas
Je serre maman qui me prend dans ses bras
Je fais semblant que rien ne m´arrivera
Ne m´arrivera
Adolescent il avait collectionné les aventures, certain, chaque fois que c’était la bonne, celle qui saurait faire de lui l’homme qu’il rêvait d’être au plus profond de son être et dont, à chaque fois, il lui semblait s’éloigner un peu plus.
Il s’était mis à traîner en suivant son grand frère, avait attiré l’attention des flics sur lui, se moquant finalement de suivre la voie que, petit, il était déterminé à fuir.
Il s’était même pris pour un musicien à une époque : guitare en bandoulière, cheveux longs coiffés à la diable, il attirait l’attention des filles comme le miel attire les mouche et il faisait son choix… Le choix du roi.
Parce qu’il était un roi… Un roi que la première princesse, la seule qu’il aurait aimé gardée, avait regardé un jour de haut en bas avant de tourner les talons.
Cette blessure-là, il la sentait encore.
Premiers frissons
On apprend la guitare sous l´édredon
Sa mère n´veut pas de moi, c´est un peu con
Les nuits s´en vont
Et ma première histoire monte dans l´avion
Mes larmes se mêlent au Brésil de Milton
Première chanson
Déjà il se cachait la vérité, déjà il dissimulait ses émois… Déjà dans la chaleur de la nuit, dans la moiteur des draps, il lui arrivait à rêver à d’autres formes, à d’autres étreintes, et déjà il se jetait à corps perdu dans d’autres bras pour se convaincre que ce n’était pas lui, que ce n’était pas « ça ».
Entre impudence et provocation, il avait traversé l’adolescence du moins mal qu’il avait pu, du mieux qu’il avait su. Nul doute que sans son frère, sans ce qu’il avait fait pour lui, sa vie aurait pris un tout autre tournant. Longtemps il avait porté cette blessure, cette culpabilité de n’avoir rien dit, de n’avoir rien fait, d’avoir accepté….
Et puis… Il avait repris le cours d’une existence qui n’était pas réelle.
Je fais semblant
Je joue au mec à qui on ne la fait pas
Je suis absent, elle ne reviendra pas
J´embrasse des lèvres que je connais pas
Je fais semblant
Je prends ma voix sans vie à bout de bras
J´enfonce les portes où l´on veut bien de moi
Ca fait sourire, on dit qu´on m´rappellera
On m´rappelle pas
Il y avait eu Lindsay… Lindsay et sa peau de lait, Lindsay et son sourire magnifique…
Elle était ce qu’il avait de plus précieux, ce qu’il avait de plus vrai. Auprès d’elle il pouvait enfin se montrer sous son vrai jour, être ami, amant… Devenir quelqu’un de meilleur par la magie de ses yeux bleus.
Lindsay avait été sa bouffée d’oxygène, son passeport pour la vie qu’il s’était construite. Elle lui avait fait ce merveilleux cadeau, Lucy, la lumière de sa vie, la prunelle de ses yeux.
Et puis un jour
Des mains se tendent pour m´offrir de l´amour
Des voix s´unissent pour guider mes détours
Le monde autour
Ceux qui m´aiment, les autres qui comptent les jours
Ceux qui me font espérer en "toujours"
Trop d´monde autour
Père avant que d’être amant, attentif et scrupuleux, il s’était petit à petit enfermé dans cette vie. Il était heureux, oui juste heureux… Il était enfin arrivé au terme de sa quête.
Ca c’était pour les autres, pour ceux qui lui souriaient en le félicitant, pour ceux qui enviaient sa réussite.
Lui… Il savait que tout était faux.
Je fais semblant
Je joue à croire que je mérite tout ça
Je suis tremblant, ces gens sont là pour moi
Je leur raconte ma vie et ils me voient
Tout était faux parce que malgré toute la tendresse qu’il avait pour Lindsay, il savait qu’elle n’était pas, ne serait jamais son âme sœur.
Il était temps maintenant de s’avouer la vérité, temps de laisser entrer dans sa vie cette réalité qu’il avait à tout pris refusé de contempler.
Aujourd’hui ses yeux se décillaient par la magie d’un autre sourire, le magnétisme d’un autre regard. Il savait que s’il passait à côté de cet amour, il passerait aux côtés de la vie.
Je fais plus semblant
Je rends sa vie à ma voix, à bout de bras
Celle que j´attends doit se cacher par là
Elle doit bien se cacher, je n´la vois pas
Je n´la vois pas
- S’il te plaît… Laisse-moi une chance.
Il ne faisait plus semblant parce qu’il n’en avait plus le temps. Il ne faisait plus semblant parce qu’à cet instant précis il savait que seule la vérité le sauverait d’une chute qu’il aurait lui-même provoquée, une chute dont il ne se remettrait pas.
A force de se mentir, il allait perdre ce qui lui était le plus précieux. Il n’était plus temps de se dissimuler derrière de faux semblants, plus temps de prétendre que tout cela n’était que des moments agréables qui ne signifiaient rien, de l’amitié améliorée qui faisait plaisir à tout le monde mais qui n’était pas vraiment lui.
Il était temps qu’il accepte ce qu’il était : un homme qui aimait les hommes. Ou plutôt un homme qui aimait UN homme… qui l’aimait comme un fou et qui risquait de le perdre pour l’avoir trop longtemps contraint à se cacher, avoir trop longtemps refusé d’avouer que c’était l’amour qui le poussait vers lui.
Le premier jour
Je me relève si on m´pousse dans la cour
Je suis Thierry la Fronde, je gagne toujours
Et le temps court...
Danny s’était tu. Il avait livré son âme comme jamais il ne l’avait fait auparavant, avec quiconque.
A cet instant là, il était au bord du précipice. Un mot pouvait l’y jeter, un autre mot pouvait refermer le gouffre sous ses pieds.
Bien sûr, rien ne serait facile, mais désormais il était prêt à tout affronter, parce que son amour valait qu’il se batte pour lui. Lindsay avait deviné et c’était elle qui lui avait ouvert les yeux. Lucy serait toujours leur fille, il serait toujours son papa adoré… Leur couple, lui, avait vécu. A lui de savoir s’il voulait faire seul le reste de son chemin ou oser enfin affronter sa vérité.
Sa vérité elle avait des cheveux bruns drus, des yeux bleu-gris à faire se damner un saint, un sourire qui allumait des millions de papillons au creux de son ventre.
Sa vérité, son amour…
Don avait refermé ses bras sur lui et il s’abandonna dans l’étreinte. Il était à sa place. Il ne ferait plus jamais semblant.
FIN
Chanson de Patrick Bruel