Les Shaddock pompait et Cissy reclassait...
Petite songfic offerte à Mamypirate lors de son anniversaire.
Les personnages de la série ne m’appartiennent pas. Ils sont la propriété exclusive de : Donald P. Bellisario & Don McGill. Je ne tire aucun bénéfice de leur mise en situation dans cette fiction.
Je m'en contenterai
Aimer à sens unique… Aimer comme un idiot parce qu’un regard bleu s’est planté dans le vôtre. Aimer sans être capable de trouver les mots, de dire les phrases, de poser les gestes… Aimer tout simplement.
Tu es comme une odeur
Dans un coin de mon cœur
Qui me colle aux regrets
Et même t'apercevoir
A travers le brouillard
Je m'en contenterai
Il y avait un avant et il y aurait un après… L’avant c’était le temps des rires, le temps de l’insouciance, le temps où il papillonnait de bras en bras, de cœur en cœur, sans se soucier de faire souffrir, sans se soucier des larmes et des reproches.
L’avant c’était comme une ivresse chaque jour retrouvée. Il n’avait pas d’obligations, pas de remords, pas de regrets. Il ne cherchait pas une approbation, un sourire, un geste, un simple regard. Il était juste lui, superbe et égoïste dans son envie de vivre et sa joie d’aimer. Mais tout cela ce n’était pas de l’amour : juste du désir, du plaisir, des moments de tendresse arrachés aux tourbillons des jours et aux dangers de son métier.
Sur le grand tableau noir
La craie de ma mémoire
Ne peut pas s'effacer
Et même te voir de loin
Dire adieu à un train
L’après… L’après ce serait de longues heures mortes, mortes comme serait son cœur, morte comme serait son âme…
Il savait maintenant la douleur d’aimer, cette souffrance qui vous tient au plus profond de l’être et qui ne vous lâche pas. Il savait les heures à espérer, sans espoir, les nuits à rêver ce qui ne serait jamais.
Alors il lui suffisait parfois d’un simple compliment, d’une main tendue vers lui, d’un clin d’œil pour illuminer son présent.
Je m'en contenterai
Je m'en contenterai
Lorsqu’il s’était aperçu de cet amour qu’il avait laissé grandir en lui sans même le soupçonner, il avait été le premier ébahi : quoi ? Lui ? Aimer un homme ? Aimer cet homme-là justement ? Non… Il se méprenait, il était fou ou bien…
Et puis petit à petit il avait dû s’incliner devant cette vérité et il avait choisi alors de se taire. Tout plutôt que l’humiliation de subir sa colère froide et cassante ou, pire, de l’entendre rire de ce sentiment qui à la fois le crucifiait et le transcendait.
Je n'ai pas d'autres choix
Tu es le seul été
Qui me sauve du froid
Même de tes non-dit
Et même de ton mépris
Sache que bon gré mal gré
Je m'en contenterai
Il s’était tu, jusqu’au jour où un simple sourire lui avait donné l’espoir, l’espoir insensé que peut-être…
Entre eux il n’y avait pas eu de grande déclaration : lui en aurait peut-être fait, mais il savait qu’il ne devait pas en attendre en retour, voire que les mots mettraient fin à cette parenthèse qu’il vivait.
Il y avait eu l’avant, il y aurait l’après et il y avait ce présent, ce présent fait de joie et de peine, de moments d’intense bonheur et de solitude absolue. Finalement, l’attente avait peut-être été préférable à ce lien qui ne disait pas son nom, à ces étreintes furtives, à ce secret pesant.
Finalement le rêve était préférable à cette tristesse comme une chape de plomb.
Tu erres en mon chagrin
Comme on promène un chien
Dans un mauvais quartier
De tes mots de bazar
Que t'écris au hasard
Sur du mauvais papier
Il s’était pourtant promis, pourtant répété qu’il ne brusquerait rien, qu’il lui suffirait de ce qu’on lui offrait : pas de jérémiades, pas d’exigences, pas de reproches… C’était le serment qu’il s’était fait la première fois, leur première fois, ce jour où son amant perdu en lui, il avait eu l’impression qu’enfin sa vie prenait un sens.
Oui… Il se souvenait alors de s’être répété indéfiniment les mêmes mots.
Je m'en contenterai
Aujourd’hui pourtant il ne savait plus… Il aurait voulu tellement plus que ces moments volés, cachés, presque honteux.
Parfois il avait envie de partir, partir loin de tout ça, refaire sa vie ailleurs, dans d’autres bras, se mirer dans d’autres yeux, se délecter d’une autre voix, caresser une autre peau…
Parfois seulement…
Parce qu’il suffisait que son amant le regarde, comme à cet instant là. Il suffisait que ses lèvres lui adressent l’un de ces sourires où il lisait tout ce qu’il avait envie de lire, que sa main vienne se perdre dans ses cheveux pour qu’il oublie tout, tout ce qui n’était pas eux.
Je n'ai pas d'autres choix
Tu es le seul baiser
Que je n'oublierai pas
Mon cœur vide de mots
Et mon corps, de ta peau
Je m'en contenterai.
Pourtant…
Pourtant chaque fois qu’il repartait, en catimini, au milieu de la nuit, il avait envie de hurler, hurler son désespoir comme une bête, hurler sa colère aussi, ce besoin d’être reconnu, d’être autre chose à ses yeux qu’un moment de plaisir qui comblait le vide de sa vie.
Mais il n’osait pas : ni larmes, ni reproches, ni déclaration… Il voulait se raccrocher à leur serment, à cette promesse du premier jour, de la première fois… Il avait cru alors que ce ne serait qu’un temps, celui de se rendre compte que c’était de l’amour plus que du désir, celui de s’attacher même si c’était un peu étrange, celui d’oser être aux yeux des autres…
Il avait voulu y croire et il s’était trompé. Des mois maintenant que ça durait, des mois peints aux couleurs de la volupté et de la solitude, de la joie et de la souffrance. Des mois à se sentir vivant tout en sachant qu’on en crevait ! Des mois…
Et un autre petit matin solitaire dans les draps froissés par leur ardeur de la nuit.
Dans un coin de mon lit
Ton absence est un cri
Que je n'ai pas poussé
Un cri du fond de moi
Qui grandit chaque fois
Que je crois t'oublier
Jusqu'au bout de ma vie
Il se souvenait des mots qu’il avait prononcés lorsque son amant hésitait encore. Il avait promis, il s’était engagé, et il n’avait pas l’intention de renier sa parole.
Il était peut-être aux yeux des autres un bellâtre insouciant, limite horripilant, sûr de lui et volontiers caustique, il était surtout un homme d’honneur.
Mais bordel ! Que ça pouvait faire mal parfois !
A cet instant précis, il aurait voulu des engagements, des caresses, des petits mots doux, tous ces petits riens qu’il ne recevrait jamais. Oh bien sûr, son amant lui faisait de petits cadeaux qu’il conservait précieusement, mais ce n’était pas ce qu’il attendait de lui. Trois petits mots usés et galvaudés auraient été le plus beau cadeau qu’on puisse lui faire.
Mais ces mots là, jamais il ne les entendrait, en tout cas pas de lui. Il fallait qu’il se fasse une raison et qu’il ne veuille pas plus que ce qu’on lui donnait.
Je me contenterai
D'un reflet dans la nuit
Je me contenterai
Et faute d'avoir le tout
Je me contenterai
De toi par petits bouts
Je me contenterai
De t'attendre partout.
Il fallait qu’il se fasse une raison…
Mais que faire quand la raison cède le pas au cœur ? Quand la tête est emplie des élans de l’âme ? Que faire lorsque vous aimez à vouloir le hurler ? Que faire lorsque celui qui hante votre être est là, devant vous, sans même donner l’impression que vous existez pour lui ?
Et puis soudain, il n’y avait plus de questions, plus rien que cet homme dont l’arme était pointée sur celui qu’il aimait…
Ca n’avait pas été calculé : juste un réflexe, un élan de tout son corps. Une course rapide, un coup d’épaule pour l’écarter de la trajectoire et ce choc, cette douleur soudain dans tout le corps tandis qu’il tombait, portant la main à sa poitrine et ne comprenant pas pourquoi il la ramenait rouge de sang.
Il y avait eu des bruits, des détonations et deux bras qui l’entouraient, le guidaient vers le sol, une main qui appuyait sur sa poitrine, lui arrachant une plainte et deux yeux emplis de larmes qui se fixaient aux siens tandis que la voix aux accent jamais entendus encore le suppliait de tenir bon, que l’ambulance allait arriver.
Il ne l’avait jamais vu comme ça, à la limite de perdre son sang froid. Il n’avait jamais lu dans les prunelles bleues ce qu’il y lisait aujourd’hui. Il n’avait jamais senti ses mains trembler autrement que de désir…
C’était peut-être sa seule chance et, quoi qu’il dusse advenir, il décida que de toute façon, il n’avait plus rien à perdre.
« Je t’aime », murmura-t-il d’une voix éteinte.
Il vit deux larmes rouler sur les joues de son amant, il le vit ouvrir sa bouche tandis que, d’une main frêle, il tentait d’essuyer les perles translucides. Puis ce fut la nuit.
Et si je meurs de ça,
Tu t'en contenteras.
Le bip du moniteur cardiaque emplissait la chambre de son battement régulier et il ouvrit les yeux, un peu égaré, se sentant surtout tellement épuisé.
Il lui fallut quelques instant pour comprendre, remettre les événements en place, se souvenir…
Se souvenir surtout de cette dernière seconde, juste avant la nuit qu’il avait pensée éternelle.
Son cœur se serra et le bip s’accéléra, en même temps, devenant plus fort et tirant du sommeil l’homme assis à sa gauche qui tenait sa main dans la sienne et qu’il ne vit qu’à ce moment-là.
- Tu es resté là tout le temps ? murmura-t-il d’une voix rauque.
Avant de lui répondre, Gibbs lui glissa un peu de glace pilée entre les lèvres et il les dégusta comme du nectar, tellement heureux de cette fraicheur dans sa bouche desséchée et sa gorge douloureuse.
- Où aurais-je pu aller ? Tu m’as fait peur, j’ai cru que j’allais te perdre.
- Ca t’aurait fait de la peine ?
- De la peine ! Ca m’aurait anéanti ! Tony… Je sais que je ne suis pas très démonstratif. Je sais que je t’ai dit qu’on ne devait pas savoir pour nous. Je me souviens de ce que nous avions convenu : ni engagement, ni larmes, ni regrets, pas de cette guimauve sirupeuse écoeurante…
- J’ai essayé de le respecter.
- Moi aussi… Pourtant si tu savais comme j’avais envie de te dire que tu étais la plus belle chose qui me soit arrivée en ce monde, que je voulais rester près de toi, me promener en public en te tenant la main, t’embrasser quand l’envie m’en prendrait…
- Je ne savais pas… Je croyais…
- Je sais ce que tu croyais. Parce que je suis un foutu bâtard entêté qui avait peur de ses propres sentiments. Et à cause de ça j’aurais pu te perdre sans que tu le saches…
- Sans que je sache quoi ?
Il avait bien compris ce que son amant voulait lui dire, mais il avait besoin de l’entendre, un besoin presqu’aussi vital que le sang qu’il voyait circuler de la perfusion suspendue au-dessus de sa tête à son bras. Un instant il crut que Gibbs ne se rendrait pas, trop fier, trop pudique pour se dévoiler à ce point. Puis il le vit se pencher vers lui et il lut dans son regard embué toute cette souffrance endurée, cette peur panique de se retrouver seul à nouveau et aussi tellement d’amour qu’il se demanda un moment s’il réussirait à en être digne. Enfin, il y eut ces mots qu’il avait pensé ne jamais entendre de lui
- Je t’aime Tony… Je t’aime comme un fou… Et si ce n’est pas partagé, si je suis juste un amant de passage alors tant pis, je m’en contenterai.
FIN
Chanson d’Isabelle Boulay