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Jour 6
Flack marchait d’un pas vif : il aimait cette heure de la nuit où les rues se vident petit à petit, même si dans ce quartier, il semblait qu’elles ne soient jamais totalement désertes. Il restait quand même sur le qui-vive, n’oubliant pas qu’un tueur rôdait qui avait pu jeter son dévolu sur lui sans même qu’il le sache. Un pas résonnant derrière lui le fit se crisper. Il refoula le réflexe de se retourner : il savait que ses amis protégeaient ses arrières, lui devait juste jouer le rôle du noctambule insouciant.
- Mac ? Tout va bien ?
Sur le point d’emboîter le pas à Don qui disparaissait dans la nuit, Sheldon se tourna vers Mac, un peu inquiet de voir celui-ci s’appuyer au mur.
- Oui ! Tout va bien ! C’est juste le contrecoup de la chaleur qui règne à l’intérieur de cette fournaise, répliqua le lieutenant d’un ton ferme.
- Et de quelques nuits sans sommeil je présume, compléta le médecin.
- Ce n’est pas le moment de me faire un check-up doc ! Occupez-vous de Flack et je m’occuperai de moi ! Filez, je m’occupe de récupérer la voiture !
Obéissant à l’ordre, Hawkes s’élança sur les traces de Don. Il entendit les pas de Mac qui s’éloignaient vers la droite, là où ils avaient laissé leur véhicule, juste derrière celui de Danny et de l’agent Spikes.
En quelques pas rapides, Sheldon eut de nouveau Flack en ligne de mire et il ralentit alors la cadence. Et puis les événements se bousculèrent : une silhouette s’interposa soudain entre lui et le policier :
- Attention : un homme semble avoir pris Flack en filature, murmura-t-il dans son micro.
- Signalement ? ordonna la voix de Silesman.
- Grand, plutôt baraqué, c’est tout ce que je peux en dire : il porte un sweet à capuche, je ne peux pas vous dire s’il est blanc ou noir ou de quelle couleur sont ses cheveux.
- Groupe 2, vous vous approchez ! ordonna l’agent du FBI.
- Reçu ! répliqua la voix de Danny dans l’oreillette de Sheldon et un bruit de moteur fit écho à sa réponse, indiquant que les deux policiers venaient rejoindre leur collègue.
Celui-ci restait plusieurs mètres derrière les deux hommes : son cœur s’emballa lorsqu’il constata que le second accélérait le pas pour rejoindre le premier.
Don savait qu’il était suivi et il savait que ce n’était pas l’un de ses équipiers : jamais ils ne se seraient tenus aussi près, au risque de faire capoter leur souricière. Il se raidit, entendant les pas qui approchaient toujours plus. Puis, au moment où il sut que l’homme était juste derrière lui il se retourna brusquement :
- Qui êtes-vous ? Qu’est-ce que vous me voulez ? demanda-t-il sèchement.
- Je t’ai vu au bar, tu me plais ! répliqua l’homme. Je croyais que tu allais partir avec ton mec mais…
- Ce n’est pas mon mec. On a juste passé un bon moment ensemble.
- Ben on pourrait en passer un aussi, si tu veux… Tu es tout à fait mon type tu sais !
Et l’homme se jeta sur lui pour l’embrasser.
- Arrêtez-vous ! Police ! Les mains en l’air !
Les phares d’une voiture vinrent éclairer la scène et l’agresseur, reculant tout en jetant des regards affolés autour de lui, se vit cerné par quatre hommes brandissant des armes tandis que celui sur lequel il avait jeté son dévolu reculait de trois pas puis revenait vers lui en présentant une paire de menottes tout en lui disant :
- Police ! Vous êtes en état d’arrestation ! Veuillez mettre vos mains derrière le dos !
- En état d’arrestation ! Tu es flic ? Mais pourquoi ? Qu’est-ce que j’ai fait de mal ?
- Vous êtes soupçonné de viols et de meurtres, rétorqua Silesman s’avançant à son tour tout en présentant sa carte.
- Le FBI maintenant ! Mais merde ! J’ai rien fait de mal ! Je voulais juste passer du bon temps.
- Ben tu vas passer du bon temps en prison, répliqua Don en poussant l’homme en avant.
- Mais j’ai rien fait ! protesta l’inconnu.
- Comme tous les détenus, persifla Sheldon tandis que Flack, sans écouter les jérémiades du prisonnier le dirigeait vers la voiture de Danny et de l’agent Spikes.
- Si vous n’avez rien fait, on vous présentera nos plus plates excuses, ajouta Silesman.
La voiture partit, emportant le prisonnier et Sheldon, Flack et l’agent fédéral se retrouvèrent seul sur le parking :
- Vous croyez que c’est lui ? questionna alors le médecin.
- J’espère bien…, grogna Don. J’en ai marre de jouer les belles de nuit.
- Pourtant ça te va bien, plaisanta Silesman, s’attirant un sourire de son ami avant d’ajouter : Bon, de toute façon ce n’est pas en restant là qu’on en aura le cœur net. On remballe et on va interroger ce coco.
- A ce propos, s’inquiéta soudain Don : où est Mac ?
- Il est parti chercher la voiture, répliqua Sheldon.
- La voiture ? Elle était garée où ? A Brooklyn ? persifla Silesman.
- Ce n’est pas normal, s’inquiéta brusquement Don.
- Taylor, vous m’entendez ? Taylor, répondez ! ordonna Alan dans son micro, gagné à son tour par l’inquiétude.
- Où est-ce que tu l’as laissé ? demanda Don au médecin.
- Là-bas ! Il était un peu étourdi en sortant de la boîte, il a préféré aller récupérer la voiture pour… Vous ne croyez pas que…
Le visage de Hawkes avait pâli soudain.
- On fonce ! déclara Silesman se mettant à courir, suivi des deux policiers.
Lorsqu’ils arrivèrent devant la voiture, ils durent se rendre à l’évidence : Mac Taylor n’y était pas et il ne semblait être nulle part aux alentours !
- Bordel ! C’est pas vrai ! grinça Silesman en envoyant un coup de poing sur la carrosserie.
- Il ne se sentait pas très bien. Il est peut-être rentré à l’intérieur, supputa Sheldon, voulant croire que leur angoisse était injustifiée.
- Ca ne l’empêcherait pas de répondre à nos appels ! contra Don qui ajouta : Va quand même voir.
- Et si vous le trouvez, foutez-lui mon poing sur la figure pour lui apprendre à nous faire des peurs pareilles ! ordonna Silesman avant d’enchaîner à l’intention de son ami : Tu ratisses de la porte à ici, je vais voir dans le van de contrôle si nos techniciens ont vu quelque chose !
Inquiet au-delà des mots, Don se contenta d’opiner de la tête avant de rebrousser chemin vers l’entrée du bar, cherchant une trace prouvant que Mac était passé par là. Silesman, lui, interrogeait les deux techniciens restés dans le van qui déclarèrent n’avoir rien vu de particulier tout en admettant qu’ils n’avaient plus vraiment fait attention puisqu’il semblait que l’agresseur s’était manifesté. L’agent fédéral leur ordonna alors de remonter les bandes sur les quinze dernières minutes tout en essayant d’entrer en communication avec Mac Taylor qui ne répondait toujours pas.
Il comprit pourquoi lorsque, quelques minutes plus tard, un Don décomposé vint le rejoindre accompagné de Sheldon tout aussi bouleversé : le lieutenant portait dans les mains l’oreillette et le bracelet micro qui avaient équipé Mac et qu’il avait trouvé à quelques mètres de là. Le doute n’était plus permis : Mac Taylor avait été enlevé !
- C’est pas vrai ! ragea Silesman tandis que Sheldon interrogeait :
- Vous pensez que c’est notre tueur qui l’a pris ?
- Et qui d’autre ? s’emporta Don. Tu crois vraiment qu’un autre type sévirait dans les parages ! Pourquoi est-ce que tu l’as laissé seul alors qu’il n’allait pas bien ? Bonjour l’équipier !
- Hé ! J’ai fait ce qu’il m’a ordonné ! Jusqu’à preuve du contraire c’est mon chef ! se défendit Hawkes.
- Ca suffit vous deux ! Vous règlerez vos comptes plus tard ! Pour le moment l’important c’est de récupérer Taylor avant que…
Il ne finit pas sa phrase mais chacun des policiers présents sentit un frisson courir sur son échine en pensant à ce que Mac risquait s’ils ne le retrouvaient pas à temps.
Don fut le premier à reprendre la parole :
- Excuse-moi, dit-il à Sheldon en lui tendant la main. Je sais que tu n’es pas responsable. Mais c’est juste que…
- Je sais… Et crois-moi je m’en veux. J’aurais dû être plus attentif.
- Les j’aurais dû, si j’avais su, ne nous avancerons pas plus que la colère ! reprit l’agent fédéral. Ce qu’il faut c’est tenter de trouver ce qui s’est passé. On va quand même lancer une recherche sur les personnes ayant quitté le club avant Mac et celles qui rôdaient aux alentours : on ne peut pas complètement exclure l’hypothèse d’une malheureuse coïncidence.
- Quoi ? Un autre pervers qui rôderait aux alentours ? demanda Don d’une voix partagée entre l’incrédulité et la colère.
- Non ! Mais un type qui pourrait connaître Taylor et lui en vouloir. J’imagine qu’il ne s’est pas fait que des amis durant toutes ces années au sein de la police ! Un gars a pu voir l’occasion de se venger ! On doit aussi s’assurer que l’abruti qui t’a abordé n’est pas notre pervers.
- Tu en doutes ?
- Je me dis qu’avec cette technique d’approche, il n’y a aucune raison pour qu’il ait réussi à embarquer nos quatre victimes qui n’étaient pas des demi-portions. J’ai plutôt l’impression qu’il est bien ce qu’il paraît : un mec qui a craqué sur toi et voulu tenter sa chance. On ne peut pas complètement lui en vouloir…
Mais la tentative d’humour de Silesman se solda par un regard noir de son ami qui n’appréciait guère ce détachement alors que Mac était en danger.
- Concrètement on fait quoi ? questionna-t-il.
- Comme je l’ai dit : on visionne les bandes vidéos et on lance un programme de reconnaissance faciale simultanément. J’appelle Spikes pour qu’il me passe ce type au troisième degré afin d’avoir au plus vite une réponse sur le fait qu’il soit ou non notre meurtrier.
- Bon sang ! J’y pense tout à coup ! s’exclama Hawkes.
- Quoi ? questionna Flack d’une voix pressante.
- Pendant que j’étais aux toilettes, Mac a été abordé par un type.
- Quel type ? A quoi il ressemblait ? Qu’est-ce qu’il a dit ? Où est-il passé ?
Les questions fusaient à la vitesse de l’éclair et Sheldon leva une main pour arrêter le flot :
- Je viens de te dire que j’étais aux toilettes. Lorsque je suis revenu il était déjà parti. Je ne l’ai même pas vu !
- Mais pourquoi n’en as-tu pas parlé avant ?
- Parce que je viens seulement d’y penser !
Avant que le ton ne monte de nouveau entre les deux hommes, l’agent fédéral ordonna :
- Vous allez récupérer les vidéos de sécurité du bar : on y voit peut-être notre mec.
- Mac et moi étions hors champ, rappela Sheldon. On ne le verra pas.
- Mais on pourra le voir s’approcher, ou partir… De toute façon il faut qu’on trouve et vite !
A ce moment-là le téléphone d’Alan sonna et il décrocha rapidement. Les deux policiers virent son visage se fermer tandis qu’il répondait laconiquement.
- Quoi ? Qu’est-ce que c’est ? demanda Don à peine son ami eut-il raccroché.
- Le type qui t’a abordé n’est pas notre meurtrier : il a un alibi irréfutable. Il est marin et il était en mer jusqu’à il y a deux jours. Il est venu s’encanailler lors d’une perm’ !
- Ce qui veut dire que les risques que Mac soit aux mains de notre tueur…, Don avait pâli.
- Sont bien plus grandes, oui, termina Silesman avant d’enchaîner : Alors il faut qu’on se bouge les fesses !
Il se dirigea de nouveau vers le van puis soudain il s’arrêta net et regarda autour de lui :
- Tu as vu quelque chose ? demanda Don.
- Non… C’est juste… Il y avait un camping-car ici, lorsque je suis sorti pour vous rejoindre sur le parking.
- Et alors ? demanda Sheldon.
- Ca ne vous paraît pas bizarre de venir dans ce coin avec un camping-car ?
- Pas forcément. Ca peut être un type qui rend visite à des amis, ou un SDF, il y en a de plus en plus.
- Oui, sauf qu’il n’était pas là à notre arrivée et qu’il n’est plus là maintenant, remarqua Silesman.
- Comment pouvez-vous savoir qu’il n’était pas là ?
- Parce que je l’aurais remarqué. A notre arrivée il y avait une fourgonnette de livraison rapide et un roadster à l’emplacement où j’ai vu ce camping-car tout à l’heure.
- C’est un peu mince non ? objecta Sheldon.
- Peut-être, mais mon instinct me dit… Après tout, quoi de plus pratique qu’une maison sur roues lorsqu’on mène une vie en marge de la loi ?
- Et si on part sur une fausse piste ?
La voix de Don était plus aigüe que d’habitude, preuve de la tension nerveuse qui l’habitait.
- C’est pourquoi on ne va pas mettre tous nos œufs dans le même panier. On transfère les données à votre labo pour la recherche faciale des membres sortis avant vous. J’envoie nos techniciens vérifier les vidéos de la boîte.
Puis se tournant vers Sheldon il interrogea :
- Combien de temps avant votre sortie ce type a-t-il abordé Mac ?
- Une dizaine de minutes, pas plus.
- D’accord, on visionne les bandes des dix dernières minutes.
Joignant le geste à la parole, Silesman entra dans le van, suivi des deux policiers et, après avoir ordonné aux techniciens de se présenter au gérant du bar pour récupérer les vidéos de surveillance, il remonta de dix minutes le film réalisé par la caméra braquée sur l’entrée du Recto-Verso. Malheureusement, c’était le moment où l’établissement commençait à se vider et plusieurs personnes sortirent simultanément. Impossible de repérer un suspect parmi la trentaine de membres qui avait quitté la boîte durant ce laps de temps. Soudain une ombre s’interposa entre la caméra et l’entrée.
- Le camping-car ! s’écria Don. Il est arrivé à ce moment-là.
- Ca ne peut pas être une coïncidence ! renchérit Sheldon. Vous aviez raison. S’il est arrivé à une heure douze, il n’est pas logique qu’il ne soit plus là vingt minutes plus tard !
Sur la bande, on voyait maintenant sortir Flack, suivi de quelques autres habitués des lieux, puis Mac et Sheldon. On vit Mac s’arrêter et s’appuyer au mur et Sheldon retourner sur ses pas pour lui parler. Un homme passa alors devant eux :
- C’est notre marin ! observa Silesman continuant à étudier les images.
On voyait Sheldon quitter Mac pour prendre la direction empruntée par Don, puis le lieutenant se redresser pour le suivre. Il disparut du champ après quelques mètres. Il disparut pour de bon, pensa Flack.
- Pourquoi la caméra ne l’a-t-elle pas suivi ? ragea-t-il.
- Parce que c’est un plan fixe ! Parce que de toute façon on ne pensait pas qu’il puisse être en danger. L’appât c’était toi !
- Mais Mac répondait aussi aux critères ! Il n’aurait jamais dû se trouver là !
- Ca… C’est avec lui que tu devras en discuter !
Silesman se rappelait de son mécontentement lorsque le chef du laboratoire lui avait signifié son choix, mais il n’avait pas envie d’entamer une guerre de territoire avec celui-ci et il avait préféré laisser tomber. Il s’en voulait maintenant : il aurait dû savoir que Mac était justement le genre de proie pour leur prédateur. Mais il n’était pas temps de compter les erreurs des uns ou des autres mais de remettre la main sur le policier avant qu’il ne soit trop tard, à supposer que ce ne soit pas déjà le cas, ajouta-t-il en jetant un coup d’œil nerveux à sa montre.
- Bon… Il y a maintenant trois quarts d’heure que Mac est porté manquant. Si notre type a vraiment un camping-car il faut nous dépêcher de le repérer !
- On a vingt-quatre heures, rappela Sheldon, se souvenant des conclusions des légistes.
- Dans vingt-quatre heures Mac sera mort ! s’emporta Don.
- On n’a pas vingt-quatre heures avant que ce malade n’assouvisse ses premiers besoins ! ajouta Silesman. On partait du principe qu’il détenait ses victimes chez lui. Mais si chez lui c’est effectivement ce camping-car, il lui suffit de se garer n’importe où un peu à l’écart et…
Don le regarda, épouvanté :
- Tu penses qu’il a pu déjà…
Il fut incapable de terminer sa phrase mais chacun comprit parfaitement à quoi il faisait allusion.
- Je n’en sais rien ! C’est pour ça qu’on n’a pas de temps à perdre en parlote ! On se branche sur la surveillance du trafic. Je me souviens parfaitement du camping-car. Pour sortir du quartier il a forcément emprunté la 12ème avenue puis soit Washington, soit Hudson Street alors on visionne toutes les bandes de ces caméras au plus vite !
Don regardait son ami, admirant son sang froid et son grand professionnalisme : oui, en dix ans, Alan Desmond Silesman était vraiment devenu un excellent agent fédéral, et si le dieu des flics lui prêtait vie, il irait loin, à moins que ses penchants sexuels ne le cantonnent dans les rangs subalternes, l’institution n’étant pas vraiment progressiste à ce sujet, même si désormais un agent homosexuel ne pouvait plus être révoqué sur ce seul motif.
Il ne fallut que quelques minutes pour repérer le camping-car grâce à l’excellente mémoire de l’agent fédéral. Les caméras de surveillance permirent de le suivre jusqu’à ce qu’il s’engage dans une ruelle dont il ne sortit pas.
- Il s’est engagé dans une ruelle joignant Carmine et Downing Street ! Il ne semble pas être ressorti.
Don accéléra encore un peu. Dès qu’ils avaient repéré le camping-car, les trois hommes s’étaient engouffrés dans la voiture, confiant à Lindsay le soin de prendre le relais et de les guider, ce qu’elle faisait avec efficacité.
- Ralentis un peu ! ordonna Silesman sur le siège passager. Si on vole dans le décor ça n’aidera pas Taylor !
Malgré son angoisse, Don comprit que son ami avait raison et il leva un peu le pied. Tout en conduisant, il priait pour arriver avant que cet animal n’ait posé ses mains sur son chef et ami. Que se passerait-il s’ils ne le retrouvaient pas à temps ? Est-ce que la dernière image qu’aurait Mac de lui serait cette querelle qui les avait opposés ? Il ne pouvait pas supporter cette idée.
- Là ! Il est là !
Le cri de Sheldon qui était aux aguets derrière la vitre arrière l’arracha à ses pensées. Il pila net et embraya la marche arrière. Effectivement, dans l’étroite ruelle obscure, on discernait la masse plus sombre du véhicule qu’ils poursuivaient. Don coupa le moteur et s’apprêta à sortir du véhicule :
- Attends ! J’appelle des renforts ! le retint Alan en lui empoignant le bras.
- Non ! Nous sommes trois et il est seul ! Le temps que les renforts arrivent qui sait s’il n’aura pas…
Sa voix s’étrangla : de nouveau il était incapable d’oraliser l’horreur que peut-être Mac était en train de vivre alors qu’ils hésitaient à intervenir. Silesman le regarda longuement puis jeta un coup d’œil à Sheldon, le voyant tout aussi déterminé que son collège.
- D’accord ! On y va.
Quelques minutes plus tard tout était terminé et l’homme qu’ils traquaient était dûment menotté, geignant de la blessure au bras que lui avait infligée l’agent fédéral alors qu’il menaçait Mac à demi-inconscient d’un scalpel.
Sheldon se tenait auprès de Mac, nu, gisant sur la couchette du camping-car. Il lui avait ôté les menottes qui le retenaient à la paroi et le médecin avait posé un pansement sur la profonde entaille qui coupait son bras de l’épaule au coude. Don l’observait, un peu à l’écart, détaillant le corps dénudé de son ami, épouvanté à l’idée qu’ils soient arrivés trop tard. Comprenant ce qui lui passait par la tête, Sheldon lui dit :
- Rassure-toi, je ne pense pas que ce malade l’ait violé.
- Comment peux-tu en être aussi sûr ?
- Aucun signe de fluide corporel sur lui et pas de sang.
- Il avait son pantalon et son boxer baissés ! rappela Don, sa rage remontant en se souvenant de la vue qu’il avait eu en faisant irruption dans le véhicule : cet homme, un sourire concupiscent plaqué sur ses traits vicieux, en train d’entailler le bras de Mac tout en se caressant lascivement.
Lorsqu’il l’avait vu, il avait posé le scalpel sur la gorge du policier qui gémissait doucement et menacé de lui trancher la carotide s’il ne le laissait pas terminer son office, l’invitant même à participer s’il le voulait d’une voix gouailleuse qui lui avait donné envie de lui vider son chargeur dans les tripes. Alan lui avait évité cette extrémité en tirant à travers la vitre, désarmant le pervers qui s’était écroulé au sol en gémissant. Don l’avait prestement menotté avant de le jeter hors de l’habitacle où le fédéral l’avait réceptionné, puis s’était précipité vers Mac, laissant bientôt sa place à Sheldon qui était mieux armé que lui pour porter les premiers secours à leur chef.
Il y avait un peu plus d’une heure trente que Mac Taylor avait été enlevé à la sortie de la boîte de nuit quand il fut déposé sur une civière puis chargé à l’arrière d’une ambulance qui s’élança, toutes sirènes hurlantes, vers l’hôpital universitaire de la première avenue. Don avait pris place à bord et il regardait son ami, ayant replongé dans l’inconscience, s’efforçant de penser que tout irait bien. Mac était sauvé, ils étaient intervenus à temps ! Mais au fond de lui, une petite voix lui susurrait que, peut-être, ils étaient arrivés juste quelques minutes trop tard. Il ne serait pleinement rassuré que lorsque les médecins leur donneraient leurs conclusions. Et si jamais l’impensable s’était produit, il se promit d’être là pour aider Mac à surmonter le traumatisme.
- Oui… Tu peux compter sur moi Mac. Je ne te laisserai pas tomber.
Il ne s’aperçut pas qu’il venait, pour la première fois, de tutoyer le chef de la section scientifique.
(à suivre)